Inde : Pour « une paix durable et pour la justice »

Ad limina des évêques

Share this Entry

CITE DU VATICAN, Jeudi 25 septembre 2003 (ZENIT.org) – Le pape Jean-Paul II a reçu les évêques d’Inde des provinces ecclésiastiques d’Agra, Delhi et Bhopal en visite « ad limina » etleur a recommandé d’agir « pour une paix durable et pour la justice, à une époque d’incertitude, de conflits et de souffrance », indique L’Osservatore Romano en français du 23 septembre.
Dans la matinée du samedi 6 septembre 2003, le Pape Jean-Paul II a reçu en audience, au Palais pontifical de Castel Gandolfo, les Evêques indiens des provinces ecclésiastiques d’Agra, Delhi et Bhopal, en visite « ad limina Apostolorum ». Il s’agit du cinquième groupe d’évêques de rite latin provenant d’Inde reçus ces derniers mois par le Saint-Père. Au cours de la rencontre, le Pape leur a adressé le discours suivant:

Chers frères dans l’épiscopat,

1. C’est avec joie que je souhaite la bienvenue aux évêques des provinces ecclésiastiques d’Agra, de Delhi et de Bhopal. Je vous exprime encore une fois, ainsi qu’au bien-aimé peuple de votre pays, ma profonde affection: « Car Dieu m’est témoin, à qui je rends un culte spirituel en annonçant l’Evangile de son Fils, avec quelle continuité je fais mémoire de vous » (Rm 1, 9). Je suis particulièrement heureux de saluer Mgr Concessao, et je le remercie des sentiments qu’il m’a exprimés au nom des Evêques, du clergé et des fidèles de vos diocèses.

Parmi les nombreux événements importants qui se sont déroulés dans l’Eglise qui est en Inde après votre dernière visite « ad limina, il y a la création du nouveau diocèse de Jhabua. Alors que vous vous réunissez auprès des tombes des Apôtres pour exprimer la solidarité entre Pierre et vos Eglises locales, la présence du pasteur d’un nouveau troupeau représente un signe encourageant de la vitalité et de la croissance de la foi dans votre pays.

2. L’Apôtre Thomas, saint François-Xavier et Mère Teresa de Calcutta sont quelques-uns des exemples extraordinaires du zèle missionnaire qui a toujours été présent en Inde. C’est précisément cet esprit d’évangélisation qui continue à donner aux fidèles de votre pays le désir de proclamer Jésus Christ, également lorsqu’ils doivent affronter de grandes difficultés. En tant qu’évêques, vous êtes bien conscients que, en même temps que le clergé et les religieux, les laïcs sont au centre de la mission de l’Eglise, en particulier dans les zones où la population chrétienne vit de façon dispersée.

« Dans les communautés ecclésiales, leur action est si nécessaire que, sans elle, l’apostolat des pasteurs ne peut, la plupart du temps, obtenir son plein effet » (Catéchisme de l’Eglise catholique, n. 900). Vous avez pris à coeur les paroles du Seigneur, en disant à votre troupeau: « Allez, vous aussi, à la vigne » (M 20, 7). Le sérieux avec lequel vous préparez les laïcs à assister leurs Evêques et le clergé dans la diffusion de l’Evangile le démontre clairement. Dans le même temps, la disponibilité des fidèles à oeuvrer aux côtés de leurs prêtres se manifeste concrètement à travers leur participation importante dans la catéchèse, dans les conseils pastoraux, dans les petites communautés chrétiennes, dans les groupes de prière et dans les nombreux programmes d’engagement social et de développement humain.

Former les personnes afin qu’elles soient en mesure de faire face aux exigences d’être des catholiques responsables, requiert que celles-ci se conforment toujours davantage au Christ à travers la participation aux trois munera de prêtre, prophète et roi. Cela ne doit pas être entendu comme une extension du rôle clérical, mais comme une réalité partagée par chaque chrétien dans la grâce reçue lors du Baptême et de la Confirmation.

