Pope Francis greets the faithful at his weekly general audience

PHOTO.VA - OSSERVATORE ROMANO

Le travail implique éducation, partage et témoignage

Audience au Mouvement des travailleurs chrétiens (traduction complète)

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Aux travailleurs chrétiens, le pape laisse trois mots, trois consignes : l’éducation, le partage, le témoignage. Le pape a en effet reçu au Vatican samedi matin, 16 janvier, des représentants du Mouvement des travailleurs chrétiens italiens.
Pour le pape François, l’éducation c’est « la capacité à extraire le meilleur de son cœur », ce n’est « pas seulement enseigner quelques techniques ou donner des notions, mais nous rendre nous-mêmes, ainsi que la réalité qui nous entoure, plus humains ».
Il invite à « former à un nouvel « humanisme du travail » », qui ait l’homme pour centre et non pas le profit. Cela suppose aussi d’éduquer « à ne pas céder aux mensonges de ceux qui veulent faire croire que le travail, l’engagement quotidien, le don de soi-même et l’étude, n’ont pas de valeur ». Le pape a dénoncé la corruption et l’illégalité, invitant à imiter « saint Joseph [qui] a appris à Jésus l’art du charpentier » en aidant les jeunes « à découvrir la beauté du travail vraiment humain ». Et face aux difficultés actuelles des jeunes travailleurs ou chômeurs, le pape François avertit : « Il ne sert à rien de faire des discours ; il faut au contraire transmettre l’espérance, réconforter par la présence, soutenir par une aide concrète. »
Voici notre traduction de l’allocution du pape François.
A.B.
Discours du pape François
Chers frères et sœurs bonjour !
Je vous accueille avec joie et je remercie le Président pour les paroles qu’il m’a adressées. Je souhaite une bienvenue fraternelle aux pasteurs qui ont voulu être présents avec nous ; quelques-uns d’entre eux viennent de loin. Je vous salue tous et je remercie les deux représentants, Marie et Jean, pour le témoignage qu’ils ont écrit.
Dans son témoignage, Marie insiste sur votre vocation, parlant d’une « vocation du travail ». C’est vrai : le travail est une vocation, parce qu’il naît d’un appel de Dieu adressé depuis l’origine à l’homme, afin qu’il « cultive et garde » la maison commune (cf. Gn 2,15). Ainsi, nonobstant le mal qui a corrompu le monde et aussi l’activité humaine, « dans le travail libre, créatif, participatif et solidaire, l’être humain exprime et fait grandir la dignité de sa propre vie » (Exhort. ap. Evangelii gaudium, 192). Comment pouvons-nous bien répondre à cette vocation, qui nous appelle à imiter activement l’inlassable œuvre du Père et de Jésus qui, dit l’Évangile, « sont toujours à l’œuvre » (cf. Jn 5,17) ?
Je voudrais vous suggérer trois mots, qui peuvent nous aider. Le premier est l’éducation. Éduquer signifie « tirer dehors ». C’est la capacité à extraire le meilleur de son cœur. Ce n’est pas seulement enseigner quelques techniques ou donner des notions, mais nous rendre nous-mêmes, ainsi que la réalité qui nous entoure, plus humains. Et ceci vaut pour le travail de manière particulière : il faut former à un nouvel « humanisme du travail ». Parce que nous vivons dans une époque d’exploitation des travailleurs ; dans un temps où le travail n’est pas vraiment au service de la dignité de la personne, mais où c’est un travail d’esclave. Nous devons former, éduquer à un nouvel humanisme du travail où l’homme, et non le profit, est au centre ; où l’économie sert l’homme et ne se sert pas de l’homme.
Un autre aspect est important : éduquer aide à ne pas céder aux mensonges de ceux qui veulent faire croire que le travail, l’engagement quotidien, le don de soi-même et l’étude, n’ont pas de valeur. J’ajouterais qu’aujourd’hui, dans le monde du travail – mais aussi dans tous les environnements – il est urgent d’éduquer à avancer sur la route, lumineuse et exigeante, de l’honnêteté, fuyant les raccourcis des favoritismes et des recommandations. Là dessous il y a de la corruption. Il y a toujours ces tentations, petites ou grandes, mais il s’agit toujours de « transactions morales », indignes de l’homme : il faut les repousser pour habituer le cœur à rester libre. Autrement, elles génèrent une mentalité fausse et nocive, qui doit être combattue : celle de l’illégalité, qui mène à la corruption de la personne et de la société. L’illégalité est comme une pieuvre qui ne se voit pas : elle se tient cachée, immergée, mais avec ses tentacules elle saisit et empoisonne, en polluant et en faisant beaucoup de mal. Éduquer est une grande vocation : comme saint Joseph a appris à Jésus l’art du charpentier, vous aussi vous êtes appelés à aider les jeunes générations à découvrir la beauté du travail vraiment humain.
