Enfants réfugiés de Syrie, capture caritas.org

Enfants réfugiés de Syrie, capture caritas.org

ONU : la dignité au cœur de la réponse aux réfugiés

Print Friendly, PDF & Email

En vue d’un pacte mondial sur les réfugiés (traduction intégrale)

Share this Entry
Print Friendly, PDF & Email

« Les valeurs exprimées dans la Charte des Nations Unies, en particulier celles liées au respect des droits fondamentaux de l’homme et à la dignité et à la valeur de la personne humaine, doivent être au cœur de notre réponse au sort des réfugiés et des migrants ». C’est ainsi que Mgr Jurkovic a commencé sa déclaration devant le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, à Genève, le 10 juillet 2017.
L’observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies et d’autres Organisations internationales est intervenu dans la Discussion thématique 1 du Pacte mondial sur les réfugiés, sur le thème : « Dispositions passées et actuelles sur le fardeau et le partage des responsabilités ».
Il a plaidé pour « un mécanisme de financement spécifique pour appuyer … la mise en œuvre des engagements internationaux liés à la migration » et pour des « ‘accords’ fondés sur les valeurs et les principes de longue date, déjà énoncés par les États et donc consacrés dans les instruments internationaux liés aux mouvements de masse de réfugiés ».
Il faut aussi, a dit Mgr Jurkovic, « améliorer la coopération en matière de réduction des mouvements irréguliers et de démantèlement des réseaux criminels » tout en facilitant « l’intégration des réfugiés ». « Une solution durable, efficace et globale ne semble pas possible, a-t-il insisté, sans l’engagement de toutes les parties prenantes ».
Voici notre traduction de la déclaration de Mgr Jurkovic.
CR
Déclaration de Mgr Jurkovic
Ma délégation souhaite accueillir les deux coprésidents et aimerait remercier les membres du panel pour leurs présentations approfondies.
Les valeurs exprimées dans la Charte des Nations Unies, en particulier celles liées au respect des droits fondamentaux de l’homme et à la dignité et à la valeur de la personne humaine, doivent être au cœur de notre réponse au sort des réfugiés et des migrants. Ces mêmes principes fondamentaux sont affirmés par la plupart des principales traditions religieuses dans le monde et par les personnes de bonne volonté. La règle d’or nous oblige à traiter les réfugiés et les migrants comme nous voudrions que les autres nous traitent si nous étions dans leur situation.
Dans le cadre de l’Agenda 2030 et de la Déclaration de New York, les États Membres de l’ONU se sont engagés dans un ensemble de priorités partagées. Dans le domaine de la politique commerciale, ces actions sont facilitées par une « enveloppe de financement » spécifique, appelée ‘Aid for Trade’. Dans le domaine du changement climatique, un système élaboré de financement des véhicules existe pour soutenir l’adaptation et l’atténuation dans les pays en développement. De même, nous avons besoin d’un mécanisme de financement spécifique pour appuyer le développement des capacités pour la mise en œuvre des engagements internationaux liés à la migration.
En incluant un certain nombre d’objectifs liés à la migration dans le programme de 2030 et en adoptant la Déclaration de New York, les États ont commencé à reconnaître que la gestion des migrations internationales est une responsabilité partagée et exigera un engagement commun à traduire les mots en produits livrables. Le nom ‘Pacte mondial’ a été choisi pour assurer une action mondiale en réponse à un phénomène mondial : actuellement, un nombre sans précédent de 65,6 millions de personnes dans le monde ont été contraintes à quitter leur maison et parmi elles on compte près de 22,5 millions de réfugiés (1).
Lorsque nous sommes confrontés à ce phénomène, nous sommes conscients que la solidarité avec une partie significative de l’humanité souffrante ne se produit pas sans sacrifice. Dans certains cas, les réfugiés sont plus nombreux que la population locale, ce qui pose des difficultés évidentes. Pour gérer cette question, il est donc nécessaire que tous les gouvernements et les membres de la société civile partagent leurs responsabilités et leurs poids respectifs dans un véritable esprit de solidarité. Nous avons besoin d’une action mondiale ancrée dans la solidarité.
Le Pacte mondial sur les réfugiés devrait viser à fournir des « accords » fondés sur les valeurs et les principes de longue date, déjà énoncés par les États et donc consacrés dans les instruments internationaux liés aux mouvements de masse de réfugiés. À cette fin, comme y a appelé le pape François, notre réponse partagée devrait « être articulée autour de quatre verbes : accueillir, protéger, promouvoir et intégrer » (2).
Une priorité constante pour les États sera et devrait être d’améliorer la coopération en matière de réduction des mouvements irréguliers et de démantèlement des réseaux criminels qui ont fait un business de la contrebande de migrants ou de personnes victimes de la traite, en exploitant leur désespoir et leur recherche d’une vie meilleure.
Alors qu’augmente la pression publique pour être dur à l’égard de l’immigration clandestine, les États devraient cependant tenir compte des leçons tirées de la réponse à d’autres formes de commerce illicite et éviter l’incrimination des victimes et la dépendance des frontières et de l’application des lois seulement. Les partenariats bilatéraux, régionaux et interrégionaux et les plates-formes de coopération en matière de migration peuvent fournir des sites précieux pour renforcer la confiance et les capacités. Ce processus pourrait également jouer un rôle essentiel en veillant à ce que la pratique et la coopération des États en matière de migration irrégulière, de trafic d’êtres humains et de contrebande de migrants soient guidées par le droit international et le respectent, y compris les droits de l’homme et le droit des réfugiés, et ne compromettent pas le droit de demander l’asile.
