ROME, Mercredi 4 février 2009 (ZENIT.org) – Les évêques italiens invoquent amour et assistance et non la suspension de l’alimentation et de l’hydratation pour Eluana Englaro, la jeune italienne plongée dans le coma depuis 16 ans et qu’une sentence de la Cour de Cassation de Milan a condamnée à mourir de faim et de soif.
Après l’annonce du transfert d’Eluana de sa maison de repos, à Lecco, où les sœurs Miséricordieuses l’assistaient depuis 14 ans, à une autre maison à Udine où lui sera débranchée la petite sonde qui l’alimente et l’hydrate, les évêques dénoncent le faux sentiment de pitié qui accompagne ce geste.
« Au lieu d’alimenter et d’hydrater Eluana, on utilise des médicaments pour lui faire accepter les souffrances et la mort », a réagi Mgr Mariano Crocieta, Secrétaire général de la conférence épiscopale italienne (CEI), durant la conférence de presse, organisée mardi à Radio Vatican, à la fin des travaux du Conseil Episcopal Permanent.
Si pour Mgr Mariano Crociata, « les propos les plus éloquents ont été et restent, de la part de l’Eglise, le service silencieux des religieuses qui, jusqu’à lundi, se sont occupées d’Eluana », il a néanmoins mis le doigt sur « une contradiction énorme et inconcevable ».
« D’un côté, a-t-il expliqué, on retire au malade l’eau et la nourriture, de l’autre on recourt à des sédatifs et médicaments pour faire supporter les effets qu’entraîne la suspension d’un soutien vital comme l’eau et la nourriture ».
D’un point de vue humain, Mgr Crociata a tenu à réaffirmer sa « totale proximité et compréhension » envers la famille et la jeune fille. « Une compassion respectueuse, a-t-il dit, car je suis convaincu que lorsque nous nous trouvons face au mystère de la souffrance et de la mort il vaut mieux se taire, et pour ceux qui croient, prier ».
Sur le transfert proprement dit d’Eluana, Mgr Crociata a souligné le risque de « confusion » à assimiler ce geste à un geste de pitié.
« Certains, a-t-il expliqué, voudraient faire passer pour un geste de pitié le fait de débrancher la petite sonde. Or, ce qui provoque des souffrances, ce que comporte la privation de nourriture et d’eau, ne peut être un geste de pitié ».
« La vraie pitié, a souligné Mgr Crociata, est celle que les sœurs ont manifestée au chevet d’Eluana en l’assistant » ; c’est « accompagner la souffrance » ; c’est « être capable d’intégrer la souffrance et la mort dans notre vie et donc dans notre culture également ».
Une question qui renvoie au thème de la fin de vie en générale qui, comme le lui faisait remarquer une personne, a raconté le secrétaire de la CEI durant la conférence, « semblerait être un problème pour ceux qui se portent bien, car tous ceux qui vont mal sont en demande d’aide et de soutien : ils demandent d’être accompagnés ».
Ainsi, a-t-il conclu « le problème devient celui de notre capacité sociale, administrative et économique à rendre possible, pour les familles et les structures sanitaires, cet accompagnement auprès de ceux qui sont en souffrance, de donner la possibilité d’arriver au terme naturel de sa vie sans acharnement thérapeutique ni abandon thérapeutique ».
« Il n’est pas seulement question d’alliance entre le médecin et le patient, a-t-il poursuivi, mais du comportement même de toute la société autour du plus faible ».
Pour Mgr Crociata le degré de civilisation d’une communauté se mesure à « sa capacité de sauvegarder, accompagner, protéger, prendre soin des personnes plus faibles, de celles qui n’ont ni la force ni l’énergie pour aller de l’avant toute seule, au début, à la fin et durant sa vie ».
A la fin de la conférence de presse, Mgr Crociata est revenu sur le transfert d’Eluana Englaro, déclarant que la CEI, à ce sujet, faisait sienne la déclaration rendue publique la veille par Mgr Pietro Brollo, archevêque d’Udine.
« J’en appelle à toutes les consciences, avait déclaré Mgr Brollo, afin que tous ceux qui ont bien clair à l’esprit de se trouver au chevet d’une personne vivante, n’hésitent pas à vouloir, à exiger sa protection, et que tous ceux qui doutent encore aient la sagesse et la prudence de s’abstenir de toute décision irréparable ».
« Il est évident pour tout le monde, a souligné Mgr Crociata, que toute action visant à interrompre l’alimentation et l’hydratation prendrait l’aspect, au-delà des intentions, d’un acte d’euthanasie ».
« Pour notre part, a-t-il conclu, osons encore espérer en la force de la prière qui triomphe sur toutes les résistances les plus cachées et soyons proches de la famille si durement éprouvée et proches des sœurs qui ont assisté avec tant d’amour Eluana Englaro jusqu’à hier ».
A la nouvelle du transfert d’Eluana Englaro et du débranchement imminent de son alimentation et hydratation, un grand nombre d’organismes et mouvements italiens sont eux aussi montés au créneau, notamment : le Forum des Associations Familiales, le Mouvement pour la Vie, l’association Sciences et Vie, le Conseil provincial d’Udine du Mouvement chrétien des travailleurs, et l’Association « Communauté Pape Jean XXIII », et l’Association des Médecins catholiques d’Italie.
L’Association « Communauté Pape Jean XXIII » a annoncé l’organisation ce mercredi d’un pèlerinage devant la clinique « La Quiete » d’Udine « pour montrer jusqu’au bout, en étant physiquement présent, le droit d’Eluana à vivre ».
Le responsable de l’Association, a demandé que tous « prient pour éclairer les consciences de ceux qui veulent éteindre la vie d’Eluana » et invite à utiliser « tous les moyens de communication, aujourd’hui techniquement possibles, pour exprimer son profond désaccord devant un tel geste ».
Antonio Gaspari
Rédaction française : Isabelle Cousturié