Ces devoirs chrétiens deviennent encore plus impératifs dans des régions comme les vôtres, qui n’ont pas la chance d’avoir un prêtre résidant dans chaque communauté. Aux fidèles laïcs qui se retrouvent sans ministre ordonné dans leur village ou dans leur ville, est lancé le défi encore plus grand de promouvoir la foi de nombreuses façons différentes: en prêtant leur concours pour guider les traditionnelles prières du matin et du soir, comme le font un grand nombre de vos familles; en servant comme catéchistes ou en contribuant au développement d’un plan ou d’un objectif pastoral. Toutes ces responsabilités, les petites comme les grandes, sont des façons de se donner soi-même comme des témoins et des instruments « de la mission de l’Eglise elle-même, « à la mesure du don du Christ » » (Lumen gentium, n. 33 2).

3. Dès les premiers jours de sa présence sur le sol indien, l’Eglise catholique a fait preuve d’un profond engagement social dans les milieux de l’assistance médicale, du développement, du bien-être et en particulier de l’éducation. Le Concile Vatican II nous rappelle que l’éducation catholique est un élément fondamental pour préparer les jeunes catholiques à devenir des adultes fidèles. « Cette éducation ne vise pas seulement à assurer la maturité de la personne humaine, mais principalement à ce que les baptisés deviennent chaque jour plus conscients de ce don de la foi qu’ils ont reçu » (cf. Gravissimum educationis, n. 2).

Dans un grand nombre de vos écoles, un pourcentage élevé de vos enseignants et de vos étudiants ne sont pas catholiques. Leur présence dans nos institutions pourrait contribuer à augmenter la compréhension réciproque entre les catholiques et les fidèles des autres religions, à une époque où les malentendus peuvent être source de souffrance pour beaucoup de personnes. Cela pourrait également constituer une opportunité pour éduquer les étudiants non-catholiques dans un système qui a donné la preuve de ses capacités à transformer les jeunes en citoyens responsables et productifs.

L’une des plus grandes contributions que nos structures éducatives et toutes les institutions catholiques puissent offrir aujourd’hui à la société tout entière est leur catholicité sans compromis. Les écoles catholiques doivent avoir pour objectif de « créer une atmosphère animée d’un esprit évangélique de liberté et de charité et d’ordonner toute la culture humaine à l’annonce du salut, de telle sorte que la connaissance graduelle que les élèves acquièrent du monde, de la vie et de l’homme soient illuminées par la foi » (cf. Gravissimum educationis, n. 8).

C’est pour cette raison qu’il est fondamental que vos instituts d’éducation conservent une profonde identité catholique. Cela requiert un programme d’étude caractérisé par la participation à la prière et à la célébration de l’Eucharistie, et exige que tous les enseignants soient bien préparés non seulement dans la matière qu’ils enseignent, mais également dans la foi catholique. Il est encourageant d’observer que beaucoup de vos diocèses cherchent à mettre en pratique les recommandations de l’Exhortation post-synodale Ecclesia in Asia, en insérant le plus possible des prêtres, des religieux, et des conseillers préparés dans toutes les écoles. Cela aidera à faire en sorte que chaque section et chaque activité fassent rayonner avec joie l’Esprit de l’Eglise du Christ (cf. Ecclesia in Asia, n. 47).

4. La présence et l’influence du prêtre dans les institutions catholiques est une façon de promouvoir les vocations, dont la validité a été prouvée depuis longtemps. Il existe peu de choses plus attrayantes, pour les jeunes qui prennent en considération une vie de service sacerdotal ou religieux, que l’exemple d’un prêtre zélé qui aime non seulement le sacerdoce, mais qui exerce également son ministère avec joie et dévouement. A travers la paternité spirituelle du prêtre, l’Esprit Saint invite un grand nombre de personnes à suivre encore de plus près les traces du Christ: « Venez à ma suite, et je vous ferai pêcheurs d’hommes » (Mt 4, 19).

A ce propos, je suis heureux d
‘observer votre engagement constant en vue de promouvoir un plus grand nombre de vocations locales. Vos multiples programmes pour les jeunes sont remarquables. Les groupes de service aux jeunes et les centres spécialisés dans la catéchèse, dans le développement de la personnalité, dans la formation des guides et dans le discernement des vocations constituent un terrain fertile pour aider les jeunes à reconnaître l’appel de Dieu dans leur vie (cf. Pastores dabo vobis, n. 9).

J’offre des prières spéciales aux jeunes qui ont déjà décidé d’accomplir une formation sacerdotale. Il est fondamental que ces futurs ministres de l’Eglise reçoivent une formation philosophique, théologique et spirituelle appropriée, afin de pouvoir comprendre de façon réaliste la valeur d’une vie de pauvreté, de chasteté et d’obéissance. A présent, plus que jamais, les prêtres sont appelés à être un signe en butte à la contradiction dans les sociétés qui deviennent chaque jour plus sécularisées et matérialistes.

