Santo Marcianò Archevêque ordinaire militaire pour l’Italie

Santo Marcianò Archevêque ordinaire militaire pour l’Italie

« L’amour du Seigneur, sans fin je le chante » !

Fin de la mission de l’Ordinaire militaire pour l’Italie

Share this Entry

 

Selon un communiqué du bureau de presse du Saint-Siège du vendredi 11 avril 2025, conformément à la loi italienne réglementant le service de l’assistance spirituelle aux forces armées, S.E. Monseigneur Santo Marcianò a quitté le 10 avril dernier, à l’âge de 65 ans, le poste d’Ordinaire militaire pour l’Italie.

 

Le mercredi 9 avril à 11h, l’Ordinaire militaire pour l’Italie, S. Exc. Mgr Santo Marciano, dans la basilique des Saints-Apôtres à Rome, a présidé la messe chrismale, à laquelle ont pris part les aumôniers militaires de toute l’Italie. Célébration “à l’approche de Pâques” qui est anticipée par rapport à la date classique (généralement dans la Semaine Sainte) en raison de la coïncidence avec la fin du mandat de l’Ordinaire militaire, fixé par la législation en vigueur à l’âge de soixante-cinq ans, que Mgr Marciano a atteint le 10 de ce mois. 

Cet important rendez-vous était aussi pour l’Ordinaire l’occasion de saluer la communauté diocésaine qu’il a guidée pendant 12 ans avec un grand zèle apostolique, en Italie et dans les missions étrangères de soutien à la paix. 

Voici l’homélie que Mgr Santo Marciano a prononcée, occasion pour l’Ordinaire de saluer la communauté du diocèse aux armées pour la fin de son mandat qui tombait le lendemain, 10 avril.

 

« L’amour du Seigneur, sans fin je le chante » !

Homélie de la messe chrismale
Rome, Eglise des Saints-Apôtres, 9 avril 2025 

 

Très chers confrères, c’est par un chant que le Psalmiste (Ps 88) nous fait entrer dans cette liturgie chrismale, pour nous aussi occasion de salut et d’action de grâce, au terme du mandat d’Ordinaire militaire. Pendant près de douze ans, nous avons cheminé dans l’amour «du» Seigneur. 

Oui, c’est Son amour qui fait bouger nos pas; c’est Son amour qui nous a appelés au sacerdoce, dont nous faisons mémoire dans l’Eucharistie d’aujourd’hui. Parce que cet amour nous est donné chaque jour, par la fidélité de Dieu: «Mon amour et ma fidélité sont avec lui» promet-Il; et les promesses sacerdotales que nous renouvelons ne sont rien d’autre qu’une réponse joyeuse et étonnée à Sa fidélité que nous pouvons reconnaître à chaque instant, dans toutes les circonstances de notre vie et de notre sacerdoce.

Avec Lui, donc, nous regardons aujourd’hui ensemble en arrière; nous le faisons alors que, par une disposition providentielle, nous pouvons «proclamer une année de bienfaits accordée par le Seigneur» (cf. Is 61,1-3.6.8b-9). Le Jubilé, dans son temps solennel, temps particulièrement consacré – presque réservé – à Dieu, temps d’indulgence et de pardon, temps de miséricrde et de gratitude, est aussi un espace de repos et de mémoire, qui fait revivre tout ce que le Seigneur fait en nous, avec nous, avec Son peuple: il est temps de relire l’histoire, de restituer l’histoire. Parce que l’histoire, comme l’amour, est «du» Seigneur, elle est traversée par Sa «grâce».

Et vraiment la grâce de Dieu a traversé l’histoire de ces années! Elle s’est abondamment répandue sur notre Ordinariat militaire de l’Eglise; mais si elle a porté du fruit, c’est aussi pour votre sacerdoce qui l’a accueillie; pour le ministère de vous autres, aumôniers militaires, dont j’ai pu connaître toujours mieux la valeur, en apprenant beaucoup de vous tous et en grandissant avec vous dans mon propre épiscopat.

