Sainte-Marthe : « Un moment de crise est un moment de choix »

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Rester ferme dans la foi (Traduction intégrale)

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« Un moment de crise est un moment de choix, c’est un moment qui nous met face aux décisions que nous devons prendre », a affirmé le pape François lors de la messe qu’il célébrait ce 2 mai 2020 au matin, en la chapelle de la Maison Sainte-Marthe.

Dans les moments de crise, il a invité à « être très ferme dans la conviction de la foi » : « Au moment de la crise il y a la persévérance, le silence ; rester où nous sommes, fermes. Ce n’est pas le moment de faire des changements. C’est le moment de la fidélité, de la fidélité à Dieu, de la fidélité aux choses, [aux décisions] que nous avons prises. »

« Que le Seigneur nous donne la force – dans les moments de crise – de ne pas vendre la foi », a conclu le pape dans sa méditation dont nous proposons une traduction.

Homélie du pape François

La première lecture commence par « En ces jours-là, l’Église était en paix dans toute la Judée, la Galilée et la Samarie ; elle se construisait et elle marchait dans la crainte du Seigneur ; réconfortée par l’Esprit Saint, elle se multipliait. » (Ac 9,31). Temps de paix. Et l’Eglise grandit. L’Eglise est tranquille, elle a le réconfort de l’Esprit-Saint, elle est en consolation. C’était une belle période… Suivra la guérison d’Enéas, puis Pierre ressuscite Tabitha… tout cela se fait dans la paix.

Mais il y a des temps qui ne sont pas de paix, dans l’Eglise primitive : des temps de persécution, des temps difficiles, des temps qui mettent en crise les croyants. Des temps de crise. Et aujourd’hui l’Évangile de Jean nous raconte un temps de crise (cf. 6,60-69). Ce passage de l’Évangile est la fin de toute une série qui a commencé avec la multiplication des pains, quand on voulait faire roi Jésus. Jésus va prier, le lendemain ils ne le trouvent pas, ils vont le chercher, et Jésus leur reproche de le chercher parce qu’il leur donne à manger et non pour les paroles de la vie éternelle… Et toute cette histoire se finit là. Ils disent : “Donne-nous de ce pain”, et Jésus explique que le pain qu’il donnera est son corps et son sang.

« Beaucoup de ses disciples, qui avaient entendu, déclarèrent : “Cette parole est rude ! Qui peut l’entendre ?”» (v. 60). Jésus avait dit que celui qui ne mangerait pas son corps et (ne boirait pas) son sang n’aurait pas la vie éternelle. Jésus disait aussi : “Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour.” (cf. v. 54). C’est ce que disait Jésus. «Cette parole est rude ! » (v. 60) [pensent les disciples]. “C’est trop dur. Quelque chose ne fonctionne pas. Cet homme a dépassé les limites”. Et c’est un moment de crise. Il y avait des moments de paix et des moments de crise. Jésus savaient que les disciples murmuraient. Ici il y a une distinction entre les disciples et les apôtres : les disciples étaient 72 ou plus, les apôtres étaient les Douze. «Jésus savait en effet depuis le commencement quels étaient ceux qui ne croyaient pas, et qui était celui qui le livrerait.» (v. 64). Et devant cette crise, il leur rappelle : « Voilà pourquoi je vous ai dit que personne ne peut venir à moi si cela ne lui est pas donné par le Père.» (v. 65). Il recommence à parler de cette attirance par le Père : le Père nous attire à Jésus. C’est comme cela que se résout la crise.