À leur arrivée à leurs destinations respectives, les réfugiés trouvent souvent la méfiance, le soupçon, la discrimination, le racisme et le manque de politiques claires qui entravent leur acceptation. Après avoir été déplacés de force de leur domicile, ils sont souvent confrontés à un rejet, à une exclusion et à l’absence d’accueil dans les endroits où ils recherchent l’accueil et la protection.
Un changement de comportement est nécessaire de la part de chacun, « s’éloignant des attitudes de défensive et de peur, d’indifférence et de marginalisation – toutes typiques de la culture du jetable – vers des attitudes basées sur une culture de la rencontre, la seule culture capable de bâtir un monde meilleur, plus juste et plus fraternel » (3). Même si nous pouvons trouver diverses organisations engagées dans l’ouverture de canaux humanitaires accessibles et sécurisés, une solution durable, efficace et globale ne semble pas possible sans l’engagement de toutes les parties prenantes.
En outre, les efforts visant à façonner l’action au niveau mondial doivent être inextricablement liés à la protection et à la promotion de la dignité humaine de tous les réfugiés, qui ont toujours été un pilier essentiel de la mission et des programmes du HCR.
La protection des droits fondamentaux de toutes les personnes est essentielle pour s’attaquer à la situation des réfugiés et des personnes déplacées, prévenir les causes profondes des déplacements ultérieurs et créer un environnement sûr et accueillant pour ceux qui sont déjà forcés de fuir. Aucun Etat ne peut atteindre ces objectifs de manière solitaire. Encore une fois, une solidarité régionale et mondiale est indispensable pour promouvoir des sociétés plus justes et pacifiques, qui doivent être l’objectif ultime de la prévention des déplacements forcés de personnes. À cet égard, comme à de nombreuses autres occasions, le Saint-Siège s’engage à participer à cette tâche commune et urgente.
Enfin, il est de la plus haute importance que nous encouragions et facilitions l’intégration des réfugiés. L’intégration complète et accueillante est la voie naturelle pour assurer la construction de sociétés pacifiques, dans lesquelles les gens coexistent tout en étant enrichis par leurs différences. En fait, les avantages d’une intégration réussie peuvent être mesurés à l’échelle économique. Une étude récente a révélé que les réfugiés, au cours des 20 premières années depuis leur arrivée, avaient individuellement versé 21 000 $ en impôts, plus qu’ils n’avaient reçu en aides (4).
En outre, comme l’un des principes fondamentaux du programme 2030 est de « ne laisser personne en arrière », la communauté internationale devrait inclure la contribution anticipée des réfugiés et des demandeurs d’asile dans ses plans respectifs pour le développement à moyen et à long terme.
Le Dr Evans a estimé que le coût de la réinstallation en 2014 était de 9.680 $ par réfugié, ce qui se traduit par moins de six dollars par ménage américain. Il a constaté qu’il a fallu neuf ans aux réfugiés pour devenir des contributeurs nets de la société. Après neuf ans aux Etats-Unis, les contributions fiscales des réfugiés ont augmenté au point de compenser totalement et de finalement dépasser les coûts de l’assurance sociale (timbres alimentaires, prestations sociales, sécurité sociale, Medicaid et Medicare).
En conclusion, Monsieur le Président,
La Déclaration de New York nous a mis sur le chemin vers la solidarité mondiale avec les réfugiés. Tout en continuant à reconnaître le niveau de déplacement sans précédent actuellement en cours, nous devons fortement affirmer les droits des réfugiés et nous engager à renforcer la protection et les solutions durables dont ils disposent, conformément à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et à son Protocole de 1967.
À cette fin, il faut garder à l’esprit que les réfugiés ne sont pas des pions sur l’échiquier de l’humanité. « Ce sont des enfants, des femmes et des hommes qui partent ou qui sont forcés de quitter leur foyer pour diverses raisons, qui partagent un désir légitime de connaître et d’avoir, mais surtout d’être plus » (5). Luttons donc pour promouvoir l’ouverture aux réfugiés et aux migrants forcés parmi tous les États et les membres de la société civile dans toutes les régions du monde, car « sans cela, la construction d’une société juste, d’une paix solide et durable devient impossible » (6) tout en reconnaissant notre lien commun dans une unique famille humaine.
1 UNHCR data, http://www.unhcr.org/figures-at-a-glance.html
2 Pape François Message au 6ème Forum international sur la migration et la paix, 21 février 2017.
3 Pape Francis, Message pour la Journée mondiale des migrants et des réfugiés, 5 août 2013.
4 William N. Evans, Daniel Fitzgerald. The Economic and Social Outcomes of Refugees in the United States: Evidence from the ACS, National Bureau of Economic Research Working Paper, juin 2017.
5 Pape Francis, Message pour la Journée mondiale des migrants et des réfugiés, 5 août 2013.
6 Pape François Message au 6ème Forum international sur la migration et la paix, 21 février 2017.
© Traduction de Zenit, Constance Roques

Share this Entry

Constance Roques

FAIRE UN DON

Si cet article vous a plu, vous pouvez soutenir ZENIT grâce à un don ponctuel