Propos recueillis par Anne Kurian

ROME, vendredi 18 mai 2012 (ZENIT.org) – L’avenir du monde globalisé ne réside pas dans une « course en avant désordonnée sous la pression des lobbies », mais dans la « reconnaissance de l’ordre éthique inscrit dans les êtres humains, ordre qui n’est pas à inventer, mais à découvrir toujours plus profondément », souligne Mgr Minnerath.

Dans le cadre de la XVIIIe sessionplénière de l’Académie Pontificale des sciences sociales (27 avril - 3 mai 212), Mgr Roland Minnerath précise quelques réflexions de cette assemblée pour Zenit. Une réflexion qui prend toute son actualité, par exemple, avec la réunion du "G 8".

En un premier temps, rapporte l’archevêque, les participants ont examiné les « profondes transformations » apportées par les sciences biologiques, les neurosciences, les sciences génétiques. Ces mutations, fait-il observer, « modifient la vision de l’ordre créé ».

A ce propos, on note la « désintégration de la vision judéo-chrétienne de l’homme et du monde », la « montée de l’individualisme hédoniste, du positivisme juridique, du relativisme des valeurs » et « l’effondrement de l’idée de vérité objective dans le domaine éthique ».

Gouvernance mondiale

Les participants se sont penchés également sur la « promotion d’un ordre global », en tenant compte des difficultés actuelles induites par la crise, notamment en ce qui concerne l’économie, l’accès au travail, aux soins, la condamnation du travail des enfants.

Quel serait le contenu institutionnel d’une « gouvernance » mondiale ? Il faut avant tout, répond Mgr Minnerath, des « règles communes librement acceptées » et que ces règles soient associées à des « mécanismes de contrôle ». Mais il faut aussi, ajoute-t-il, « fixer les bonnes règles ».

Dans la société civile, estime l’archevêque « le rôle des religions revient au premier plan, du moins celles qui portent en elles le projet de travailler au bien commun des tous, croyants ou non ».

La foi chrétienne, rappelle-t-il à ce propos, promeut la distinction entre « foi et raison, Eglise et Etat, organisation du temporel selon l’ordre naturel et tension eschatologique vers l’achèvement espéré ».

Ainsi, pour l’Eglise, l’avenir du monde globalisé ne réside pas dans une « course en avant désordonnée sous la pression des lobbies », mais dans la « reconnaissance de l’ordre éthique inscrit dans les êtres humains, ordre qui n’est pas à inventer, mais à découvrir toujours plus profondément ».

En outre, la doctrine sociale de l’Eglise, poursuit Mgr Minnerath, en vertu du « principe de subsidiarité », demande « qu’à chaque niveau où s’articule le bien commun, corresponde une autorité légitime capable de gérer ce bien commun ».

L’Europe, constate-t-il, connaît des « convergences d’intensité variable » selon les sujets (monnaie, défense, etc) : elle a été construite « sur le principe de la réconciliation » et n’est pas « uniformisable », insiste-t-il.

Par conséquent, la gouvernance européenne doit être « basée sur la transparence et le contrôle des opérations et des procédures communément acceptées ». Par exemple, « à la monnaie unique doivent correspondre des règles fiscales communes ».

Les médias électroniques

Les participants ont recherché par ailleurs les « nouveaux agents et nouvelles idées forces » dans le monde globalisé, par aire géographique, en abordant notamment les phénomènes démographiques et migratoires, l’environnement, la corruption, les rapports science – foi et dialogue interreligieux.

Le travail de la session a souligné la « dérive des droits de l’homme » qui passent de « droits de protection par rapport à l’Etat » à « droits comme expressions des désirs de divers groupes ».

L’assemblé a en outre porté une « attention particulière » à « l’envahissement des médias électroniques », et aux « nouvelles formes de culture et de réseaux auxquels ils donnent lieu », souligne Mgr Minnerath, concluant que « les catholiques ne sont pas suffisamment présents sur ces réseaux ».

De nombreux experts étaient présents, parmi lesquels M. Hans Tietmeyer, ancien Président de la Bundesbank, M. Joseph Stiglitz, prix Nobel d’économie et M. Jimmy Wales, fondateur de Wikipédia.