En reprenant les paroles de Jésus dans l’Evangile (Lc 4,16-21), j’aime à penser que ces années ont été des années où notre sacerdoce commun, qui est un seul saceroce, ont été «accomplies». Je le dis avec une émotion particulière en ce jour où se célèbre également l’anniversaire de mon ordination sacerdotale. Il n’y a pas d’évêque sans prêtres et l’«accomplissement» est commun, parce qu’il apporte, avec la croissance personnelle dans le sacerdoce, une croissance de la communion.

C’est pour cette communion que je rends ma première et plus grande grâce à Dieu!

Nous l’avons accueillie et cultivée dans les rencontres personnelles, ici à Rome ou dans vos Sièges; et vos visages sont pour moi gravés dans la mémoire, dans la gratitude, dans la prière. J’ai vécu avant tout pour vous, prêtres, en portant chacun au plus profond de mon coeur et de mes «entrailles». J’ai admiré avec une fierté paternelle les fruits de la fécondité presbytérale, jaillis de cet amour personnel pour le Christ qui se fait anxiété et créativité pastorale; j’ai pleuré vos larmes, confiant à la Paternité de Dieu douleurs et fatigues, même celles auxquelles ma propre paternité ne parvenait pas à remédier.

Et je me suis tant réjoui avec vous, spécialement dans les moments magnifiques et irremplaçables de rencontres entre prêtres: les cours de formation annuels, une occasion précieuse d’actualisation, de partage, de prière et de refaire ses forces; les Exercices spirituels, qui nous ont vus bousculer la Parole, priant ensemble et priant les uns pour les autres:  comment ne pas rappeler, entre tous, le chemin sur les pas de Jésus avec les Exercices en Terre Sainte?

Une joie, la nôtre, qui s’est enrichie pour le chemin accompli par le séminaire Jean XXIII. Je ne cesse, vous le savez, de rendre grâce à Dieu pour ce don et pour le don de formateurs qui ont su le garder et en prendre soin: merci à vous! Et merci à tous les séminaristes qui ont fait la communauté, dont j’ai eu la grâce d’ordonner de nombreux prêtres.  Le Séminaire, disait saint Jean-Paul II, est la «prunelle des yeux» par laquelle l’évêque peut regarder son Eglise et aussi regarder vers l’avenir; ayant vécu le séminaire dans la clandestinité, il savait bien combien cette réalité est précieuse pour chaque diocèse; d’autant plus qu’elle l’est pour notre Eglise, avec ses particularités pastorales. Continuez à miser sur le séminaire, avec courage et confiance dans le Seigneur qui ne cesse d’appeler ses enfants; et rappelez-vous que, si des temps difficiles semblent arriver sur le plan vocationnel, ce n’est pas une raison pour abandonner mais pour insister et travailler plus! Le Séminaire, en effet, est un berceau de vocations et un instrument de contact avec les jeunes.

Dans notre Eglise, les jeunes ne manquent pas; et je remercie pour la façon dont ils sont accompagnés, humainement et spirituellement, par vous aumôniers et par les initiatives du Bureau de la Conférence épiscopale italienne. Pastorale des jeunes, qui ces dernières années a beaucoup travaillé, comme ont beaucoup travaillé les autres Bureaux de la Curie, réorganisés et reliés aux diocèses territoriaux et aux Bureaux de la Conférence épiscopale italienne. En pensant particulièrement aux jeunes, je me souviens de beaucoup d’entre eux , rencontrés dans des audiences, des célébrations, des voyages; les jeunes qui, toujours plus nombreux, ont participé aux écoles de prière, apprenant le silence de l’écoute et le langage de l’adoration. Et je me rappelle combien de jeunes militaires sont arrivés à Lourdes, dans le Pèlerinage Militaire International, en serrant la main aux frères d’autres pays et en se laissant prendre la main par Marie, pour pouvoir changer de vie: avec une confession, avec un chapelet à la grotte, avec une messe, avec l’aide d’un prêtre … Le prêtre est vraiment une présence irremplaçable. Rappelons-nous la sagesse de Jean-Marie-Vianney: «laissez une paroisse vingt ans sans prêtre, on y adorera les bêtes».

Et la grandeur du ministère sacerdotal est proclamée par Jésus, dans la «Personne» de qui notre vie de prêtres s’offre et se consume: «L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la bonne nouvelle aux pauvres».

