Écouter la Parole pour la partager, par Mgr Francesco Follo

Méditation des lectures du dimanche 16 juillet 2023

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Avec l’invitation à se souvenir d’être comme Notre-Dame dans l’écoute, la compréhension, la garde et l’annonce de la Parole, malgré les difficultés.

XVe dimanche du Temps Ordinaire  – Année A – 16 juillet 2023

Is 55,10-11 ; Ps 64 ; Rm 8,18-23 ; Mt 13, 1-23

1) A l’écoute de la Parole

  Dans l’Evangile de ce dimanche, Jésus dit la parabole du semeur qui continue à semer dans le cœur des hommes parce qu’il a confiance en nous. Il sait que tôt ou tard l’homme ouvrira ses oreilles, ses yeux et son cœur à l’écoute et commencera une vie de partage constant avec le Christ, la Parole qui dit des paroles efficaces de vie éternelle.

  Il faut tenir compte de cette parole qui est efficace lorsque l’homme l’écoute, la comprend et agit en conséquence. Donc, pour que tout notre être soit ouvert à l’écoute de la parole de Jésus et qu’il devienne un écoutant docile et disponibles de la Parole qui sauve, faisons la prière suivante : « Fais, O Seigneur que j’écoute avec attention et que je me souvienne constamment de ton enseignement, que je le mette en pratique avec force et courage, en méprisant les richesses et en éloignant toutes les inquiétudes de la vie mondaine…. Fais que je me fortifie en tout, et que je médite tes paroles en m’enracinant profondément et en me purifiant de toutes les attaques mondaines. (St Jean Chrysostome, commentaire à l’Évangile selon Saint Mathieu, 44, 3-4).

  Si, en tant qu’« écouteurs » de la Parole, nous allons aujourd’hui chez le Christ, alors nous l’écouterons nous parler à partir d’une barque. Dans l’Evangile d’aujourd’hui, le Seigneur nous parle d’une barque. Sa cathèdre est un Bois qui navigue sur les eaux, image de la croix, à partir de laquelle Il est le maître de toutes les nations à du jour de sa passion, et attire chaque personne à Lui.

  Si nous naviguerons sur la mer de la vie attachés au bois de la Croix, l’Evangile d’ aujourd’hui résonnera en nous avec une grande efficacité, et la croix nous fera saisir le sens plus profond de ce que le Christ nous dit, à nous les pêcheurs sauvés des eaux du mal.
Si nous sommes de vrais « écouteurs » de la Parole, nous devons écouter de façon « pas naïve »,  comme celui qui attend du Christ la résolution de ses problèmes contingents, ou qui réorganise sa vie selon les petits désirs humains et non selon le cœur qui désire l’ infini.
Celui qui n’est pas mature accueille avec joie la Parole mais, à cause de sa hâte pour faire de l’ordre dans sa vie quotidienne, il ne s’aperçoit pas que sa vie est crucifiée et qu’elle le met en croix dans le Christ qui l’accueille. Les paroles du Rédempteur sont des paroles de vie parce que, à travers la croix, elles nous purifient de chaque œuvre morte et nous unissent au christ crucifié, Parole d’amour et de vérité. Cette Parole a besoin d’un lieu (notre cœur), a besoin de descendre au fond et d’y mourir comme une semence, pour pouvoir s’enraciner, germer, croître, et résister aux tempêtes et aux intempéries, comme une maison construite sur le roc.

  Dans la maison construite sur le roc, la Parole n’est pas étouffée pas les préoccupations et peut croître parce qu’ elle a de l’ espace et de l’ air. En elle, le cœur n’est pas dissipé dans les choses du monde, il s’élargit, il est magnanime et accueillant. L’écoute mature et sincère, empêche l’adultère du cœur. C’est l’adultère du cœur est celui qui a rendu difficile l’histoire du peuple d’Israël, et qui a empêché à la Parole de l’alliance de s’accomplir. La chair, la corruption de ce monde, a rendu impossible l’accomplissement de la Loi.

  La Parole de la croix est folie et scandale pour les intelligents et les savants de ce monde. Ils ne la comprennent pas. Ils écoutent mais c’est comme s’ils ne l’écoutaient pas. Leurs critères sont différents ainsi que, leur propre justice, leurs propres œuvres. Les scribes et les pharisiens ne peuvent « écouter » la Parole de Jésus parce qu’ils sont enfermés en eux-mêmes, par leurs propres préjudices, et par leur présomption d’avoir bien compris comment l’on vit, et d’avoir identifié les comportements justes pour bien vivre.

  Ils pensent que c’est un problème de bon sens et de bon cœur. Non, au contraire, c’est plutôt une question de cœur bon, et de sens de la vie, entendue comme direction et signification de la vie selon l’esprit et le cœur du Christ.

