Le 1er juillet dernier à Hongkong, jour de la manifestation contre le projet de loi anti-subversion, Mgr Joseph Zen Ze-kiun, évêque du diocèse de Hongkong, a présidé une assemblée de prières au parc de la reine Victoria avant de s’éclipser et d’aller prier dans une église proche, laissant les manifestants entamer leur marche vers le quartier de Central, cœur du pouvoir politique et financier de Hongkong. L’ampleur de la manifestation – qui a rassemblé près de 500 000 personnes – a provoqué un séisme politique à Hongkong. Ne réagissant pas dans un premier temps et affirmant que sa volonté de présenter le projet de loi contesté devant le Legco était intacte, le gouvernement, après la défection de membres du Parti libéral, a finalement annoncé qu’il retirait sine die son texte. Depuis plusieurs mois, Mgr Zen s’était placé à la pointe de la contestation contre ce texte, jugé liberticide.
A l’appel des responsables chrétiens de Hongkong, environ 10 000 chrétiens, en majorité catholiques, s’étaient rassemblés, le 1er juillet, au parc Victoria pour prier, avant que la manifestation ne s’ébranle. Ils y avaient été invités par Mgr Zen et par le pasteur Eric So Shing-yit, secrétaire général du Conseil chrétien de Hongkong, structure protestante. « Nous avons été forcés à manifester parce que notre point de vue a été ignoré. Nous voulons être vrais face à notre conscience et pouvoir regarder en face la prochaine génération [de Hongkongais] », a notamment déclaré Mgr Zen devant la foule de chrétiens. Comme en réponse à certains de ses critiques, dans ou en-dehors de l’Eglise, qui estiment que l’évêque de Hongkong s’expose trop sur la place publique, Mgr Zen a ajouté : « Si nous constatons que des injustices se produisent, nous devons exprimer notre colère. » Le pasteur Eric So, quant à lui, a affirmé que les chrétiens avaient le devoir d’apporter la liberté et la justice aux gens de façon à édifier le Royaume de Dieu sur terre. Une fois la session de prières achevée, Mgr Zen a choisi de ne pas se mêler aux manifestants et de se retirer dans une église proche du parc Victoria pour y prier.
Selon les observateurs, le fait que Mgr Zen n’ait pas participé jusqu’au bout à la manifestation du 1er juillet ne signifie pas un retrait de sa part sur l’affaire du projet de loi anti-subversion ou, plus généralement, sur la défense des libertés à Hongkong. Présenté en février dernier par l’influent hebdomadaire anglophone Far Eastern Economic Review comme « la nouvelle conscience de Hongkong », Mgr Zen n’a pas ménagé sa peine ces derniers mois pour dire son opposition au gouvernement dirigé par Tung Chee-hwa sur différentes questions, que ce soit le projet de loi anti-subversion ou le droit au regroupement familial pour les enfants nés en Chine continentale et dont les parents sont résidents hongkongais (1). Mais, dans le même temps, Mgr Zen a toujours pris garde que son engagement dans les affaires de la cité, mené au nom de l’Evangile, ne devienne pas strictement politique et que l’Eglise catholique à Hongkong n’apparaisse pas comme un opposant politique au pouvoir exécutif dirigé par Tung Chee-hwa.
Le 9 juillet, lorsque de 30 à 50 000 personnes sont à nouveau descendues dans la rue pour célébrer la décision du gouvernement de retirer son projet de loi devant le Legco, Mgr Zen était en déplacement à Rome. De retour à Hongkong, il a participé le dimanche 13 juillet à une nouvelle manifestation dans les rues de Central, prenant la parole devant une foule estimée à quelques milliers de personnes, pour les encourager dans leur revendication à plus de démocratie dans le système politique local.
(1) Voir EDA 361, 362, 363, 364, 365, 336, 367, 369, 371, 375, 377, 378
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