Et « à partir de ce moment, beaucoup de ses disciples s’en retournèrent et cessèrent de l’accompagner.» (v. 66). Ils prirent leurs distances. “Cet homme est un peu dangereux… Mais ces doctrines… Oui, c’est un homme bon, il enseigne et il guérit, mais quand il parvient à ces choses étranges… S’il vous plaît, allons-nous-en” (cf. v. 66). Les disciples d’Emmaüs ont fait la même chose, le matin de la résurrection : “Mais oui c’est étrange : les femmes qui disent que le sépulcre… Mais cela sent mauvais – disaient-ils – allons-nous en vite parce que les soldats vont venir et vont nous crucifier” (cf. Lc 24,22-24). Les soldats qui protégeaient le sépulcre ont fait la même chose : ils avaient vu la vérité, mais ils ont préféré vendre leur secret : “Restons-en en sécurité : ne nous mêlons pas de ces histoires, qui sont dangereuses” (cf. Mt 28,11-15).

Un moment de crise est un moment de choix, c’est un moment qui nous met face aux décisions que nous devons prendre. Tous, dans nos vies, nous avons eu et nous aurons des moments de crise : crises familiales, crises matrimoniales, crises sociales, crises dans le travail, tant de crises… Cette pandémie aussi est un moment de crise sociale.

Comment réagir au moment de la crise ? « À partir de ce moment, beaucoup de ses disciples s’en retournèrent et cessèrent de l’accompagner. » (v. 66). Jésus prend la décision d’interroger les disciples : « Alors Jésus dit aux Douze : “Voulez-vous partir, vous aussi ?”» (v. 67). Prenez une décisions. Et Pierre fait sa deuxième confession : « Simon-Pierre lui répondit : “Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle. Quant à nous, nous croyons, et nous savons que tu es le Saint de Dieu.”» (vv. 68-69). Pierre confesse, au nom des Douze, que Jésus est le Saint de Dieu, le Fils de Dieu. La première confession – “Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant”– et tout de suite après, quand Jésus commence à expliquer la passion qui lui viendrait, il s’arrête : “Non, non, Seigneur, pas ça !”, et Jésus le réprimandera (cf. Mt 16,16-23). Mais Pierre a mûri un peu et ici il ne le réprimande pas. Il ne comprend pas ce que Jésus dit, ce “manger ma chair, boire mon sang” (cf. 6,54-56), il ne comprend pas, mais il fait confiance au Maître. Il lui fait confiance. Et il fait cette deuxième confession : “Mais à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle.” (cf. v. 68).

Cela nous aide tous à vivre les moments de crise. Dans mon pays il y a un dicton qui dit : “Quand tu es à cheval et que tu traverses un fleuve, s’il te plaît, ne change pas de cheval en plein milieu du fleuve”. Dans les moments de crise, être très ferme dans la conviction de la foi. Ceux-là se sont en allés, ils “ont changé de cheval”, ils ont cherché un autre maître qui n’était pas si “rude”, comme ils lui disaient. Au moment de la crise il y a la persévérance, le silence ; rester où nous sommes, fermes. Ce n’est pas le moment de faire des changements. C’est le moment de la fidélité, de la fidélité à Dieu, de la fidélité aux choses, [aux décisions] que nous avons prises. C’est aussi le moment de la conversion, parce que cette fidélité nous inspirera quelque changement pour le bien, pas pour nous éloigner du bien.

Moments de paix et moments de crise. Nous les chrétiens, nous devons apprendre à gérer les deux. Les deux. Certains pères spirituels disent que le moment de crise c’est comme passer par le feu pour devenir forts. Que le Seigneur nous envoie l’Esprit Saint pour savoir résister aux tentations dans les moments de crise, pour savoir être fidèles aux premières paroles, dans l’espérance de vivre ensuite les moments de paix. Pensons à nos crises : les crises de famille, les crises de quartier, les crises dans le travail, les crises sociales dans le monde, dans le pays… tant de crises, tant de crises.

Que le Seigneur nous donne la force – dans les moments de crise – de ne pas vendre la foi.

Traduction de Zenit, Anne Kurian

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Anne Kurian-Montabone

Baccalauréat canonique de théologie. Pigiste pour divers journaux de la presse chrétienne et auteur de cinq romans (éd. Quasar et Salvator). Journaliste à Zenit depuis octobre 2011.

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