Le pape François salue la foule © L'Osservatore Romano

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Pour le pape, "l’engagement politique dérive de l’Évangile et non d’une idéologie"

Le jésuite argentin José Luis Narvaja sur la politique internationale du pape

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Pour le pape François, « l’engagement politique dérive de l’Évangile et non d’une idéologie », affirme le jésuite argentin José Luis Narvaja, professeur et collaborateur de la revue jésuite Civiltà Cattolica.
L’Osservatore Romano publie ses réflexions sur les fondements de la politique internationale du pape François, où il identifie quatre aspects : « son caractère kérygmatique ; l’orientation du tout et de l’unité ; l’origine dans le discernement ; le lien direct entre la politique et la charité ». Il s’agit d’un texte publié dans le livre « Le nouveau monde de François » du jésuite Antonio Spadaro, directeur de la revue Civiltà Cattolica, qui vient de sortir en Italie (Venise, Marsilio, 2018)
« La « politique » de François est kérygmatique », déclare José Luis Narvaja en expliquant que « le terme ‘kérygme’ identifie l’annonce du message du Christ, l’Évangile ».
« Aujourd’hui, explique José Luis Narvaja, la politique est souvent comprise comme ‘l’art du possible’, devenant un art des ‘parties’, un art de la partialité. » La politique, poursuit-il, « risque ainsi de devenir un art dont les hommes se servent pour chercher à imposer leurs propres intérêts». « La vision du pape se détache profondément de cette conception intéressée et instrumentale de la politique », affirme-t-il.
Le message politique du pape François, explique le professeur, vaut « pour tout le peuple de Dieu, et pas seulement pour une partie ou pour un parti qui représente des intérêts particuliers ».
« Pour le pape, poursuit-il, toute politique est toujours une ‘politique interne’. Il considère le monde comme une seule et unique ville, à laquelle correspond une politique unitaire. Cette vision trouve son fondement dans sa réflexion sur les relations entre le tout et la partie. » « Le pape affirme, dit José Luis Narvaja, que tout conflit doit être résolu à un niveau supérieur, dans lequel l’unité, c’est-à-dire le tout, doit être respectée. En ce sens-là, ‘l’unité prévaut sur le conflit’. »
La notion du « temps » est importante dans la vision politique du pape, poursuit le jésuite : « Le bien doit être désiré, il ne peut être imposé. Il faut donc du temps : du temps afin que la vérité jaillisse et s’impose d’elle-même, sans violence ; du temps pour permettre l’action de Dieu dans la vie de l’homme et de la ville. » « Le respect du dynamisme temporel, explique-t-il, signifie une ouverture à la croissance, au dialogue, à la réflexion, à la conversion et à l’action de l’Esprit. Les quatre principes mentionnés doivent être tenus ensemble. Dans le cas contraire, on produit des relations étrangères avec le monde. »
« La culture du rebut est le résultat d’un non-respect du temps, estime José Luis Narvaja, dans la mesure où l’on ne donne pas d’espace aux processus. » Et « toute forme de rhétorique politique qui encourage les formes d’illuminisme et ethnicise les élites, liée peut-être à la figure de certains leaders ou d’un groupe spécifique, est à risque de leurre ».
« Sur la base » de ces considérations, il reconnaît que la politique du pape François est « une politique authentiquement chrétienne » : « Une politique qui soutient l’harmonisation des parties dans l’acceptation mutuelle, sans détruire les particularités, mais sans mettre non plus à la première place les différences, en apprenant à dialoguer et à s’enrichir mutuellement à partir de ces différences, en construisant une unité supérieure. »
« Le chrétien engagé en politique, poursuit le professeur, est conscient qu’il faut un dialogue avec l’histoire qui permet de découvrir les signes des temps ; et qu’il faut en même temps un dialogue avec Dieu, parce que c’est Lui qui guide les cœurs des hommes et le cours de l’histoire. »
C’est pourquoi, estime-t-il, une autre caractéristique de la politique du pape se base sur l’affirmation de saint Ignace de Loyola qu’ « il faut être attentifs et ‘discerner les esprits’ … qui déterminent les relations et les actions ».
« La politique, conclut José Luis Narvaja, est ‘lutte’, mais elle n’est pas une lutte de la chair contre la chair, et encore moins une lutte entre les hommes contre d’autres ; elle est plutôt une lutte spirituelle, avec l’arme du discernement. »
Avec une traduction d’Océane Le Gall

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Marina Droujinina

Journalisme (Moscou & Bruxelles). Théologie (Bruxelles, IET).

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