Belgique : Le pape recommande de diffuser la Bible dans les familles

Visite ad limina des évêques

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CITE DU VATICAN, Dimanche 23 novembre 2003 (ZENIT.org) – Jean-Paul II recommande aux évêques de Belgique, « en union avec les curés des paroisses et les services de catéchèse et de formation permanente, à diffuser la Bible dans les familles ».

Voici le texte intégral et original en français du discours de Jean-Paul II aux évêques de Belgique en visite ad limina. Il est publié par le bulletin de la salle de presse du Saint-Siège.

Monsieur le Cardinal,

Chers Frères dans l’épiscopat,

1. Je suis heureux de vous accueillir tous, à l’occasion de votre visite ad limina sur les tombes des Apôtres Pierre et Paul. Je salue spécialement les plus jeunes d’entre vous, qui participent pour la première fois à cette rencontre, et je remercie Monsieur le Cardinal Godfried Danneels, Président de votre Conférence épiscopale, pour les paroles aimables qu’il vient de m’adresser. Je souhaite que cette visite, qui est un temps fort de contacts et d’échanges avec les dicastères du Saint-Siège, pour un meilleur service de l’évangélisation, mais aussi un moment privilégié de célébration de l’affectus collegialis qui nous unit, soit pour chacun d’entre vous une étape significative et un encouragement dans votre difficile mais exaltante mission de pasteurs du Peuple de Dieu.

2. Les informations qui me parviennent concernant la situation de votre Église sont pour moi particulièrement préoccupantes. En effet, on ne peut cacher une réelle et sérieuse inquiétude devant la baisse régulière et importante de la pratique religieuse dans votre pays, qui affecte les célébrations dominicales mais aussi de nombreux sacrements, en particulier le Baptême, la Réconciliation et surtout le mariage. De même, la diminution importante du nombre des prêtres et la crise persistante des vocations sont un sujet de graves préoccupations pour vous. Vous notez toutefois la qualité de la collaboration pastorale que vous vivez avec les prêtres, dans vos conseils presbytéraux, ainsi qu’avec les représentants du peuple de Dieu, dans les conseils pastoraux diocésains. La participation toujours plus active des fidèles laïcs à la mission de l’Église, notamment dans les paroisses, constitue également un motif de satisfaction. Cette participation doit se développer selon l’esprit de coresponsabilité voulu par le Concile Vatican II et selon les indications pastorales contenues dans l’Instruction interdicastérielle sur quelques questions concernant la collaboration des Fidèles laïcs au ministère des prêtres, qui rappelle la différence essentielle entre le sacerdoce commun et le sacerdoce ministériel et le caractère irremplaçable du ministère ordonné. De ce fait, pour éviter les éventuelles confusions, il est nécessaire que soient clairement exprimés les principes doctrinaux en cette matière. Cela aidera les fidèles à saisir plus nettement le sens du ministère sacerdotal, pour le service du peuple de Dieu. Il est clair que des jeunes ne seront pas à même de s’engager dans le ministère s’ils ne perçoivent pas la place qui leur est donnée dans la communauté chrétienne et si les fidèles mettent en cause la valeur de leur engagement. Il vous appartient donc en ce domaine d’éduquer l’ensemble de vos diocésains sur le sens et la valeur du ministère ordonné.

3. Le changement rapide que vous constatez correspond certes à une évolution sensible de la société, marquée par une sécularisation de grande ampleur, qui pourrait faire penser parfois que la société belge se plaît à tourner le dos aux racines chrétiennes qui pourtant la font vivre en profondeur. Ainsi votre pays s’est doté récemment d’une législation nouvelle et inquiétante dans des domaines qui touchent des dimensions fondamentales de la vie humaine et sociale, comme la naissance, le mariage et la famille, la maladie et la mort. Vous n’avez pas manqué d’intervenir sur ces questions. Il est important que les pasteurs fassent toujours entendre leur voix pour réaffirmer la vision chrétienne de l’existence et, dans cette circonstance, pour marquer leur désapprobation, car ces changements au niveau de la loi ne sont pas seulement le signe d’adaptations ou d’évolutions devant des mentalités ou des comportements nouveaux, mais ils affectent profondément la dimension éthique de la vie humaine et ils remettent en cause le rapport à la loi naturelle, la conception des droits humains et, plus profondément encore, la conception de l’homme et de sa nature.