Le deuxième mot que je voudrais vous dire est le partage. Le travail n’est pas seulement une vocation personnelle, mais une occasion d’entrer en relation avec les autres : « Toute forme de travail suppose une idée de la relation que l’être humain peut ou doit établir avec son semblable » (Lett. enc. Laudato si’, 125). Le travail devrait unir les personnes, et non les éloigner en les rendant fermées et distantes. En occupant tant d’heures dans la journée, il nous offre aussi l’occasion de partager le quotidien, de nous intéresser à celui qui nous côtoie et de recevoir la présence des autres comme un don et comme une responsabilité.
Jean a parlé, dans son témoignage écrit, d’une forme de partage qui se pratique dans votre Mouvement : les « projets de service civil », qui vous permettent de vous rapprocher de personnes et de contextes nouveaux, en faisant vôtres leurs problèmes et leurs espérances. Il est important que les autres ne soient pas destinataires de quelques attentions seulement, mais de vrais et réels projets. Tout le monde fait des projets pour soi, mais faire des projets pour les autres permet de faire un pas en avant : cela met l’intelligence au service de l’amour, rendant la personne plus intègre et la vie plus heureuse, parce que capable de donner.
Le dernier mot que je voudrais vous confier est le témoignage. L’apôtre Paul encourageait à témoigner de la foi même par le moyen de l’activité, vainquant la paresse et l’indolence ; et il donna une règle très forte et claire : « Si quelqu’un ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus » (2 Th 3,10). Même à cette époque il y avait ceux qui, pour manger, faisaient travailler les autres. Aujourd’hui, en revanche, il y a des personnes qui voudraient travailler, mais qui n’y arrivent pas, et qui ont même du mal à manger. Vous rencontrez tant de jeunes qui ne travaillent pas : comme vous l’avez dit, ce sont vraiment « les nouveaux exclus de notre temps ». Pensez que dans certains pays d’Europe, cette Europe qui est la nôtre, si cultivée, les jeunes représentent 40 % des chômeurs, 47 % dans d’autres pays, 50 % dans d’autres encore. Mais que fait un jeune qui ne travaille pas ? Où finit-il ? Dans la dépendance, les maladies psychologiques, le suicide.  On ne publie pas toujours les statistiques des suicides des jeunes. C’est un drame : c’est le drame des nouveaux exclus de notre temps. Ils sont privés de leur dignité. La justice humaine demande l’accès au travail pour tous. La miséricorde divine nous interpelle aussi : en face des personnes en difficulté et à des situations pénibles – je pense aussi aux jeunes pour qui se marier ou avoir des enfants est un problème, parce qu’ils n’ont pas un emploi suffisamment stable ou une maison – il ne sert à rien de faire des discours ; il faut au contraire transmettre l’espérance, réconforter par la présence, soutenir par une aide concrète.
Je vous encourage à témoigner à partir de votre mode de vie personnel et associatif : témoignage de gratuité, de solidarité, d’esprit de service. Quand il est transparent dans son cœur et sensible dans la vie, le disciple du Christ porte la lumière du Seigneur dans les lieux où il vit et où il travaille. C’est ce que je vous souhaite, tout en vous demandant de m’excuser pour le retard : vous avez de la patience, vous ! Mais les audiences [du matin, ndlr] se sont prolongées. Je vous bénis tous, vos familles et votre engagement. S’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi. Merci.
© Traduction de Zenit, Constance Roques

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Pape François

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