ROME, Vendredi 27 février 2009 (ZENIT.org) – Au Sri Lanka, devant l’opposition des chrétiens, le Parlement ajourne le projet de loi anti-conversion, souligne « Eglises d’Asie » (EDA), l’agence des Missions étrangères de Paris (MEP).
Une commission parlementaire comprenant des députés chrétiens et des chefs de partis politiques, chargée d’examiner le 18 février dernier, le très controversé projet de loi anti-conversion, a conclu que sa promulgation pourrait avoir de graves conséquences, déclencher un conflit interreligieux et constituer une violation de la constitution du pays.
« Nous devons à tout prix éviter un conflit entre les bouddhistes et les chrétiens », a déclaré le 26 février à l’agence Ucanews, Joseph Michael Perera, député catholique et chef de l’opposition au Parlement [La chambre des députés du Sri Lanka compte environ 10 chrétiens sur les 225 parlementaires qui la constituent ](1).
De son côté, le ministre des Affaires religieuses, Pandu Bandaranayake, a confirmé que les chrétiens avaient demandé la clarification de certains termes du projet de loi et proposé des amendements à celui-ci. « Il sera donc réexaminé par un comité religieux consultatif, dépendant du Ministère des Affaires religieuses », a déclaré le ministre.
Ce n’est pas l’avis du vénérable Athureliya Rathana Thero, chef de file du parti bouddhiste extrêmiste Jathika Hela Urumaya (JHU, Héritage national cinghalais) au Parlement, qui assure que le projet de loi ne peut être soumis à l’approbation d’un tel comité. Le JHU est à l’origine du projet et le présente régulièrement au vote des parlementaires depuis 2004, malgré le jugement de la Cour d’Appel du Sri Lanka qui l’avait déclaré incompatible avec la constitution nationale laquelle reconnait la liberté religieuse.
Mgr Norbert Andradi, évêque d’Anuradhapura et Secrétaire général de la Conférence des évêques catholiques du Sri Lanka, avait particulièrement souligné les problèmes d’interprétation de certains termes du projet, risquant de faire passer tout acte de charité pour du prosélytisme. Avec l’ensemble des évêques du Sri Lanka, il avait lancé de nombreuses manifestations et réunions de réflexion, rassemblant les chrétiens des différentes Eglises qui tous, dénonçaient le caractère potentiellement liberticide de la loi anti-conversion (2).
Cependant, le projet de loi, remanié par le JHU, semblait en bonne voie d’être accepté par le Parlement, après avoir reçu l’approbation d’une Commission d’étude. Le Jathika Hela Urumaya, parti dirigé uniquement par des moines bouddhistes et prônant une idéologie nationaliste, tient en effet une place importante au sein de la coalition gouvernementale, et rencontre l’approbation d’une grande partie des Cinghalais.
Commentant la nouvelle de cet ajournement, Joseph Perera a fait remarquer qu’« il ne s’agissait peut-être que d’une accalmie provisoire », se remémorant probablement les multiples tentatives passées du JHU en vue de faire adopter la loi anti-conversion.
Alors que les tensions religieuses ont été réactivées par le projet de loi, le drame humanitaire de la guerre civile continue de se jouer dans le nord-est du pays où les civils sont toujours piégés dans la zone des combats entre l’armée sri-lankaise – que soutient le JHU – et les Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE). Le 24 février dernier, les forces gouvernementales ont franchi une étape décisive en s’emparant de Puthukudiyiruppu et de ses quelques villages environnants. (3)
(1) Les bouddhistes constituent la majorité religieuse du Sri Lanka, avec 69 % de croyants. Les chrétiens, essentiellement des catholiques, ne représentent que 8 % de la population.
(2) voir EDA 501. A propos du projet de loi anti-conversion et de l’opposition des chrétiens à celui-ci, voir également EDA 308, 392, 393, et 395.
(3) IANS, dépêche du 24 février 2009