4. C’est donc sur un terrain pastoral nouveau, changeant et difficile, que vous vivez votre mission de pasteurs de l’Église du Christ. Comme je l’ai écrit tout dernièrement aux évêques du monde entier, «si le devoir d’annoncer l’Évangile est le propre de toute l’Église et de chacun de ses fils, il l’est à un titre spécial des Évêques, qui, le jour de leur ordination qui les inscrit dans la succession apostolique, assument comme engagement principal celui de prêcher l’Évangile, ‘appelant les hommes à la foi dans la force de l’Esprit ou les confirmant dans la foi vivante’» (Pastores gregis, n. 26). Notre responsabilité d’évêques est donc de faire entendre avec force et clarté l’annonce du salut de Dieu offert à tout homme dans le mystère de l’amour rédempteur du Christ, salut accompli une fois pour toutes sur le bois de la Croix, ainsi que d’inviter les fidèles à mener une vie conforme à la foi qu’ils professent. Dans une société qui perd ses repères traditionnels et qui favorise volontiers un relativisme généralisé au nom du pluralisme, notre premier devoir est de faire connaître le Christ, son Évangile de paix et la lumière nouvelle qu’il apporte sur la destinée de l’homme.

En agissant ainsi, l’Église «n’est poussée par aucune ambition terrestre : elle ne vise qu’un seul but, qui est de continuer, sous la conduite de l’Esprit Paraclet, l’œuvre du Christ lui-même, venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité, pour sauver, non pour condamner, pour servir, non pour être servi» (Gaudium et spes, n. 3). Je vous invite donc à poursuivre activement le dialogue avec la société civile et avec l’ensemble du peuple de Belgique, en ayant le souci de faire connaître explicitement les valeurs de la foi chrétienne et sa riche expérience de l’homme à travers l’histoire et les cultures, non pas pour imposer son propre modèle, mais par respect pour la vérité dont vous êtes les ministres au nom du Christ et par respect pour le dialogue lui-même, qui exige que soit prise en compte l’identité propre et légitime de chacun. C’est à ces conditions que l’Église trouvera sa juste place dans la société belge, en annonçant l’Évangile avec clarté et en travaillant à son inculturation progressive dans la culture d’aujourd’hui.

5. Pour permettre aux fidèles de bien se situer dans cette perspective réellement missionnaire, je vous encourage à développer toujours davantage la formation théologique, spirituelle et morale du plus grand nombre : ainsi les fidèles laïcs seront mieux soutenus dans leur propre vie chrétienne et ils seront davantage prêts à rendre compte de l’espérance qui est en eux (cf. 1P 3, 15), grâce à une meilleure connaissance de la Parole de Dieu et du mystère de la foi, servie par un exposé organique et cohérent de son contenu, notamment à partir du Catéchisme de l’Église catholique. Veillez aussi à soutenir les Universités et les Instituts qui offrent des formations de plus haut niveau, davantage spécialisées mais indispensables, pour qu’ils s’efforcent toujours plus de témoigner, de manière cohérente, de la vigueur de la pensée chrétienne, rendant en cela un service important, notamment pour la formation sacerdotale !

Soyez vigilants, afin d’entretenir les rapports institutionnels, mais aussi d’estime et de confiance qui vous lien
t à ces établissements ainsi qu’aux personnes qui y travaillent, notamment les théologiens, de manière à ce que l’unité catholique soit toujours manifeste, dans le respect nécessaire des compétences et des responsabilités de chacun (cf. Pastores gregis, n. 29) ! L’Université catholique, en effet, «doit exercer sa mission avec le souci de maintenir son identité chrétienne(…). Tout en ayant son autonomie scientifique, elle a la charge de vivre l’enseignement du Magistère dans les différents domaines de la recherche dans lesquels elle est impliquée» (Discours au Congrès organisé par la Congrégation pour l’Éducation catholique et la Fédération internationale des Universités catholiques, n. 6). Il revient aux Autorités universitaires et aux pasteurs que vous êtes d’y veiller.

