Le dialogue avec les anglicans se poursuivra malgré les obstacles

Entretien avec Mgr Farrell, secrétaire du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens

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ROME, Vendredi 23 juillet 2010 (ZENIT.org) – Lundi 12 juillet, après un vote serré, l’Eglise d’Angleterre a décidé que les femmes pourront être consacrées évêques, comme cela est déjà le cas dans d’autres Eglises anglicanes.

Même si cette décision doit encore être ratifiée d’ici un an par un autre Synode semblable, il s’agit d’un résultat qui marque un tournant important dans l’histoire de l’Eglise d’Angleterre. Le synode a aussi rejeté les « solutions » conciliatrices entre les deux tendances proposées par les archevêques de Canterbury et York, Rowan Williams et John Sentamu.

La décision pose de nouveaux obstacles au dialogue oecuménique, comme le reconnaît Mgr Brian Farrell, secrétaire du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, dans un entretien accordé à ZENIT.

Mgr Farell pense aussi que cette décision pourrait inciter certains groupes opposés à l’ordination des femmes à se rapprocher de l’Eglise catholique, comme cela est déjà arrivé aux Etats-Unis et en Australie.

De fait, le révérend David Houlding, un haut membre du « Groupe catholique du Synode », a souligné, rapporte ICN, que les « traditionalistes » n’ont plus de choix, et devront bientôt prendre des « décisions difficiles » pour leur avenir.

« Je resterai dans l’Eglise d’Angleterre tant qu’ils ne m’expulseront pas, a déclaré le révérend. Je ne m’en irai pas volontairement, seulement si on m’y oblige. Si les choses continuent ainsi, on aura de plus en plus la sensation que la porte est en train de se fermer », a-t-il déclaré.

Pour Mgr Farrell il est difficile de prévoir des mouvements en ce sens, car les « traditionalistes » ne sont pas tous proches de l’Eglise catholique. Quoiqu’il en soit, a-t-il réaffirmé, le Saint-Siège « ira de l’avant » dans le dialogue œcuménique.

ZENIT : Le synode anglican de York a approuvé l’ordination de femmes évêques, une décision qui est en train peu à peu de s’imposer dans toute la Communion anglicane, contre l’avis des communautés qualifiées de « traditionalistes ». Cette décision est-elle une décision ferme, même si le vote définitif n’aura lieu qu’en 2012 ? La résolution peut-elle encore être modifiée ?

Mgr Brian Farrell : Le synode qui vient d’avoir lieu à York est le synode d’Angleterre et n’a pas d’autorité en dehors de l’Angleterre, ni même au Pays de Galles ou en Ecosse. La Communion anglicane est formée de 38 provinces indépendantes, dont l’une est l’Angleterre. Plusieurs provinces ont déjà des femmes évêques. Au synode, il s’agissait d’introduire une loi qui le permette dans l’Eglise d’Angleterre, et le processus continuera sûrement, car la majorité le souhaite.

Une des grandes « défaites » de ce synode a été celle de la solution de compromis proposée par les archevêques de Canterbury et de York. Plusieurs analystes, après le vote, ont dit que la communion entre les anglicans était brisée. En est-il ainsi ?

La situation est très complexe, voire paradoxale. Si le compromis avait été accepté, on serait devant une situation où une paroisse ou un groupe, par exemple, pourrait refuser l’autorité de son évêque diocésain femme et se mettre sous l’autorité d’un autre évêque homme. Ainsi, cette paroisse ne serait pas en communion avec les paroisses du même diocèse. Cela équivaudrait, en quelque sorte, à un schisme structurel, même si on ne l’appelle pas comme ça.

En ce moment, il est impossible de procéder de cette manière, et la paroisse n’a pas d’autre choix que celui de rester en communion avec son évêque ou de sortir de l’Eglise d’Angleterre. En parlant de manière précise, cela provoquerait la perte de membres, mais pas un schisme dans l’Eglise d’Angleterre.

Lors de rencontres antérieures, le Vatican avait averti que la décision de consacrer des femmes évêques compromettrait le dialogue œcuménique avec l’Eglise catholique. Quelle est la situation actuelle de ce dialogue, après la décision du synode ?

Toutes les Eglises du premier millénaire, catholique, orientales et orthodoxes, affirment que seuls les hommes peuvent être ordonnés. Ces Eglises voient l’ordination des femmes comme un abandon illégitime de la « vraie tradition ».

Pour ce qui est du dialogue œcuménique, comme nous l’avons dit avant, certaines provinces ont depuis longtemps des femmes évêques, et le dialogue s’est poursuivi.

Naturellement, le dialogue doit tenir compte de cette situation, et reconnaître qu’un obstacle énorme s’est créé sur l’état d’avancement de ce dialogue, sur sa finalité vers une communion ecclésiale visible. Le dialogue catholique anglican se poursuivra à l’intérieur de ces paramètres.

Plusieurs informations soulignent la possibilité que les groupes traditionalistes acceptent l’Anglicanorum coetibus et entrent en communion avec l’Eglise catholique. On parle aussi d’un groupe de prêtres anglicans qui seraient entrés en contact avec un évêque catholique. Un mouvement en ce sens est-il prévisible ?

L’application concrète de ce qui est prévu dans l’Anglicanorum Coetibus est encore à voir. Quiconque professe la foi catholique et n’a pas d’empêchements peut demander d’entrer en communion avec l’Eglise catholique. Anglicans ou ex-anglicans peuvent entrer dans cette communion à la faveur d’une juridiction qui permet de conserver certains éléments de la tradition anglicane, mais ils peuvent aussi demander d’être tout simplement reçus dans la paroisse catholique locale.

Un problème particulier de discernement se pose quand il s’agit de groupes. Les groupes n’ont pas tous la même « consistance ecclésiale ». En définitive, il revient à la conférence épiscopale d’un pays ou d’une région de bien étudier ce qui peut se faire ou ne doit pas se faire. Je ne peux pas prévoir s’ils seront nombreux ou pas.

Ce qu’il faut rappeler c’est que ceux qui se définissent « anglicans traditionalistes » appartiennent en général à la partie évangélique de la Communion anglicane, et sont donc éloignés de l’Eglise catholique dans leurs convictions ecclésiologiques.

Avec quels sentiments le Saint-Siège, et en particulier le dicastère pour l’unité des chrétiens, accueille-t-il la décision du synode de York ?

Il ne faut pas en exagérer les effets. Nous sommes désolés que la Communion anglicane ait flanché sur ce point, abandonnant celle que nous considérons être la tradition essentielle de l’Eglise depuis ses origines, mais le processus s’est enclenché il y a longtemps.

Nous continuerons le dialogue oecuménique avec réalisme, en accueillant la situation telle qu’elle est, conscients du fait que le chemin à parcourir sera long et difficile, mais en sachant que le dialogue est néanmoins une tache que le Christ lui-même nous a confiée et que nous avons le soutien de l’Esprit Saint, âme de l’Eglise du Christ.

Propos recueillis par Inma Álvarez

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ZENIT Staff

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