COP25Madrid, wikimedia commons @ Pool Moncloa

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COP25 : "Y a-t-il une volonté politique" pour agir?, s’interroge le pape François

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Message pour Madrid 2019

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« Les engagements actuels des États pour atténuer et adapter au changement climatique sont loin de ceux qui sont effectivement nécessaires pour atteindre les objectifs fixés dans l’Accord de Paris », fait observer le pape François dans un Message adressé à Madame Carolina Schmidt, ministre de l’Environnement du Chili et présidente de la Cop25, ainsi qu’aux participants à la Conférence sur le Climat des Nations Unies, qui se tient à Madrid du 2 au 13 décembre 2019.

Le Message, daté du 1er décembre 2019, a été lu à l’ouverture des travaux par le cardinal secrétaire d’État Pietro Parolin.

Le pape invite à s’interroger « sérieusement » « s’il existe une volonté politique d’allouer avec honnêteté, responsabilité et courage davantage de ressources humaines, financières et technologiques pour atténuer les effets négatifs du changement climatique, ainsi que pour aider les populations les plus pauvres et les plus vulnérables qui en souffrent le plus ».

Si, selon certaines études, il est « encore possible de limiter le réchauffement climatique », le pape souligne la nécessité d’ « une volonté politique claire, clairvoyante et forte qui s’engage dans une nouvelle voie visant à recentrer les investissements financiers et économiques sur les domaines qui garantissent réellement les conditions d’une vie digne de l’humanité sur une planète “saine” pour aujourd’hui et demain ».

Voici notre traduction du message en anglais du pape François.

HG

Message du pape François

À Son Excellence, Mme Carolina Schmidt,
Ministre de l’Environnement du Chili,
Présidente de la COP25, à la vingt-cinquième session de la Conférence des États parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques

(Madrid, 2-13 décembre 2019)

Le 12 décembre 2015, la COP 21 a adopté l’Accord de Paris, dont la mise en œuvre « exigera de chacun un engagement concerté et un dévouement généreux » (1).

Son entrée en vigueur rapide, en moins d’un an, et les nombreuses réunions et débats visant à réfléchir sur l’un des principaux défis pour l’humanité (2), celui du changement climatique, et à identifier les meilleurs moyens de mettre en œuvre l’Accord de Paris, ont montré une conscience croissante de la part des différents acteurs de la communauté internationale de l’importance et de la nécessité « de travailler ensemble pour construire notre foyer commun » (3).

Malheureusement, après quatre ans, nous devons admettre que cette prise de conscience est encore assez faible, incapable de répondre de manière adéquate à ce fort sentiment de l’urgence d’une action rapide demandé comme le préconisent les données scientifiques à notre disposition, comme celles décrites dans les rapports spéciaux du Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat. (4) Ces études montrent que les engagements actuels des États pour atténuer et adapter au changement climatique sont loin de ceux qui sont effectivement nécessaires pour atteindre les objectifs fixés dans l’Accord de Paris.

Elles démontrent à quel point les mots sont éloignés des actions concrètes !

Actuellement, on s’accorde de plus en plus sur la nécessité de promouvoir les processus de transition ainsi que la transformation de notre modèle de développement, d’encourager la solidarité et de renforcer les liens solides entre la lutte contre le changement climatique et la pauvreté. Les nombreuses initiatives mises en œuvre ou en cours, non seulement par les gouvernements mais aussi par les communautés locales, le secteur privé, la société civile et les particuliers, en témoignent. Il reste cependant beaucoup d’inquiétude quant à la capacité de ces processus à respecter les délais exigés par la science, ainsi qu’à la répartition des coûts qu’ils exigent.

De ce point de vue, nous devons sérieusement nous demander s’il existe une volonté politique d’allouer avec honnêteté, responsabilité et courage davantage de ressources humaines, financières et technologiques pour atténuer les effets négatifs du changement climatique, ainsi que pour aider les populations les plus pauvres et les plus vulnérables qui en souffrent le plus (5).

De nombreuses études nous disent qu’il est encore possible de limiter le réchauffement climatique. Pour ce faire, nous avons besoin d’une volonté politique claire, clairvoyante et forte, qui s’engage dans une nouvelle voie visant à recentrer les investissements financiers et économiques sur les domaines qui garantissent réellement les conditions d’une vie digne de l’humanité sur une planète « saine » pour aujourd’hui et demain.

Tout cela nous appelle à réfléchir consciencieusement sur la signification de nos modèles de consommation et de production et sur les processus d’éducation et de sensibilisation pour les rendre conformes à la dignité humaine.

Nous sommes face à un « défi de civilisation » en faveur du bien commun et d’un changement de perspective qui place cette même dignité au centre de notre action, qui s’exprime clairement dans le « visage humain » des urgences climatiques. Il reste une fenêtre d’opportunité, mais nous ne devons pas la laisser se fermer. Nous devons profiter de cette occasion pour agir de manière responsable dans les domaines économique, technologique, social et éducatif, en sachant très bien à quel point nos actions sont interdépendantes.

Les jeunes d’aujourd’hui montrent une sensibilité accrue aux problèmes complexes qui découlent de cette « urgence ». Nous ne devons pas imposer aux générations futures le fardeau d’assumer les problèmes causés par les générations précédentes. Au lieu de cela, nous devrions leur donner l’occasion de se souvenir de notre génération comme de celle qui a renouvelé et mis en œuvre – avec une conscience honnête, responsable et courageuse – le besoin fondamental de collaborer afin de préserver et de cultiver notre maison commune. Puissions-nous offrir à la prochaine génération des raisons concrètes d’espérer et de travailler pour un avenir bon et digne ! J’espère que cet esprit animera les travaux de la COP25, pour lesquels je souhaite plein succès.

Recevez, Madame la Présidente, mes salutations les plus chaleureuses et les plus cordiales.

_____________________

  1. Paroles suite à l’Allocution de l’Angélus, 13 décembre 2015.
  2. Cf. Laudato si’, n. 25.
  3. Cf. Laudato si’, n. 13. Cf. Message à la COP 23, Marrakech, 10 novembre 2016.
  4. Cf. GIEC : Résumé à l’intention des décideurs du Rapport spécial sur les effets du réchauffement de la planète de 1,5 °C au-dessus des niveaux préindustriels et les voies d’émission de gaz à effet de serre mondiales connexes, dans le contexte du renforcement de la réponse mondiale à la menace du changement climatique, du développement durable et des efforts visant à éliminer la pauvreté, 6 octobre 2018. GIEC : Résumé à l’intention des décideurs du Rapport spécial sur le changement climatique, la désertification, la dégradation des terres, la gestion durable des terres, la sécurité alimentaire et les flux de gaz à effet de serre dans les écosystèmes terrestres, 7 août 2019 ; GIEC : Résumé à l’intention des décideurs du Rapport spécial sur l’océan et la cryosphère dans un climat en évolution, 24 septembre 2019.
  5. Cf. Pape François, Message vidéo au Sommet Action Climat, New York, 23 septembre 2019.

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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