Veillée pour "essuyer les larmes, 5 mai 2016, capture

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"Le Seigneur nous console pour que nous consolions nos frères"

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Une oeuvre de miséricorde spirituelle (texte complet)

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“Le Seigneur nous console. Nous sommes tous appelés à consoler nos frères, en témoignant que seul Dieu peut éliminer les causes des drames, affirme le pape François dans un tweet posté sur son compte @Pontifex_fr,  jeudi 5 mai, fête de l’Ascension au Vatican (mais pas en Italie ni à Rome: la fête est reportée à dimanche prochain).
Et toujours jeudi 5 mai, à 18h, une veillée pour “essuyer les larmes” a eu lieu en la basilique Saint-Pierre de Rome, sous la présidence du pape François.
C’est un évènement jubilaire mettant en œuvre une des sept œuvres de « miséricorde spirituelle » : la consolation des affligés.
Dans son homélie, le pape a souligné la transformation qu’opère l’amour du Christ dans la vie des baptisés : « La force de l’amour transforme la souffrance dans la certitude de la victoire du Christ, et la nôtre avec lui, et dans l’espérance que nous serons un jour de nouveau ensemble et nous contemplerons pour toujours le visage de la Sainte Trinité, source éternelle de la vie et de l’amour. »
Il a invité à se confier à la prière de la Vierge Marie : « Près de toute croix il y a toujours la Mère de Jésus. De son manteau elle essuie nos larmes. De sa main elle nous fait relever et nous accompagne sur le chemin de l’espérance. »
Trois témoignages ont marqué la veillée: celui d’un couple dont le fils s’est suicidé, d’un journaliste pakistanais, réfugié politique, et de jumeaux, dont l’un a été sauvé de la dépression par la conversion de son frère.
Les témoignages ont alterné avec des lectures patristiques et ont été couronnés par la lecture des Béatitudes.

Après l’homélie, l’assemblée été invitée à écrire ses intentions de prières qui ont été recueillies et apportées au pied de l’autel au moment de la prière d’intercession pour le monde.

