ROME, vendredi 21 septembre 2012 (ZENIT.org) – « La mission ne saurait être portée que par quelques pionniers, si nécessaires soient-ils. Elle doit être le souci de toute la communauté chrétienne elle-même », a souligné le cardinal Jean-Pierre Ricard, archevêque de Bordeaux, ce vendredi matin, à Castelgandolfo, dans son allocution au pape Benoît XVI.
Allocution du card. Ricard :
Très Saint Père,
Les évêques des provinces de Rouen, de Rennes, de Tours, de Poitiers et de Bordeaux sont très heureux ce matin de vous rencontrer, de vous entendre et d’être ainsi par vous confirmés dans la foi (cf. Lc 22, 32).
La France est marquée, comme d’autres pays européens, par un processus déjà ancien de sécularisation, c’est-à-dire d’éloignement de la société vis-à-vis de l’Église, et plus largement vis-à-vis de la foi ou des références chrétiennes. Il en résulte un affaiblissement du tissu ecclésial et une perte de la culture chrétienne. Pourtant, nous rencontrons aujourd’hui dans l’Église toute une génération prête à relever le défi d’une nouvelle évangélisation. Beaucoup de choses se cherchent dans nos diocèses, des initiatives se prennent, des projets s’élaborent pour ouvrir des chemins nouveaux à l’Évangile et nous risquer à une première annonce de la foi. Nous souhaitons relayer auprès de nos contemporains cette invitation de Jésus à ceux qui allaient devenir ses disciples : « Venez et voyez ». Cette préoccupation missionnaire nous rendra particulièrement attentifs aux travaux du prochain synode romain qui va traiter justement de la nouvelle évangélisation.
Nous sommes convaincus que ce renouveau de l’évangélisation ne peut passer que par un renouveau de vitalité des communautés chrétiennes elles-mêmes. En effet, la mission ne saurait être portée que par quelques pionniers, si nécessaires soient-ils. Elle doit être le souci de toute la communauté chrétienne elle-même. Celle-ci doit brûler de ce feu dont Jésus nous dit dans l’Évangile qu’il désire qu’il « fût allumé » (Lc, 12, 49). Cela implique de notre part tout un travail de sensibilisation, de ressourcement et de formation. L’année de la foi, qui va s’ouvrir, le 11 octobre prochain, va être pour nous en ce domaine un appui précieux. Le 18 octobre, nous aurons en trois lieux, Paris, Lyon et Toulouse, une grande journée nationale sur le Catéchisme de l’Église catholique, paru il y a vingt ans. La célébration du 50e anniversaire de l’ouverture du concile Vatican II sera également pour nous l’occasion de redécouvrir la visée profondément évangélisatrice qui était celle du bienheureux pape Jean XXIII, quand il convoquait puis ensuite ouvrait le Concile. Ne souhaitait-il pas, en effet, offrir au monde dans toute sa force et sa vigueur une présentation renouvelée de la foi?
Nous sommes envoyés aux hommes et aux femmes de notre temps. Nous avons à aimer ce monde que Dieu confie à notre mission. Nous avons à lui annoncer l’Évangile. Comme le bon scribe dont parle l’Écriture, il nous faut tirer de notre trésor du neuf et du vieux. Nous devons également opérer un discernement pour voir dans les grands courants d’opinion qui marquent notre environnement ceux qui servent l’homme et ceux qui lui sont nocifs. Nous aurons ainsi, dans les semaines qui viennent, à rappeler le sens, qui nous paraît véritablement fondateur pour notre vie sociale, du mariage, de la famille et de la filiation.
Notre société est marquée économiquement et socialement par la crise, une crise que nous pressentons non pas passagère mais durable. Le taux du chômage en France et l’augmentation des situations de précarité nous préoccupent. Nous sentons qu’il nous faudra dans les années qui viennent être plus attentifs encore aux questions de justice sociale et à la redéfinition de nouveaux modes de vie. Il est important que nos communautés chrétiennes prennent bien à cœur ce souci des frères, et en particulier des frères les plus en difficulté. Cela fait partie intégrante de toute vie ecclésiale selon l’Évangile. L’initiative nationale Diaconia 2013, lancée il y a deux ans, aide actuellement efficacement nos diocèses à entrer dans cette sensibilisation et cette mobilisation.
Le champ de la mission est vaste. La moisson demande des ouvriers. Vous connaissez, Très Saint Père, la vive préoccupation qui est la nôtre d’appeler au ministère presbytéral, de veiller sur le ministère diaconal, de soutenir une pastorale des jeunes qui forment des hommes et des femmes qui n’ont pas peur de témoigner de leur foi et de prendre toute leur place dans la vie et la mission de l’Église. Nous sentons bien que l’urgence évangélisatrice aujourd’hui réside moins dans le quadrillage du terrain que dans la constitution de pôles missionnaires, source de rayonnement et d’initiatives apostoliques.
Voilà, Très Saint Père, trop brièvement évoqués, quelques traits de notre vie ecclésiale en France.
C’est avec nos Églises particulières que nous nous présentons devant vous et que nous sollicitons, ce matin, dans la confiance et la reconnaissance, votre bénédiction apostolique.
† Jean-Pierre cardinal RICARD,
Archevêque de Bordeaux