« Le peuple de Dieu n’a pas besoin d’argent sale mais de cœurs ouverts à la miséricorde de Dieu », déclare le pape François.
L’audience générale de ce mercredi matin, 2 mars, s’est déroulée à 10h, place Saint-Pierre, où le pape François a rencontré des groupes d’Italie et du monde entier.
Dans sa catéchèse en italien, le pape a poursuivi ses réflexions sur la miséricorde dans la Bible, à partir d’un passage du prophète Isaïe sur le thème : « Miséricorde et correction » (Is 1,16b-17.18b).
« Dieu, dit le prophète Isaïe, n’aime pas le sang de taureaux et d’agneaux (v. 1), surtout si l’offrande est faite avec des mains salies dans le sang de nos frères (v. 15) », a souligné le pape François.
Il a actualisé ce message en disant : « Mais je pense à certains bienfaiteurs de l’Église qui viennent avec leur offrande : « Tenez, cette offrande pour l’Église ! » ; c’est le fruit du sang de tant de personnes exploitées, maltraitées, asservies par un travail mal payé ! Je dirai à ces personnes : « S’il te plaît, repars avec ton chèque, et brûle-le ! » Le peuple de Dieu, c’est-à-dire l’Église, n’a pas besoin d’argent sale, il a besoin de cœurs ouverts à la miséricorde de Dieu. »
Le pape a recommandé d’avoir recours à Dieu lui-même, mais pas au « sorcier » : « Le culte est critiqué non pas parce qu’il serait inutile en soi, mais parce qu’au lieu d’exprimer la conversion, il prétend la remplacer ; et il devient ainsi recherche de sa propre justice, créant la conviction erronée que ce sont les sacrifices qui sauvent, et non la miséricorde divine qui pardonne le péché. Pour bien la comprendre : quand quelqu’un est malade, il va chez le médecin ; quand on se sent pécheur, on va trouver le Seigneur. Mais si, au lieu d’aller chez le médecin, il va chez le sorcier, il ne guérit pas. »
Et le pape François a évoqué « les réfugiés qui débarquent en Europe et ne savent pas où aller ».
Après avoir résumé sa catéchèse dans différentes langues, le pape a adressé ses salutations à quelques groupes spécifiques. L’audience s’est conclue par le chant du Notre-Père suivi de la bénédiction apostolique.
A.B.
Catéchèse du pape en italien
Chers frères et sœurs, bonjour !
En parlant de la miséricorde divine, nous avons plusieurs fois évoqué la figure du père de famille, qui aime ses enfants, les aide, en prend soin et leur pardonne. Et comme un père, il les éduque et les corrige quand ils se trompent, leur permettant de grandir dans le bien.
C’est ainsi qu’est présenté Dieu dans le premier chapitre du prophète Isaïe où le Seigneur, comme un père affectueux mais aussi attentif et sévère, s’adresse à Israël en l’accusant d’infidélité et de corruption, pour le ramener sur la voie de la justice. Notre texte commence ainsi : « Cieux, écoutez ; terre, prête l’oreille, car le Seigneur a parlé. J’ai fait grandir des enfants, je les ai élevés, mais ils se sont révoltés contre moi. Le bœuf connaît son propriétaire, et l’âne, la crèche de son maître. Israël ne le connaît pas, mon peuple ne comprend pas » (v. 2-3).
À travers le prophète, Dieu parle à son peuple avec l’amertume d’un père déçu : il a élevé ses enfants, et maintenant ceux-ci se rebellent contre lui. Même les animaux sont fidèles à leur maître et reconnaissent la main qui les nourrit ; le peuple, lui, ne reconnaît plus Dieu, il se refuse à comprendre. Bien qu’il soit blessé, Dieu laisse parler son amour et il fait appel à la conscience de ces enfants indignes pour qu’ils se reprennent et se laissent à nouveau aimer. Voilà ce que Dieu fait ! Il vient à notre rencontre pour que nous nous laissions aimer par lui, par notre Dieu.
La relation père-fils, à laquelle les prophètes font souvent référence pour parler du rapport d’alliance entre Dieu et son peuple, s’est dénaturée. La mission éducative des parents consiste à les faire grandir dans la liberté, à les rendre responsables, capables d’accomplir des œuvres de bien pour eux-mêmes et pour les autres. Au contraire, à cause du péché, la liberté devient un prétexte à l’autonomie, un prétexte à l’orgueil, et l’orgueil pousse à l’opposition et à l’illusion de l’autosuffisance.