Je vous invite encore, en union avec les curés des paroisses et les services de catéchèse et de formation permanente, à diffuser la Bible dans les familles, afin que «l’écoute de la Parole devienne une rencontre vitale, selon l’antique et toujours actuelle tradition de la lectio divina permettant de puiser dans le texte biblique la parole vivante qui interpelle, qui oriente, qui façonne l’existence» (Novo millennio ineunte, n. 39). D’une manière toute spéciale, je souhaite que les fidèles approfondissent toujours plus l’importance de l’Eucharistie dans leur vie personnelle et communautaire. Qu’ils sachent aussi donner du temps à la prière dans leur vie de chaque jour, pour puiser à la vraie source, selon un principe essentiel de la conception chrétienne de la vie : le primat de la grâce (cf. idem, n. 38) !

6. Un effort particulier s’impose pour rendre toujours plus solide la formation humaine, morale, théologique et spirituelle des futurs prêtres, qui auront la responsabilité de conduire les communautés chrétiennes de demain et de veiller à la qualité de leur témoignage dans la société où elles vivront, ainsi que de manifester l’unité du presbyterium autour de l’Évêque. L’exigence en cette matière ne saurait se satisfaire d’une formation reçue seulement de l’extérieur; devenir un pasteur selon le cœur du Christ demande une véritable conversion de l’être; cela s’acquiert à travers toutes les dimensions de la formation sacerdotale, dans le creuset de la vie commune comme aussi dans l’approfondissement de la vie spirituelle. On souhaite en particulier que les jeunes, et plus largement l’ensemble du peuple chrétien, puissent connaître sans équivoque les exigences objectives de l’appel au ministère presbytéral, notamment en ce qui concerne le célibat pour les ordres sacrés, qui, selon la tradition qui nous vient du Seigneur, sont réservés aux hommes. Ce que j’ai dit à toute l’Église au début du nouveau millénaire, «Duc in altum, avance au large !» (Novo millennio ineunte, n. 1), je le redis particulièrement à vos communautés : avancez au large, puisez en profondeur, en redonnant à la vie chrétienne toute sa densité spirituelle !

Le renouveau attendu de la vie chrétienne et des vocations au ministère ordonné, ainsi qu’à la vie consacrée, ne peut pas venir seulement de réformes ou de réorganisations extérieures cependant utiles, mais d’abord et surtout d’un renouvellement intérieur de la vie de foi des pasteurs et des fidèles. Il importe également de retrouver la dimension sacramentelle de l’Église et la vérité de son mystère, comme Épouse mystique du Fils de Dieu (cf. Ep 5, 31-32), lui qui est le Rédempteur de l’homme. C’est à cette profondeur aussi que le ministère ordonné trouve sa vraie signification : il ne s’agit pas seulement, à travers les activités variées et multiples du ministère, d’être l’animateur ou le coordinateur de la communauté, mais il s’agit bien plus de représenter sacramentellement, dans la communauté et pour elle, le Christ Serviteur, Tête de l’Église qui est son Corps. Comment ce don du Seigneur à l’Église pourrait-il lui manquer ? Je vous exhorte, chers Frères, à soutenir et à encourager de toutes vos forces de pasteurs une pastorale des vocations qui interpelle les communautés et les jeunes, pour que tous aient le souci de transmettre l’appel de Dieu et de préparer l’avenir de vos diocèses.

7. L’Église qui est en Belgique a toujours été attentive à l’éducation de la jeunesse, mobilisant à cette fin beaucoup de ses forces vives, notamment les religieux et les religieuses, et les écoles catholiques, très nombreuses dans votre pays, accueillent aujourd’hui un grand nombre d’élèves.

Je vous félicite à cet égard d’avoir clairement réaffirmé les principes de l’enseignement catholique et votre attachement à son identité. Je demande aux responsables, aux enseignants et aux parents d’élèves, d’approfondir les richesses de cette identité catholique, pour donner aux jeunes générations le meilleur de la tradition éducative de l’Église, le sens de Dieu et le sens de l’homme, ainsi que les principes moraux indispensables, afin de leur permettre d’avancer avec sérénité et responsabilité sur les chemins de la vie. Alors, parmi les jeunes de Belgique, pourront se lever ceux qui choisiront de vivre l’Évangile en s’engageant dans les réalités temporelles et dans le Sacrement du mariage, et ceux qui choisiront de suivre le Christ d’une manière plus radicale, sur la voie des conseils évangéliques, en ajoutant ainsi de nouveaux fruits à la moisson déjà abondante de la vie consacrée en Belgique. C’est parmi ces jeunes, ouverts à la générosité du Christ et à l’universalité de son amour, que pourront naître également des vocations de prêtres diocésains et de prêtres missionnaires pour le monde.

