ROME, Lundi 10 octobre 2011 (ZENIT.org) – Dans un monde de plus en plus envahi par le progrès technique et la virtualité, nombre sont ceux – particulièrement parmi les jeunes – qui remplissent chaque moment de « musique et d’images » par peur du « vide » et du silence qui pourrait s’instaurer. Face à ce constat, le pape a invité à redécouvrir le silence et la solitude.

C’est ce qu’il a affirmé dans l’homélie qu’il a prononcée, le 9 octobre, en présidant les vêpres avec les moines chartreux dans l’église de la chartreuse de Serra San Bruno, dernier rendez-vous de sa visite apostolique en Calabre, région du sud de l’Italie.

Dans son homélie, le pape a rappelé le cœur de la spiritualité des Chartreux, cet ordre contemplatif fondé par saint Bruno en 1084 où les moines vivent une vie de profonde solitude : « Abandonner les réalités fugaces et chercher à saisir l’éternel ».

« La chartreuse est une oasis spéciale, où le silence et la solitude sont protégés avec un soin particulier, selon la forme de vie initiée par saint Bruno et demeurée inchangée au cours des siècles », a expliqué le pape. « La visite du successeur de Pierre dans cette chartreuse historique entend non seulement vous confirmer, vous qui vivez ici, mais l’Ordre tout entier, dans sa mission, plus que jamais actuelle et significative dans le monde d’aujourd’hui ».

Loin de ce cadre contemplatif, « le progrès technique, particulièrement dans le domaine des transports et des communications, a rendu la vie de l’homme plus confortable mais aussi plus agitée, parfois convulsive », a expliqué Benoît XVI. « Les villes sont presque toujours bruyantes : il y a rarement de silence, parce qu’un bruit de fond demeure toujours, même la nuit dans certaines zones ».

« Ces dernières années, ensuite, le développement des médias a diffusé et amplifié un phénomène qui se profilait depuis les années 1960 : la virtualité qui risque de dominer sur la réalité », a-t-il observé. Ainsi, « de plus en plus, même sans s’en apercevoir, les personnes sont immergées dans une dimension virtuelle à cause de messages audiovisuels qui accompagnent leur vie du matin au soir ».

« Les plus jeunes, qui sont nés dans cette condition, semblent vouloir remplir de musique et d’images chaque moment vide, presque par peur de sentir, justement, ce vide. Il s’agit d’une tendance qui a toujours existé, spécialement parmi les jeunes et dans les contextes urbains les plus développés, mais aujourd’hui, cela a atteint un tel niveau que l’on peut parler de mutation anthropologique », a insisté le pape. « Certaines personnes ne sont plus capables de rester longuement en silence et dans la solitude ».

Comme les chartreux, « en se retirant dans le silence et dans la solitude, l’homme pour ainsi dire, 's’expose' au réel dans sa nudité, il s’expose à ce 'vide' apparent auquel je viens de faire allusion, pour expérimenter au contraire la Plénitude, la présence de Dieu, de la Réalité la plus réelle qu’il y ait et qui va au-delà de la dimension sensible », a expliqué Benoît XVI.

« Le moine, en quittant tout, 'risque' tout pour ainsi dire : il s’expose à la solitude et au silence, pour ne pas vivre d’autre chose que de l’essentiel, et en vivant de l’essentiel il trouve aussi une communion profonde avec ses frères, avec chaque homme ». « Cette vocation, comme chaque vocation, trouve sa réponse dans un chemin, dans la recherche de toute une vie ».

« Et c’est en cela que consiste la beauté de chaque vocation dans l’Eglise : donner du temps à Dieu d’œuvrer par son Esprit et à l’humanité de se former, de croître selon la mesure de la maturité du Christ, en cet état de vie particulier ». Parfois, a-t-il ajouté, « aux yeux du monde, il semble impossible de passer toute une vie dans un monastère, mais en réalité toute une vie est à peine suffisante pour entrer dans cette union avec Dieu, dans cette Réalité essentielle et profonde qu’est Jésus Christ ».

« Vous aussi, qui vivez dans un isolement volontaire – a conclu le pape – vous êtes en réalité dans le cœur de l’Eglise et vous faites courir dans ses veines le sang pur de la contemplation et de l’amour de Dieu ».