C’est alors que Dieu rappelle son peuple : « Vous vous êtes trompés de route. » Affectueusement, et amèrement, il dit « mon » peuple. Dieu ne nous renie jamais ; nous sommes son peuple, le pire des hommes, la pire des femmes, les pires des peuples sont ses enfants. Et Dieu est comme cela : jamais, jamais il ne nous renie ! Il dit toujours : « Mon enfant, viens ! » Et ceci est l’amour de notre Père ; c’est la miséricorde de Dieu. Avoir un tel père nous donne de l’espérance, nous donne confiance. Cette appartenance devrait être vécue dans la confiance et dans l’obéissance, en étant conscient que tout est don, venant de l’amour du Père. Et en revanche, voilà la vanité, la folie et l’idolâtrie.
C’est pourquoi maintenant, le prophète s’adresse directement à ce peuple par des paroles sévères pour l’aider à comprendre la gravité de sa faute : « Malheur à vous, nation pécheresse, […] fils pervertis ! Ils abandonnent le Seigneur, ils méprisent le Saint d’Israël, ils lui tournent le dos » (v. 4).
La conséquence du péché est un état de souffrance, dont le pays aussi subit les conséquences, dévasté et transformé en un désert au point que Sion, c’est-à-dire Jérusalem, devient inhabitable. Là où règne le refus de Dieu, de sa paternité, il n’y a plus de vie possible, l’existence perd ses racines, tout semble perverti et annihilé. Toutefois, même ce moment douloureux est en vue du salut. L’épreuve est donnée pour que le peuple puisse faire l’expérience de l’amertume de celui qui abandonne Dieu et donc se confronter au vide désolant d’un choix de mort. La souffrance, conséquence inévitable d’une décision autodestructrice, doit faire réfléchir le pécheur pour l’ouvrir à la conversion et au pardon.
C’est cela le chemin de la miséricorde divine : Dieu ne nous traite pas selon nos fautes (cf. Ps 103,10). La punition devient l’instrument pour provoquer à réfléchir. On comprend ainsi que Dieu pardonne à son peuple, qu’il fait grâce et ne détruit pas tout, mais qu’il laisse toujours ouverte la porte à l’espérance. Le salut implique la décision d’écouter et de se laisser convertir, mais il reste toujours un don gratuit. Le Seigneur, donc, dans sa miséricorde, indique une route qui n’est pas celle des sacrifices rituels, mais plutôt celle de la justice. Le culte est critiqué non pas parce qu’il serait inutile en soi, mais parce qu’au lieu d’exprimer la conversion, il prétend la remplacer ; et il devient ainsi recherche de sa propre justice, créant la conviction erronée que ce sont les sacrifices qui sauvent, et non la miséricorde divine qui pardonne le péché.
Pour bien la comprendre : quand quelqu’un est malade, il va chez le médecin ; quand on se sent pécheur, on va trouver le Seigneur. Mais si, au lieu d’aller chez le médecin, il va chez le sorcier, il ne guérit pas. Bien souvent, nous n’allons pas vers le Seigneur, mais nous préférons prendre de mauvais chemins, en cherchant en-dehors de lui une justification, une justice, une paix. Dieu, dit le prophète Isaïe, n’aime pas le sang de taureaux et d’agneaux (v. 1), surtout si l’offrande est faite avec des mains salies dans le sang de nos frères (v. 15). Mais je pense à certains bienfaiteurs de l’Église qui viennent avec leur offrande : « Tenez, cette offrande pour l’Église ! » ; c’est le fruit du sang de tant de personnes exploitées, maltraitées, asservies par un travail mal payé ! Je dirai à ces personnes : « S’il te plaît, repars avec ton chèque et brûle-le ! »
Le peuple de Dieu, c’est-à-dire l’Église, n’a pas besoin d’argent sale, il a besoin de cœurs ouverts à la miséricorde de Dieu. Il est nécessaire de s’approcher de Dieu les mains purifiées, en évitant le mal et en pratiquant le bien et la justice. Comme c’est beau, la façon dont finit le prophète : « Cessez de faire le mal, exhorte le prophète. Apprenez à faire le bien : recherchez le droit, mettez au pas l’oppresseur, rendez justice à l’orphelin, défendez la cause de la veuve » (v. 16-17).
Je pense à tous ces réfugiés qui débarquent en Europe et ne savent pas où aller. Alors, dit le Seigneur, même si vos péchés étaient comme l’écarlate, ils deviendront blancs comme la neige et immaculés comme la laine, et le peuple pourra se nourrir des biens de la terre et vivre dans la paix (v. 19).
C’est cela, le miracle du pardon de Dieu ; le pardon que Dieu, comme Père, veut donner à son peuple. La miséricorde de Dieu est offerte à tous, et ces paroles du prophète valent aussi aujourd’hui pour nous tous, qui sommes appelés à vivre en enfants de Dieu.
© Traduction de Zenit, Constance Roques
© OR - Audience du 2 mars 2016, place Saint-Pierre
«Le peuple de Dieu n’a pas besoin d’argent sale mais de cœurs ouverts à la miséricorde»
Audience du 2 mars 2016 (traduction complète)