« Quelle puissance sur les jeunes que celle de la fascination de ce qu’on appelle la « société de consommation » qui les rend victimes et prisonniers d’une interprétation individualiste, matérialiste et hédoniste de l’existence humaine » (cf. Ibid., n. 8). Cette attitude peut parfois également s’insinuer dans la vie de nos séminaristes et de nos prêtres, en les incitant à ne pas vivre « selon la logique du don et de la gratuité » (cf. ibid.).

L’évêque a la tâche spécifique d’assurer que les séminaires et les maisons de formation disposent d’un personnel constitué de prêtres qui soient exemplaires dans la vertu et d’extraordinaires maîtres de foi. Comme l’a souligné le Synode pour l’Asie, « une tâche difficile et délicate les attend dans l’éducation des futurs prêtres. Il s’agit là d’un apostolat de première importance pour le bien de l’Eglise et pour sa vitalité » (cf. Ecclesia in Asia, n. 43).

5. La préparation des prêtres d’aujourd’hui demande que les séminaristes soient formés selon les traditions très diverses de notre foi catholique. Cela vaut en particulier pour l’Inde, qui a la chance d’avoir des catholiques orientaux et latins qui vivent côte-à-côte. Le nombre des catholiques syro-malabars et syro-malankars présents dans votre région constitue un défi pour tous les fidèles à respecter les exigences et les désirs de ceux qui célèbrent la même foi de façons différentes (cf. Discours aux Evêques syro-malabars de l’Inde, 13 mai 2003; cf. ORLF n. 22 du 3 juin 2003).

« Chacun selon la grâce reçue, mettez-vous au service les uns des autres, comme de bons intendants d’une multiple grâce de Dieu » (1 P 4, 10). Ce partage peut être réalisé à travers le dialogue inter-rituel, l’éducation, les projets communs et l’expérience des diverses traditions liturgiques du catholicisme. Mon souhait est que les évêques latins et orientaux continuent à travailler ensemble en harmonie, en partageant un esprit d’amour pour le Christ et son message universel de salut. « Comme fils de l’unique Eglise, renés à la vie nouvelle dans le Christ, les croyants sont appelés à faire face à tout avec le souci d’une perspective commune, dans un esprit de confiance, et une charité inébranlable » (Ecclesia in Asia, n. 27).

La même communion d’intentions est importante dans le dialogue oecuménique en cours avec nos frères séparés. Tous les catholiques son responsables de la promotion de l’engagement pour l’unité chrétienne. Bien que les Eglises orientales soient « impliquées directement dans le dialogue oecuménique avec les Eglises orthodoxes soeurs » (cf. ibid.), les catholiques de rite latin doivent également assumer un rôle actif dans cet échange, à travers la participation aux discussions et aux activités oecuméniques. Nous devons toujours nous rappeler que « le dialogue ne se limite pas à un échange d’idées » (Ut unum sint, n. 28).

6. Chers frères dans l’épiscopat, alors que vous repartez dans votre terre bien-aimée, je souhaite que vous apportiez mon salut cordial aux prêtres, aux religieux et aux laïcs de vos diocèses. L’année qui vient de s’écouler a été une année d’incertitude, de conflit et de souffrance pour de nombreuses personnes en Inde. En rappelant le mandat du Seigneur à ses disciples, je prie afin que, lorsque vous quitterez la ville des Apôtres Pierre et Paul, vous soyez comblés par l’Esprit Saint et préparés à agir comme des instruments de réconciliation, en suscitant dans le coeur des membres du Peuple de Dieu le ferme désir d’agir pour une paix durable et pour la justice dans votre pays (cf. Jn 20, 21-22).

Avec ces sentiments, je confie l’Eglise qui est en Inde à l’intercession pleine d’amour de Notre-Dame Très Sainte, Reine du Rosaire, et je donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique en gage de joie et d’espérance dans le Seigneur.

(©L’Osservatore Romano – 23 septembre 2003)

Share this Entry

ZENIT Staff

FAIRE UN DON

Si cet article vous a plu, vous pouvez soutenir ZENIT grâce à un don ponctuel