Comme Lui, l’Esprit nous a consacrés; et c’est l’Esprit le véritable protagoniste de notre histoire et de l’histoire de ces années. L’Esprit qui est «du» Sreigneur, comme l’Amour; l’Esprit qui est l’Amour dans la Trinité. Voilà pourquoi, écrit Teilhard de Chardin: «Le luxe du prêtre est de pouvoir aimer tout le monde». Tous, tous, tous, crie le pape François …

L’Esprit qui nous a envoyés à nos pauvres et aux pauvretés de notre Eglise, même les plus cachées, pour  «évangeliser» (euaggelizo), dit littéralement l’Evangile de Luc; c’est-à-dire pour porter la Parole de joie.

Avec vous, j’ai eu la joie d’apporter à nos militaires la Parole de Dieu, le baume et la force pour la vie.

Parole qui peut «consoler tous les affligés». Et combien d’affligés, quelle détresse en ces années! 

Nous avons assisté, surtout ces derniers temps, à une recrudescence inattendue et à une diffusion progressive de nombreux foyers de guerre, qui interpellent en quelque sorte les militaires italiens. Je pense en particulier à ceux qui sont engagés dans les missions internationales qui, sur terre ou en mer, exigent un engagement croissant. Je les ai toujours visités quand j’en ai eu l’occasion, surtout pendant les fêtes; et j’ai surtout vu la façon dont vous, aumôniers, les soutenez dans cette vie fatiguante et risquée, en les aidant à mûrir dans leur vocation d’artisans de paix. Une vocation qui, dans ces lieux, cherche le dialogue, la relation avec les populations locales, le service humanitaire, mais exige pour tous les militaires une formation adéquate, où qu’ils soient et quel que soit leur rôle. En tant que prêtres, vous accompagnez personnellement tout le monde: des militaires dans les casernes aux élèves dans les écoles; de ceux qui sont engagés dans les urgences à ceux qui exercent des tâches de haute responsabilité de direction, même dans le monde des institutions. Vous êtes accueillis et recherchés par eux et stimulés à leur service de la justice, du bien commun, de la paix, sachant qu’en tout lieu c’est un privilège – cela l’a été aussi pour moi – de porter le Christ et son Evangile, d’apporter l’huile de consolation qui nous a oints dans l’ordination et qui doit être versée sur les frères.

Et nous avons eu besoin d’une grande consolation au moment de la pandémie. Cinq années seulement se sont écoulées et elles semblent lointaines, presque irréalistes, mais elles ont marqué le monde et notre monde militaire. Dans ce contexte d’obscurité, de peur, de mort … d’impossibilité pour beaucoup de personnes de s’approcher du banquet eucharistique, nous prêtres avons continué à célébrer la messe pour le peuple, à redécouvrir la force de la prière et de la Parole de Dieu, lumière et nourriture pour ceux qui ont connu la maladie et la mort, ainsi que pour les militaires qui ont affronté et soutenu tant de situations d’urgence. Les situations d’urgences sont désormais présentes sous d’autres formes, comme les catastrophes naturelles ou le sauvetage des migrants en mer: et quel soutien est nécessaire lorsque de telles opérations échouent, entraînant de nouveaux décès!

Mais la Parole de Dieu promet «l’huile de joie au lieu du deuil». 

Je l’ai vu, ému, dans les funérailles de jeunes militaires en service célébrées au cours de ces années; je me souviens des larmes de mères, pères, épouses, enfants, frères, collègues … le «pourquoi», qui vient de leur coeur et de notre coeur de prêtre, qu’ils ne peuvent souvent que partager. N’oubliez pas: leurs familles, les nombreuses familles des militaires touchés par la douleur, continuent d’avoir besoin de votre coeur; de ce coeur sacerdotal, canal de ce que le Pape, dans sa dernière encyclique, appelle «l’amour humain et divin du Coeur de Jésus», seule vraie espérance pour un «monde sans coeur».    

Voilà ce que nous sommes, prêtres: des «coeurs» qui portent Son coeur et annoncent sa Parole! Une Parole qui nous est «donnée», comme il a été «donné» à Jésus «le rouleau du prophète Isaïe». Une Parole qui se donne à nous, pour être «accomplie» dans l’«aujourd’hui»: «Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Ecriture que vous venez d’entendre».