8. Alors même que vous avez souligné dans vos rapports les difficultés de la vie chrétienne dans une société qui semble amnésique, vous avez aussi remarqué les signes du possible renouveau : la vigueur nouvelle des pèlerinages, l’attrait pour le silence des monastères, l’augmentation sensible du nombre des catéchumènes adultes, la participation active de nombreux laïcs à la vie des communautés paroissiales et le goût renouvelé chez beaucoup d’entre eux d’une vie spirituelle authentique. On peut dire alors avec le psalmiste : « Qui sème dans les larmes moissonne dans la joie : il s’en va, il s’en va en pleurant, il jette la semence; il s’en vient, il s’en vient dans la joie, il rapporte les gerbes» (Ps 125, 5-6).

L’espérance du croyant, ainsi exprimée au retour de l’Exil à Babylone, vient éclairer la vie des fidèles laïcs. Dans les débats importants qui animent la société belge d’aujourd’hui, un double témoignage leur est en effet demandé : celui de la parole prophétique, par des prises de position claires et conformes aux exigences de l’Évangile, telles que les rappelle à temps et à contretemps (cf. 2 Tm 4, 2) le Magistère de l’Église, mais aussi le témoignage des actes, celui d’hommes et de femmes engagés dans les joies et les difficultés de la vie quotidienne, à travers la vie de couple et la vie familiale, le travail et les responsabilités sociales ou politiques, attentifs à leurs frères et solidaires de leurs joies et de leurs espoirs (cf. Gaudium et spes, n. 1), désireux de leur témoigner l’amour sans réserve du Christ.

Ayez à cœur d’encourager et de soutenir tous ceux qui travaillent à promouvoir une pastorale familiale qui atteste de la grandeur du mariage chrétien et du bonheur d’accueillir des enfants, qui puisse aussi aider ceux qui ont été blessés dans leur projet de vie à trouver leur place dans la communauté ecclésiale ! La foi du psalmiste éclaire également le labeur quotidien des prêtres, donnés généreusement à leur mission pastorale, mais qui pourraient être tentés parfois par la lassitude ou le découragement devant les difficultés qu’ils rencontrent. Qu’ils sachent combien le Pape leur est proche, rendant grâce
pour la fécondité souvent cachée de leur ministère et priant pour qu’ils soient toujours plus attachés au Christ, leur Maître et Seigneur !

Ma reconnaissance va aussi aux diacres permanents : en communion avec les évêques et en collaboration avec les prêtres, ils annoncent, par leur vie donnée, l’amour fidèle et humble du Christ. C’est dans «l’espérance que s’accomplisse en nous le mystère de Pâques» (Missel romain, Préface des dimanches, n.6), puisée à la source du Sacrifice eucharistique, que vous-mêmes, Évêques de Belgique, recevez chaque jour des forces nouvelles pour encourager, soutenir, éclairer et guider ceux que le Seigneur vous a confiés, dans son Église. Soyez pour eux prophètes, témoins et serviteurs de l’espérance, «car l’espérance, spécialement en des temps d’incroyance et d’indifférence croissantes, est un véritable soutien pour la foi et un précieux stimulant pour la charité. Elle tire sa force de la certitude de la volonté salvifique universelle de Dieu (cf. 1 Tm 2, 3) et de la constante présence du Seigneur Jésus, l’Emmanuel qui demeure toujours avec nous jusqu’à la fin du monde (cf. Mt 28, 20)» (Pastores gregis, n.3).

Que la Vierge Marie, qui a porté en son sein l’espérance de tous les hommes, veille avec amour sur les besoins de l’Église en Belgique et qu’elle oriente vers son Fils, comme elle l’a fait aux noces de Cana, le cœur de tous les fidèles : «Faites tout ce qu’il vous dira» (Jn 2,5) !

À vous tous, j’accorde une affectueuse Bénédiction apostolique, que j’étends de grand cœur aux prêtres et aux diacres, aux religieux et aux religieuses, et à tous les fidèles laïcs de vos diocèses.

[01828-03.01] [Texte original: Français]

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ZENIT Staff

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