Suisse: "Accompagner les mourants dans leur pleine dignité"

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Pour une société plus humaine

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CITE DU VATICAN, Jeudi 6 juin 2002 (ZENIT.org) – « Accompagner les mourants dans leur pleine dignité », c´est ce que proposent les évêques suisses catholiques suisses « pour la construction d´une société plus humaine ». Voici le résumé en français du document de la Conférence des évêques catholiques de Suisse:

Le document rappelle tout d’abord (1er chapitre), sur un plan anthropologique, que la mort fait partie intégrante de la vie. Il rappelle trois dimensions essentielles de la mort : 1) La mort est plus que la fin de la vie, car elle marque toute l’existence. Pour certains philosophes, la vie est l’apprentissage de la mort. 2) La dimension sociale de la mort nous touche peut-être davantage. Pour celui qui meurt comme pour son entourage, il s’agit de prendre congé. 3) Du point de vue religieux, la mort nous emmène vers l’inconnu, vers le « Tout-Autre ».
Ces expériences englobent aussi le désir de la personne humaine de vaincre la mort : les recherches scientifiques sur le processus de la mort ; le refoulement ou la banalisation de la mort ; la volonté de maîtriser la fin de la vie en se donnant volontairement la mort ; l’attitude religieuse face à la mort. Toute religion éveille le sens du « Tout-Autre ».
Dans cette perspective, le 2e chapitre du document parle de l’approche chrétienne de la mort. Il rappelle que pour la Bible, la vie est sacrée, elle est un don de Dieu, qui reste seul Maître de la vie. Le Nouveau Testament propose une nouvelle approche de la mort : c’est celle du Christ « pour nous ». Cette dimension ouvre une perspective sur la mort du chrétien : « Il y a ici davantage qu’une vague espérance en une hypothétique résurrection des morts. Nous affirmons une conviction forte : notre mort corporelle ne débouche pas sur la mort, mais sur la vie auprès du Père avec le Christ ». Cette conviction est le fondement de l’espérance chrétienne.
Cette conviction et cette espérance font de la mort un moment solennel, un moment empreint de dignité (3e chapitre). Ceci est souligné par les différents rites liturgiques accompagnant le défunt. Au moment de la mort, l’homme ne peut plus lui-même disposer de sa vie, mais il fait l’expérience radicale de sa fragilité et de sa dépendance des autres. Le rôle de l’accompagnement au décès consiste à faciliter l’acceptation de la mort comme une intervention extérieure décisive.
Le 4e chapitre affronte le thème central : l’assistance au décès et ses limites. Il précise tout d’abord le vocabulaire : par euthanasie, on entend le fait de mettre fin à une vie ou de laisser mourir une personne qui souffre gravement ou qui est condamnée, à sa demande, ou pour son bien. On distingue :
1) L’euthanasie passive, qui consiste en l’omission d’un traitement ou son interruption. Pour l’Eglise, l’arrêt de procédures médicales disproportionnées avec les résultats attendus peut être légitime. On ne veut pas, ainsi, donner la mort. On accepte de ne pas pouvoir l’empêcher. Les décisions doivent être prises par le patient, s’il en a la capacité, ou par les ayant droit légaux, en respectant toujours les intérêts légitimes du patient.
2) L’euthanasie (active) indirecte : traitement des symptômes et de la douleur au risque d’abréger la vie. Pour l’Eglise, l’usage des analgésiques pour alléger les souffrances du mourant, même au risque d’abréger ses jours, peut être moralement conforme à la dignité humaine si la mort n’est pas voulue, mais seulement tolérée comme inévitable.
3) L’euthanasie active directe : le meurtre sur demande, dont il est abondamment question actuellement dans nos sociétés. Ici, les évêques, pleinement d’accord avec l’Académie suisse des sciences médicales, considèrent que celle-ci n’est jamais licite. Contrairement aux deux formes précédentes, l’euthanasie directe n’apporte aucune aide au mourant ; elle précipite la mort d’une personne en l’empêchant de mourir de sa propre mort naturelle et allant ainsi à l’encontre de sa dignité. Il faut rapprocher de cette forme l’aide au suicide, proposée par certaines associations, et qui est légitime selon le droit actuel. Mais il n’y a là, pour les évêques, qu’une différence minime avec l’euthanasie directe, un « subterfuge ».
Du point de vue chrétien, l’euthanasie active directe ne constitue en aucun cas un geste de compassion. Elle est contraire au commandement qui interdit de tuer l’innocent et au devoir de protéger toute vie humaine. Elle part d’une fausse conception de la compassion, qui désire abréger la souffrance et la déchéance du patient. Dans ce contexte, l’argument central pour les évêques est que « plus que la mort, la compassion envers une personne qui souffre doit envisager les soins palliatifs ».
Accompagner les mourants dans leur pleine dignité, tel est l’objet du 5e et dernier chapitre. Cet accompagnement doit répondre aux quatre besoins essentiels d’une personne qui meurt : ne pas mourir dans la solitude, ne pas devoir endurer de trop grandes souffrances, pouvoir mettre en ordre ses affaires et envisager la « suite » avec espérance. Les évêques remercient pour tout ce qui se fait déjà chez nous, mais rappellent qu’il reste encore beaucoup à faire. Une enquête nationale montre qu’en Suisse l’accès aux soins palliatifs est encore lacunaire. Ils demandent un engagement plus grand du milieu hospitalier dans l’offre de soins palliatifs : les soins antalgiques, les soins du corps et l’accompagnement psychologique et spirituel. Les hôpitaux et les établissements médicaux devraient disposer d’une section de soins palliatifs pour malades graves, comprenant une équipe mobile.
Le besoin des personnes de ne pas mourir seules exige un engagement humain, qui peut être assumé par le personnel médical, des bénévoles ou les proches. Le devoir de l’Eglise, dans ce domaine, est d’assister les mourants par le biais de la prière et des sacrements et la présence des équipes d’aumônerie.
Avec ce document, les évêques ne prétendent pas seulement défendre la dignité de ceux et celles qui meurent, mais aussi apporter leur part à la construction d’une société plus humaine.

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ZENIT Staff

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