Nous regardons le passé, oui, mais dans la lumière de l’«aujourd’hui». 

Et la grâce est l’épiphanie de l’«accomplissement» qui peut arriver toujours et seulement dans l’«aujourd’hui».

Ainsi, très chers amis, je rends grâce pour tout ce qui a été accompli et continue d’être accompli de la Parole de Dieu dans l’«aujourd’hui» de votre vie et de votre sacerdoce. Un ministére qui n’est pas toujours accueilli et compris, souvent «réduit» à des perspectives qui n’appartiennent pas aux aumôniers militaires, ou regardé avec perplexité, presque comme l’homélie de Jésus dans la synagogue de Nazareth. Et pourtant, comme pour Lui, un ministère sur lequel sont «fixés» les yeux des gens, mendiants d’espérance.

Oui, l’espérance est cherchée des «yeux»! Des yeux qui ne parviennent pas à la voir dans les horizons étroits du monde. Elle est scrutée dans nos vies appelées à être sacrement et transparence du Christ, espérance qui  «ne déçoit pas»; vies appelées à être saintes!  Ce que les yeux des gens cherchent en nous: la sainteté. Une sainteté possible, dans nos faiblesses. Et seule la sainteté, si nous y réfléchissons bien, est une véritable annonce de joie. 

Parmi les plus grandes joies de ces années, le Seigneur nous a donné précisément deux dons de sainteté: la canonisation de Jean XXIII et sa proclamation comme patron de l’armée italienne, signe de la prédilection de notre Eglise par un saint si proche de tous les militaires, du peuple; le récent décret de vénérabilité de Salvo d’Acquisto, jeune carabinier, icône de ce don de vie qui anime tant de nos militaires.

Malheur si vous ne le remarquez pas! Il y a une sainteté extraordinaire dans l’histoire de l’Eglise parmi les militaires, surtout dans les aumôniers militaires! Il y a tant de sainteté en vous! Essayez d’y croire, de la cultiver, de toujours grandir en elle.

C’est le cadeau que j’apporte avec moi et le don que j’implore pour vous. C’est ma prière pour vous et je vous demande, de tout mon coeur, que ce soit votre prière pour moi.

Et la prière nous a beaucoup unis ces dernières années, fortement soutenue par l’adoration perpétuelle dans les églises de Sainte Catherine et du Saint Suaire à Rome et particulièrement dédiée à la paix. Merci aux soeurs qui l’ont fidèlement animée et  merci à toutes les personnes consacrées de notre Eglise, aux différentes associations qui en font partie, avant tout la Croix-Rouge et le PASFA; merci aux collaborateurs infatigables de l’Ordinariat Militaire, à tous les militaires, des plus hautes autorités aux plus jeunes élèves; merci à ceux qui sont présents à cette Eucharistie. A tous j’ai voulu exprimer ma proximité en envoyant un message de salut et je continuerai à le faire, toujours, avec ma prière.

Chers confrères,

«L’amour du Seigneur, sans fin je le chante»!

La gratitude pour le chemin accompli se fait prière, se fait chant. «Chante et marche», exhorte saint Augustin dans un discours sur la Pâque et presque en anticipant l’«Alleluia» qui résume et exprime ce qui habite mon coeur. Notre chemin se poursuit maintenant sur des routes différentes mais il continuera avec le même amour du Seigneur, la même prière, le même chant de louange et de gratitude: «Nous chantons comme des voyageurs. Chante, mais marche […] Si tu progresses c’est un signe que tu marches, mais tu dois marcher dans le bien, tu dois avancer dans la foi droite, tu dois progresser dans la sainteté. Chante et marche!». Merci à tous et bon chemin vers le Christ (cf. Ap 1,5-8): «à Lui la gloire et la souveraineté pour les siècles des siècles. Amen»! 

✠ Santo Marcianò

Archevêque ordinaire militaire pour l’Italie

 

Traduction de l’italien réalisée par ZENIT

Share this Entry

Rédaction

FAIRE UN DON

Si cet article vous a plu, vous pouvez soutenir ZENIT grâce à un don ponctuel