Migrants, Croatie, 2015 - Courtoisie du JRS

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Migrations: le pape a confiance dans la capacité de l'Europe à "intégrer"

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La crise migratoire dans le livre-entretien avec D. Wolton (3)

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Dans “Politique et société”, le pape François revient sur la crise mondiale des migrations et il met en évidence la capacité de l’Europe à « intégrer ».
Le livre-entretien du pape François avec Dominique Wolton (Editions de L’Observatoire, 432 p.) sort en librairie en France le 6 septembre 2017, mais des bonnes feuilles sont publiées ce 1er septembre dans Le Figaro Magazine (pp. 37-42), avec une présentation de Jean-Marie Guénois. C’est le fruit de douze entretiens de Dominique Wolton et du pape François répartis sur deux ans.
« Nous sommes tous des migrants, et nous sommes tous des réfugiés » : Dominique Wolton cite cette phrase du pape à Lesbos, au camp de réfugiés de Moria, où il s’est rendu accompagné du patriarche œcuménique Bartholomée et de l’archevêque d’Athènes Hiéronyme, le 16 avril 2016. Ils y ont signé une déclaration commune.
Le pape préfère citer une autre phrase que les réfugiés portaient sur leurs Tee-shirts : « Je ne suis pas un danger, je suis en danger ».
Le pape revient à « l’histoire sainte » : Abraham, les « migrations du Peuple d’Israël ». Plus encore : « Jésus lui-même a été un réfugié, un immigrant ». Pour affirmer : « Existentiellement, de par la foi, nous sommes des migrants ».
Il y aurait comme une atmosphère de Genèse dans les propos du pape : le paradis perdu, Adam et Eve exilés, réfugiés sur la face de la terre. Et la nostalgie du retour.
Une des images favorites du pape revient – le chemin, la marche – : « Quand un homme ou une femme n’est pas en chemin, c’est une momie. C’est une pièce de musée. La personne n’est pas vivante. »
Face à l’aggravation de la situation depuis Lesbos, Dominique Wolton insiste. Le pape ne mâche pas ses mots : « Pourquoi quittent-ils leur terre ? Par manque de travail, ou à cause de la guerre. Ce sont les deux principales raisons. Le manque de travail parce qu’ils ont été exploités – je pense aux Africains. L’Europe a exploité l’Afrique… Je ne sais pas si on peut le dire ! Mais certaines colonisations européennes… oui, elles l’ont exploitée. »
Il cite ce chef d’Etat africain qui décide de reboiser : « Les puissances économiques mondiales avaient coupé tous les arbres. » Avec cette conséquence : « La terre est sèche d’avoir été trop exploitée, et il n’y a plus de travail. »
Quelle réponse apporter ? Avant le droit à émigrer il y a le droit à ne pas émigrer déjà cher à Benoît XVI, rappelle, en d’autres termes, le pape François : « La première chose que l’on doit faire, et je l’ai dit devant les Nations unies, au Conseil de l’Europe, partout, c’est de trouver là-bas des sources de création d’emplois, et d’y investir. »
Il ajoute immédiatement, réaliste : « Il est vrai que l’Europe doit investir également chez elle. Car ici aussi il y a un problème de chômage. »
Seconde grande cause des migrations, les conflits. Le pape est clair: « S’il y a la guerre, [les gens] devront quand même fuir. Or, qui fait la guerre ? Qui donne les armes ? Nous. »
Le pape rêve d’une autre Europe, qui n’ait pas peur de redevenir « mère ». Il évoque l’hiver démographique et ses conséquences : « L’Europe peut perdre le sens de sa culture, de sa tradition. Pensons que c’est l’unique continent à nous avoir donné une aussi grande richesse culturelle, et cela je le souligne. L’Europe doit se retrouver en retournant à ses racines. Et ne pas avoir peur. Ne pas avoir peur de devenir l’Europe mère. »
Il constate : « L’Europe en ce moment a peur. Elle ferme, ferme, ferme… » Mais il rappelle l’histoire des migrations qui ont fait l’Europe et la capacité du continent à « intégrer »: « L’Europe, c’est une histoire d’intégration culturelle, multiculturelle comme vous dites, très forte. Depuis toujours. Les Longobards, nos Lombards d’aujourd’hui, sont des barbares qui sont arrivés il y a longtemps… Et puis tout s’est mélangé et nous avons notre culture. Mais quelle est la culture européenne ? Comment, moi, je définirais aujourd’hui la culture européenne ? Oui, elle a d’importantes racines chrétiennes, c’est vrai. Mais ça, ce n’est pas suffisant pour la définir. Il y a toutes nos capacités. Ces capacités d’intégrer, de recevoir les autres. »

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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