« Le chemin pour guérir est dans Laudato si’ », affirme le cardinal Michael Czerny, dans un entretien accordé au quotidien catholique italien « Avvenire (Lucia Capuzzi et Stefania Falasca), jeudi 21 mai 2020. Il prône un retour à un regard contemplatif sur la création.
« La Covid a amplifié le lien intime entre le cri de la terre et celui des êtres humains. Le monde nouveau doit être guéri des maladies de l’autodestruction et de l’injustice », estime le cardinal canadien, sous-secrétaire du Dicastère pour le service du développement humain intégral: « C’est cette accélération dont parle le pape François dans Laudato si’. Elle ne se manifeste pas seulement dans la rapidité avec laquelle le virus se propage, mais aussi dans la vitesse avec laquelle des millions d’emplois sont en train de disparaître, la vie sociale et les événement se transfèrent sur la Toile et la réalité se numérise ».
Le dicastère romain a en effet promu cette semaine une série d’initiatives en ligne, en raison de la pandémie -, pour réfléchir sur Laudato si’ ».
Responsable de la section Migrants et Réfugiés du dicastère, le cardinal Czerny espère des solutions innovantes: « La crise socio-environnementale comme la pandémie requièrent des solutions innovantes à tous les niveaux, pas seulement pour et de la part « des autorités ». La dégradation environnementale a probablement contribué à la propagation du virus. Mais notre prise de conscience doit aller beaucoup plus loin. Jusqu’à saisir le coeur des anti-valeurs qui ont alimenté la civilisation hyper-compétitive et consumériste d’hier. Le ”monde nouveau” après la Covid doit être meilleur. Il doit également guérir des maladies de l’auto-destruction, de l’injustice et de l’indifférence. Laudato si’ nous indique le chemin pour être guéris : ce développement inclusif et durable qui mérite le nom d’intégral. Pour le mettre en oeuvre, l’encyclique propose le dialogue comme fondement nécessaire de l’action. La seule approche pour une régénération post-Covid est le dialogue. Ce qui signifie d’impliquer toutes les parties en cause. C’est cela, la méthode synodale. »
Il souligne le rôle de Laudato si’, publiée peu avant « Paris 2015 »: « L’encyclique a préparé le terrain pour l’Accord de Paris de 2015 qui, malgré sa faiblesse, est un premier pas nécessaire. Et surtout, elle a stimulé de nombreuses formes d’action dans les paroisses, dans les autres religions, ainsi que dans les groupes et mouvements laïcs. »
Il rappelle que la lutte pour la « maison commune » est ancrée dans la foi: « Avant d’être une « question socio-environnementale », la Création est un article fondamental de la foi. Elle en est une partie essentielle, comme le rappelait à tous, et surtout aux chrétiens, saint Jean-Paul II. Nous disons : « Je crois en Dieu, le Père tout-puissant, Créateur du ciel et de la terre ». La vie humaine se base sur trois relations intimement liées : avec Dieu, avec le prochain et avec la terre, don du Seigneur. Fausser l’une d’elles est un péché. Soigner les relations rompues et restaurer l’harmonie dans sa triple dimension signifie participer à la rédemption du Christ. »
Pour le cardinal Czerny, le synode pour l’Amazonie aussi est un fruit de l’encyclique du Pape François: « En dénonçant courageusement les péchés sociaux et économiques dans une région donnée, le Synode a montré ce que signifie prendre au sérieux Laudato si’. C’est une leçon à suivre partout. L’exhortation synodale Querida Amazonia, en outre, reconnaît ouvertement les peuples amazoniens, en particulier les indigènes, comme les premiers protagonistes indispensables pour la protection de l’Amazonie, pour eux-mêmes et pour le monde. Une « provocation » pour ceux qui, souvent inconsciemment, entretiennent encore des attitudes colonialistes vis-à-vis des autres cultures ou qui considèrent comme dues les ressources naturelles. »
Il suggère de commencer par retrouver le goût de la contemplation: « Par un chemin contemplatif. La spiritualité chrétienne aide à motiver les nécessaires changements personnels, sociaux et politiques en faisant mûrir notre responsabilité envers la création, notre maison commune. »
Avec Anita Bourdin