1er voyage de Jean-Paul II en Pologne : les souvenirs du card. Dziwisz (II)

ROME, Vendredi 12 juin 2009 (ZENIT.org) – Trente ans après la première visite de Jean-Paul II en Pologne, le cardinal Stanislas Dziwisz, archevêque de Cracovie et ancien secrétaire particulier du pape polonais, a accordé une longue interview à l’agence catholique polonaise Kai. Témoin le plus direct des préparatifs de cet événement, il fait ici part de ses souvenirs. L’Osservatore Romano a reproduit cette interview en italien dont nous retransmettons la traduction ci-dessous.

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Voici la deuxième partie de cet entretien. Pour la première partie, cf. Zenit du 11 juin.

Mais le Vatican n’était-il pas préoccupé par le fait que Jean-Paul II lui-même aille trop loin ?

Card. Dziwisz – Une déclaration aussi forte en faveur de ces droits a en effet effrayé certains, dont aussi des hommes d’Eglise.

Cela ne vous déçoit pas qu’aujourd’hui tout le monde parle du Mur de Berlin et non de Gniezno ou de Solidarnosc ?

Card. Dziwisz – Il faut parler de faits historiques. La chute du Mur était la conséquence du processus commencé en Pologne en 1979, et je répète : le démantèlement du rideau de fer commença le 3 juin 1979 à Gniezno.

A Cracovie, lors de son premier voyage, le pape se pencha à la fenêtre de l’archevêché pour parler avec les jeunes, un dialogue qui s’est ensuite répété à chacune de ses visites en Pologne. Ce fut quelque chose de programmé ?

Card. Dziwisz – Non, ce fut une initiative absolument spontanée. Des milliers de personnes attendaient sous la fenêtre et appelaient le pape. Il fallait en quelque sorte qu’il apparaisse. Le Saint Père prit la décision tout seul, contre l’avis d’une personne de son entourage qui le lui déconseilla pour des raisons de sécurité.

A votre avis, quel est le sens le plus profond de son premier pèlerinage en Pologne ?

Card. Dziwisz – Après cette visite, la Pologne n’a plus été la même. Les gens ont redressé la tête, ils n’avaient plus peur.

Solidarnosc naquit comme fruit naturel de cette libération ?

Card. Dziwisz – Jean-Paul II a libéré l’énergie intérieure du peuple. En ce sens, il a posé les bases pour la naissance de Solidarnosc l’année suivante.

A son retour au Vatican, Jean-Paul II fit-il quelques commentaires sur sa visite ?

Card. Dziwisz – Il ne dit rien parce qu’il n’avait plus de voix. A son retour, il était très fatigué, il dormit quatorze heures d’affilée.

Parlons de l’état de guerre, introduit par le général Jaruzelski en décembre 1981. Quelle fut la réaction du pape ?

Card. Dziwisz – Jean-Paul II montrait rarement sa préoccupation. Mais il haussa fort le ton, dans la basilique Saint-Pierre, en présence de la délégation polonaise guidée par le président Jablonski. Cela se passa en 1982 à l’occasion de la canonisation du père Kolbe. Le pape dit : « La nation ne mérite pas ce que vous lui avez fait ».

Jean-Paul II avait-il pris en considération la possibilité d’une invasion soviétique de la Pologne ?

Card. Dziwisz – Personne ne la prenait sérieusement en considération, étant donné que les Soviétiques étaient déjà engagés en Afghanistan. Nous savions que l’Union Soviétique ne pouvait pas se le permettre. A ce sujet, nous avions des nouvelles précises directement de la Maison Blanche, nous les avons reçues de Zbigniew Brzezinski (à l’époque conseiller pour la sécurité nationale, ndr) et par le président Reagan qui appela personnellement le pape.

Quelle était la relation de Jean-Paul II avec le général Jaruzelski ? Il continue à dire que l’état de guerre fut un moindre mal par rapport à l’invasion soviétique.

Card. Dziwisz – Le pape n’a jamais accueilli une telle interprétation. Il respectait l’intelligence et la culture de Jaruzelski mais il n’était d’accord avec lui sur rien. Le général regardait exclusivement vers l’Est. Contrairement à Edward Gierek qui, en saluant le pape à la fin de son voyage lui dit : « Ici, à Varsovie, des vents soufflent de l’Est et de l’Ouest. Saint Père, vous soutenez ceux de l’Ouest ».

Revenons à l’actualité. Pour quand pouvons-nous attendre la canonisation de Jean-Paul II ?

Card. Dziwisz – Cela dépend directement de Benoît XVI. Mais il me semble quand même que les choses se passent très bien. Le procès pour le miracle est déjà en route. Et la reconnaissance de l’héroïcité des vertus de Karol Wojtyla sera décisive. Nous espérons que le diable ne s’en mêlera pas.

Eminence, avez-vous déjà senti la présence du diable ?

Card. Dziwisz – Oui, je l’ai sentie. De la manière la plus forte qui soit quand le diable a été chassé d’une jeune femme. J’étais présent, je sais ce que cela veut dire. C’est terrible de ressentir la présence d’une force si grande et incontrôlable. J’ai vu comment il la maltraitait physiquement, j’ai entendu la voix avec laquelle elle criait. Cela arriva après une audience générale. Jean-Paul II récita les prières d’exorcisme, mais rien. Alors, il dit que le jour suivant, il célèbrerait la messe aux intentions de cette jeune femme. Et après la messe, de manière imprévue, elle se retrouva comme si elle était une autre personne, tout avait disparu. Au départ je n’y ai pas cru, je pensais qu’il s’agissait d’une maladie psychique. Au contraire, Satan existe.

Et comment reconnaît-on sa présence dans le monde ?

Card. Dziwisz – Satan existe, même si l’idéologie dominante estime que ce ne sont que des légendes. Aujourd’hui, le démon travaille pour que les hommes croient qu’il n’existe pas. C’est une méthode ô combien perfide.

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ZENIT Staff

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