Le pape François se rendra en Egypte, au Caire, les 28 et 29 avril 2017, annonce officiellement le directeur de la salle de presse du Saint-Siège, Greg Burke, ce samedi 18 mars, annonçant pour plus tard les détails du programme. Une occasion de fortifier les relations fraternelles avec les orthodoxes, de rendre hommage aux martyrs, et de promouvoir le dialogue avec l’islam sunnite du Caire qui condamne le terrorisme et le fanatisme religieux.
Le pape répond ainsi aux invitations du président de la République, Abdel Fattah al-Sissi, des évêques catholiques, du « pape » copte orthodoxe Tawadros II et du grand imam de l’université al-Azhar, Ahmed Mohamed al-Tayeb. En quelque sorte, le pape rend leurs visites au patriarche et à l’imam. Mais pas seulement.
Fortifier dans la foi la communauté catholique
Un des enjeux du voyage est certainement de fortifier la petite communauté catholique qui se perçoit parfois comme des citoyens de « seconde classe ». Les coptes catholiques étaient environ 210 000 en l’an 2000, les protestants 200 000 et les coptes orthodoxes environ 6,5 millions. On estime que les chrétiens (11 confessions et rites réunis) représenteraient aujourd’hui 11% de la population du pays qui compte plus de 90 millions d’habitants.
« Nous sommes heureux que le pape François vienne chez nous. Nous savions son intention de le faire. Mais nous ne connaissions pas les dates », a confié aujourd’hui à AsiaNews le p. Rafic Greiche, porte-parole de l’Eglise catholique en Egypte.
« En Egypte, ajoute le p. Greiche, tous l’attendent, que ce soit le président al-Sissi ou le patriarche Tawadros II, le grand imam de al-Azhar, et toute la hiérarchie catholique qui a demandé cette visite avec insistance.»
« Le pape, a-t-il ajouté, vient fortifier la communauté la plus nombreuse des chrétiens d’Orient et nous soutenir dans notre coexistence avec les musulmans »: sa venue « sera aussi une façon d’honorer les martyrs chrétiens tués pour leur foi».
L’œcuménisme du sang
Mais il s’agira aussi de fortifier le dialogue avec les orthodoxes, qui représentent la majorité des chrétiens du pays.
Le patriarche Tawadros confiait à l’agence catholique italienne SIR, en janvier dernier, que le pape est « animé par l’Esprit de Dieu » : « J’ai rencontré Sa Sainteté le 10 mai 2013 dans la Cité du Vatican et ce jour-là, j’ai senti qu’il est mon frère béni qui soutient par sa prière, par son expérience spirituelle et notre vie peut tirer de grands bienfaits des enseignements qu’il a écrits. » Il avait exprimé le désir de sa venue en Egypte.
Le Vatican a en effet multiplié les contacts et les occasions de développer de bonnes relations. Et lorsque le patriarche Tawadros s’est rendu en visite au Vatican le 11 mai 2013, c’était son premier voyage hors d’Egypte depuis son élection, le 4 novembre 2012. L’Osservatore Romano n’hésite pas à relayer les appels du patriarche orthodoxe.
Surtout, il y a ce que le pape appelle « l’œcuménisme du sang ». Rappelons que le 11 décembre 2016, 25 coptes ont été tués dans un attentat terroriste en l’église Saint-Pierre qui jouxte la cathédrale orthodoxe Saint-Marc, et d’autres chrétiens ont été tués dans le nord du Sinaï. Daech a revendiqué ces attentats et la décapitation, en février 2015, sur une plage de Libye, de 21 coptes orthodoxes, enlevés en décembre 2014.
Le pape François avait appelé le patriarche Tawadros au téléphone, le 16 février 2015, pour lui exprimer ses condoléances et sa proximité, assurant qu’il célébrerait la messe pour eux le lendemain, 17 février, jour des funérailles.
Il avait aussi dit à des représentants de l’Église réformée d’Écosse, reçus ce même 16 février: «Ils ont été assassinés pour le seul fait d’être chrétiens. Le sang de nos frères chrétiens est un témoignage de foi, et peu importe qu’ils soient catholiques, orthodoxes, luthériens, coptes: ça n’intéresse pas leurs persécuteurs, qui voient seulement qu’ils sont chrétiens, parce que leur sang est le même, leur sang confesse le Christ. Allons de l’avant dans l’oecuménisme, qui est témoigné dans l’oecuménisme du sang. Les martyrs appartiennent à tous les chrétiens. »
Le pape a écrit au patriarche l’année suivante, à l’occasion de la Journée de l’amitié copte-catholique 2016.
Dialogue avec l’islam sunnite
Un autre enjeu du voyage c’est le dialogue avec l’islam sunnite dont al-Azhar est considéré comme la plus haute autorité. Les échanges entre le Saint-Siège et al-Azhar s’étaient interrompus après l’attentat contre la cathédrale copte d’Alexandrie, qui a fait 21 morts le 1er janvier 2011: Benoît XVI avait souligné la nécessité de protéger les chrétiens en Égypte et au Moyen-Orient, dans une déclaration que l’institution égyptienne avait considérée comme une ingérence occidentale indue.
Après ce temps de froid, le dialogue a repris et s’est poursuivi avec al-Azhar, notamment grâce aux efforts du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux et son président, le cardinal français Jean-Louis Tauran.
L’imam s’est lui-même rendu au Vatican, le 23 mai 2016, condamnant le terrorisme et joignant le geste à la parole en se rendant le lendemain, à Paris, devant le Bataclan pour déposer des fleurs, condamner le terrorisme et le fanatisme religieux et prier pour la paix. Le 27 octobre 2016, une délégation de al-Azhar s’est rendue en Normandie, à Saint-Etienne du Rouvray, sur les pas du père Jacques Hamel, pour dire « non » au terrorisme. Ce sera l’un des messages du voyage du pape.
L’Osservatore Romano a souligné pour sa part et encouragé le développement du dialogue entre coptes orthodoxes et musulmans, par exemple sur le thème de l’éducation.
La paix en Egypte
Quant au président al-Sissi, qui a rendu visite au pape François au Vatican le 24 novembre 2014, a déployé des efforts pour le retour à la paix, spécialement après la vague d’incendies d’églises en août 2013. Soeur Angelita Ibrahim, des soeurs Franciscaines misisonnaires du Coeur immaculé de Marie, au Caire, a confié à Zenit que l’une de leurs écoles qui avait été brûlée, à Béni-Souef, en même temps que le couvent et la bibliothèque avait été reconstruite par l’armée pour la rentrée scolaire 2014. Les religieuses avaient échappé aux terroristes grâce à une maman musulmane qui était venue les chercher et les avait mises à l’abri chez elle, a confié soeur Angelita.
Lors de la visite de novembre 2014 au Vatican, les conversations ont exprimé « l’espoir que dans le cadre des garanties prévues par la nouvelle Constitution en termes de sauvegarde des droits de l’homme et de la liberté religieuse, la coexistence pacifique entre toutes les composantes de la société puisse être renforcée et que le chemin du dialogue interreligieux soit poursuivi ».
Et le 23 août, l’Egypte et le Saint-Siège fêteront le 70e anniversaire de leurs relatiosn diplomatiques.
Le pape reçois Tawadros II, 10 mai 2013 , capture CTV
Egypte: le pape François au Caire les 28 et 29 avril 2017
Hommage aux martyrs orthodoxes et dialogue avec l’islam qui refuse le terrorisme