La célébration a eu lieu en présence du reliquaire des Larmes de la Vierge de Syracuse. Une représentation du cœur Immaculé de Marie, offerte en cadeau de mariage à un jeune couple, Angelo Iannuso et Antonina Giusto, et placé au-dessus de leur lit, a en effet versé des larmes « humaines » – l’examen scientifique l’a révélé -, les 29-30-31 août, et le 1er septembre 1953. Les larmes ont été recueilles sur du coton, en présence des autorités religieuses, policières, et scientifiques. Les Syracusains y ont vu un signe de la compassion de la Vierge Marie pour la douleur du monde, et spécialement de la jeune femme dont la première grossesse était alors difficile.
Le pape François a ensuite offert à des personnes éprouvées des « Agnus Dei » – « Agneau de Dieu », un « sacramental » pour soutenir la vie des baptisés: des médaillons de cire blanche, tirés du cierge pascal, frappés à l’image de l’Agneau pascal, et portant le logo du Jubilé de la Miséricorde. La dévotion à l’ « Agnus Dei », qui remonte au IXe s., est particulièrement maintenue dans la basilique romaine de Sainte-Agnès-hors-les-Murs.
Voici le texte officiel de l’homélie du pape François.
A.B.
Homélie du pape François
Frères et sœurs,
Après les témoignages émouvants que nous avons entendus, et à la lumière de la Parole du Seigneur qui éclaire notre condition de souffrance, invoquons avant tout la présence de l’Esprit Saint, pour qu’il vienne au milieu de nous. Que ce soit lui qui illumine notre esprit pour trouver les mots justes et capables de réconforter ; que ce soit lui qui ouvre notre cœur pour avoir la certitude de la présence de Dieu qui ne nous abandonne pas dans l’épreuve. Le Seigneur Jésus a promis à ses disciples qu’il ne les laisserait jamais seuls, qu’il leur serait proche dans toutes les situations de la vie en envoyant l’Esprit Consolateur (cf. Gn 14, 26), qu’il les aiderait, les soutiendrait et les réconforterait.
Dans les moments de tristesse, dans la souffrance de la maladie, dans l’angoisse de la persécution et dans la douleur du deuil, chacun cherche une parole de consolation. Nous sentons fortement le besoin que quelqu’un nous soit proche et éprouve de la compassion envers nous. Nous faisons l’expérience de ce que signifie être désorientés, confus, frappés au plus profond comme jamais nous l’aurions pensé. Nous regardons tout autour, incertains, pour voir si nous trouvons quelqu’un qui puisse réellement comprendre notre douleur. L’esprit est rempli de questions, mais les réponses n’arrivent pas. La raison toute seule n’est pas capable de faire la lumière au fond de soi, de saisir la douleur que nous éprouvons et de donner la réponse que nous attendons. Dans ces moments, nous avons davantage besoin des raisons du cœur, seules capables de nous faire comprendre le mystère qui entoure notre solitude.
Que de tristesse il nous arrive de découvrir sur tant de visages que nous rencontrons. Que de larmes versées à chaque instant dans le monde ; chacune différente de l’autre, et qui forment ensemble comme un océan de désolation qui demande pitié, compassion, consolation. Les plus amères sont celles provoquées par la méchanceté humaine : les larmes de celui qui s’est vu arraché violemment une personne chère ; les larmes des grands parents, des mamans et des papas, des enfants… Il y a des regards qui restent souvent fixés sur le couchant et qui ont du mal à voir l’aube d’un jour nouveau. Nous avons besoin de miséricorde, de la consolation qui vient du Seigneur. Nous en avons tous besoin ; c’est notre pauvreté mais aussi notre grandeur : invoquer la consolation de Dieu qui, avec sa tendresse, vient essuyer les larmes sur notre visage (cf. Is 25, 8 ; Ap 7, 17 ; 21, 4).
Dans cette douleur qui est nôtre, nous ne sommes pas seuls. Jésus aussi sait ce que signifie pleurer la perte d’une personne aimée. C’est une des pages les plus émouvantes de l’Evangile : quand Jésus voit pleurer Marie en raison de la mort de son frère Lazare, il ne parvient pas non plus à retenir ses larmes. Il a été saisi d’une profonde émotion et a fondu en larmes (cf. Gn 11, 33-35). L’évangéliste Jean a voulu par ce récit montrer la participation de Jésus à la douleur de ses amis, et le partage du découragement. Les larmes de Jésus ont déconcerté beaucoup de théologiens au cours des siècles, mais elles ont surtout lavé beaucoup d’âmes, elles ont adouci beaucoup de blessures. Jésus aussi a expérimenté dans sa personne la peur de la souffrance et de la mort, la déception et le découragement pour la trahison de Judas et de Pierre, la douleur pour la mort de son ami Lazare. Jésus « n’abandonne pas ceux qu’il aime » (Augustin In Joh 49,5). Si Dieu a pleuré, je peux moi aussi pleurer, sachant que je suis compris. Les pleurs de Jésus sont l’antidote contre l’indifférence envers la souffrance de mes frères. Ces pleurs m’enseignent à faire mienne la douleur des autres, à participer au malaise et à la souffrance de ceux qui vivent dans les situations les plus douloureuses. Ils me secouent pour me faire percevoir la tristesse et le désespoir de ceux qui se sont vus même soustraire le corps de leurs êtres chers, et qui n’ont même pas un lieu où trouver consolation. Les pleurs de Jésus ne peuvent pas rester sans réponse de la part de celui qui croit en lui. De la manière dont il console, nous sommes appelés, nous aussi, à consoler.
Au moment de la défaillance, de l’émotion, et des pleurs, la prière au Père jaillit dans le cœur de Jésus. La prière est le vrai remède à notre souffrance. Nous aussi, dans la prière, nous pouvons sentir la présence de Dieu près de nous. La tendresse de son regard nous console, la force de sa parole nous soutient, en nous insufflant l’espérance. Jésus a prié près de la tombe de Lazare en disant : « Père, je te rends grâce car tu m’as écouté. Je savais que tu m’écoutes toujours » (Jn 11, 41-42). Nous avons besoin de cette certitude : le Père nous écoute et vient à notre secours. L’amour de Dieu répandu dans nos cœurs permet de dire que lorsqu’on aime, rien ni personne ne pourra jamais nous arracher des personnes qu’on a aimées. L’Apôtre Paul le rappelle avec des paroles très consolantes : « Qui pourra nous séparer de l’amour du Christ ? La détresse ? L’angoisse ? La persécution ? La faim ? Le dénuement ? Le danger ? Le glaive ? […] Mais, en tout cela nous somme les grands vainqueurs grâce à celui qui nous a aimés. J’en ai la certitude : ni la mort ni la vie, ni les anges ni les Principautés célestes, ni le présent ni l’avenir, ni les hauteurs, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus Notre Seigneur » (Rm 8, 35.37-39).
La force de l’amour transforme la souffrance dans la certitude de la victoire du Christ, et la nôtre avec lui, et dans l’espérance que nous serons un jour de nouveau ensemble et nous contemplerons pour toujours le visage de la Sainte Trinité, source éternelle de la vie et de l’amour.
Près de toute croix il y a toujours la Mère de Jésus. De son manteau elle essuie nos larmes. De sa main elle nous fait relever et nous accompagne sur le chemin de l’espérance.
[Texte original: Français] © Librairie éditrice du Vatican

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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