ROME, mardi 11 décembre 2012 (Zenit.org) – Marie enseigne à « écouter la voix de Dieu qui parle dans le silence » et à « accueillir sa grâce qui nous libère du péché et de tout égoïsme » , explique Benoît XVI.
Le pape a médité sur ce mystère de la vie de Marie à l’occasion de cet « acte de vénération de l’Immaculée », le 8 décembre, place d’Espagne, comme chaque année.
Allocution de Benoît XVI:
Chers frères et sœurs,
C’est toujours une joie particulière de se rassembler ici, Place d’Espagne, pour la fête de Marie, l’Immaculée. Le fait de nous retrouver tous ensemble – Romains, pèlerins et visiteurs – au pied de la statue de notre mère spirituelle, nous donne le sentiment d’être unis sous le signe de la foi. Je tiens à le souligner, en cette Année de la foi que vit toute l’Eglise. Je vous salue avec beaucoup d’affection et je voudrais partager simplement avec vous quelques réflexions inspirées de l’évangile de cette solennité, l’évangile de l’Annonciation.
Il est toujours surprenant, et cela nous fait réfléchir, de réaliser que ce moment décisif pour la destinée de l’humanité, le moment où Dieu se fait homme, est enveloppé d’un grand silence. La rencontre entre le messager divin et la Vierge immaculée passe totalement inaperçue : personne n’est au courant, personne n’en parle. Si cet événement se produisait à notre époque, il ne laisserait aucune trace ni dans les journaux, ni dans les revues, parce que c’est un mystère qui advient dans le silence. Ce qui est vraiment grand passe souvent inaperçu et le silence tranquille se révèle plus fécond que l’agitation frénétique qui caractérise nos villes, mais qui, toutes proportions gardées, existait déjà dans les villes importantes comme la Jérusalem d’alors. Cet activisme qui nous rend incapables de nous arrêter, de rester tranquilles, d’écouter le silence dans lequel le Seigneur fait entendre sa voix discrète. Le jour où elle reçut l’annonce de l’ange, Marie était toute entière recueillie et en même temps ouverte, à l’écoute de Dieu. Il n’y a en elle ni obstacle, ni écran, ni rien qui la sépare de Dieu. C’est en cela qu’elle est sans le péché originel : sa relation à Dieu est libre de toute faille, aussi minime soit-elle ; il n’y a pas de séparation, il n’y a nulle ombre d’égoïsme, mais une parfaite syntonie : son petit cœur humain est parfaitement « centré » dans le grand cœur de Dieu. Voilà, chers frères et sœurs, en venant ici près de ce monument en l’honneur de Marie, en plein cœur de Rome, il nous est rappelé avant tout qu’on ne peut reconnaître la voix de Dieu dans le vacarme et l’agitation ; on ne peut percevoir son dessein sur notre vie personnelle et sociale si l’on reste à la superficie des choses, mais il faut descendre à un niveau plus profond, là où les forces agissantes ne sont ni économiques ni politiques, mais morales et spirituelles. C’est là que Marie nous invite à descendre pour nous accorder à l’action de Dieu.
Il y a une seconde chose, encore plus importante, que l’Immaculée nous dit lorsque nous venons ici : le salut du monde n’est pas l’œuvre de l’homme – de la science, de la technique, de l’idéologie – mais il vient de la grâce. Que signifie ce mot ? La grâce est l’amour dans sa pureté et dans sa beauté, c’est Dieu lui-même tel qu’il s’est révélé dans l’histoire du salut accompli en Jésus-Christ, racontée dans la Bible. Marie est appelée « comblée de grâce » (Lc 1, 28) et cette identité de Marie nous rappelle le primat de Dieu dans notre vie et dans l’histoire du monde, nous rappelle que la puissance d’amour de Dieu est plus forte que le mal, qu’elle peut combler les vides que crée l’égoïsme dans l’histoire des personnes, des familles, des nations et du monde. Ces vides peuvent devenir un enfer, où la vie humaine est comme tirée vers le bas et vers le néant, où elle perd toute signification et toute lumière. En réalité, les faux remèdes que le monde propose pour remplir ces vides, et la drogue en est un exemple, creusent ce gouffre. Seul l’amour peut sauver de cette chute, mais pas n’importe quel amour : un amour qui a en lui-même la pureté de la grâce, de Dieu qui transforme et renouvelle, et qui introduit ainsi dans les poumons intoxiqués un nouvel oxygène, un air pur, une nouvelle énergie de vie. Marie nous dit que l’homme ne peut jamais tomber trop bas pour Dieu qui est descendu jusqu’aux enfers ; quel que soit l’éloignement de notre cœur, Dieu est toujours « plus grand que notre cœur » (1 Jn 3, 20). Le souffle délicat de la grâce peut chasser les nuages les plus noirs, peut rendre la vie belle et riche de signification même dans les situations les plus inhumaines.
Et de là découle la troisième chose que nous dit Marie, l’Immaculée : elle parle de la joie, de cette joie authentique qui se diffuse dans le cœur libéré du péché. Le péché apporte avec lui une tristesse négative, qui pousse à se renfermer sur soi. La grâce apporte la véritable joie, qui ne dépend pas des possessions matérielles mais qui est enracinée au plus intime, au plus profond de la personne, et que rien ni personne ne peut lui enlever.
Le christianisme est essentiellement un « évangile », une « joyeuse nouvelle », alors que certains pensent qu’il est un obstacle à la joie, parce qu’ils y voient un ensemble d’interdictions et de règles. En réalité, le christianisme est l’annonce de la victoire de la grâce sur le péché, de la vie sur la mort. Et s’il comporte des renoncements et une discipline de l’esprit, du cœur et du comportement, c’est précisément parce qu’il y a, en l’homme, la racine nocive de l’égoïsme, qui blesse soi-même et les autres.
Il faut donc apprendre à dire non à la voix de l’égoïsme et à dire oui à celle de l’amour authentique. La joie de Marie est pleine, parce qu’il n’y a pas l’ombre du péché dans son cœur. Cette joie coïncide avec la présence de Jésus dans sa vie : Jésus, qu’elle a conçu et porté dans son sein ; Jésus petit enfant, confié à ses soins maternels, puis adolescent, jeune homme et homme mûr ; Jésus aussi qu’elle a vu quitter la maison, qu’elle a suivi à distance, dans la foi, jusqu’à la mort et la résurrection ; Jésus est la joie de Marie, il est la joie de l’Eglise, de nous tous.
En ce temps d’Avent, que Marie, l’Immaculée, nous enseigne à écouter la voix de Dieu qui parle dans le silence, à accueillir sa grâce qui nous libère du péché et de tout égoïsme ; nous goûterons ainsi la vraie joie. Marie, comblée de grâce, prie pour nous !
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Traduction de Zenit, Hélène Ginabat