  Ceci est la réalité, la vérité. Si nous ne sommes pas convertis, nous sommes tous ces terrains dont parle l’Evangile d’aujourd’hui. Ces terrains rendent difficiles, sinon impossible, le rapport entre la Parole et notre vie. Mais l’Evangile d’aujourd’hui est vraiment une Bonne et Joyeuse Nouvelle. Le Seigneur nous dit que nous sommes heureux parce que nous voyons et nous écoutons ce que les prophètes n’ont ni vu ni entendu. Nous sommes heureux parce que le mystère du Règne de Dieu, Amour miséricordieux et prévoyant nous a été révélé.

 

  2) La virginité et la conception de la Parole (comme « concevoir » un enfant)

  La Parole que le Christ sème en nous se heurte souvent à l’aridité de notre cœur et elle risque de rester stérile même lorsqu’elle est écoutée. En conséquence, nous devons demander à Dieu la grâce de libérer le terrain de notre cœur, de le libérer de la paresse, des incertitudes et de toutes les peurs qui peuvent le freiner. De cette façon, la Parole du Seigneur sera mise en pratique de façon authentique et joyeuse.

  Le cœur de chacun de nous est le champ de la foi. C’est dans notre vie quotidienne que le Rédempteur demande d’entrer avec sa Parole, avec sa Présence.

  La chose à reconnaître avec humilité est que nous sommes chemin, cailloux et épines. –  le vrai danger dans la vie est de ne pas se rendre compte de cette réalité. Notre chair est incapable – à elle seule- d’avoir la vie qui dure. Pour cela, Dieu a envoyé son Fils unique avec une chair semblable à la nôtre pour qu’Il fasse de nous la terre fertile capable d’accueillir la Parole de salut et de la faire germer dans le monde.

  La Croix a labouré la chair du Seigneur, les clous et les épines, la lance et le vinaigre ont complété le travail dans la « terre » du Christ.

  C’est pour cela, que notre vie est sauvée dans notre croix de tous les jours.
Les blessures physiques ou spirituelles que nous subissons chaque jour, si elles sont
mises sur la Croix, deviennent les portes à travers lesquelles la Parole de Dieu peut entrer en nous. Lorsque nous partageons l’amour crucifié de Jésus, sa Parole descend sur nous, pénètre jusqu’au fond, s’enracine et donne des fruits abondants dans chaque situation. La Parole crucifiée donne les fruits de la croix : l’amour et la miséricorde, les plaies glorieuses du Seigneur, le sang et l’eau, la vie sur la terre et la vie éternelle.

  Un exemple de cet amour crucifié nous est donné par les vierges consacrées dont le don d’elles-mêmes devient fécond à partir de l’écoute. Ces femmes nous témoignent combien il est sage de vivre une vie dédiée à la recherche de Dieu à partir de l’écoute qui commence à être féconde dans l’annonce de sa Parole : « Faciem tuam, Domine, requiram » : je cherche Ton visage, Seigneur, (Ps 26, 8).

  La vie consacrée est dans le monde et dans l’Eglise un signe visible de cette recherche du visage du Seigneur et des chemins qui mènent à Lui (cf. Jn 14.8). La personne consacrée témoigne donc de l’engagement, joyeux et en même temps, laborieux en même temps, de la recherche assidue et savante de la volonté divine « (cf. Congrégation pour les Instituts de vie consacrée et de la société de vie apostolique : Instruction Le service de l’autorité et l’obéissance, Faciem Domine, requiram, 11 mai 2008 n° 1)

  En étant auditrices assidues de la Parole, elles acquièrent la sagesse, parce que chaque sagesse de vie nait de la Parole du Seigneur. Le magistère pontifical les invite à être scrutatrices de la Parole, à travers la lecture fréquente de la Bible, la Lectio Divina parce la vie consacrée « nait de l’écoute de la Parole de Dieu et qu’elle accueille l’Evangile comme sa norme de vie. Vivre à la suite du Christ, chaste, pauvre et obéissant est une « exégèse » vivante de la Parole de Dieu. L’Esprit Saint qui a inspiré la Bible est le même que celui qui illumine les consacrées d’une lumière nouvelle ». (Exhortation Apostolique post synodale Verbum Domini,83). Grâce à l’Esprit Saint les vierges consacrées vivent une dimension prophétique qui leur permet de concevoir la Parole et de l’annoncer.

Lecture Patristique
Saint Grégoire le Grand (+ 604)
Homélies sur l’Évangile, 1, 15, 1-24,
PL 76, 1131-1133

Le texte de saint Grégoire, que l’homéliaire propose comme commentaire de l’évangile de Matthieu, explique en fait la parabole telle qu’elle est rapportée dans l’évangile de Luc (Lc 8,4-15).
L’évangile que vous venez d’entendre n’appelle pas d’explication, mais une recommandation. En effet, la Vérité elle-même en a fourni une explication que la faiblesse humaine ne se hasarde pas à discuter. Cependant, en rapport avec l’explication qu’en donne le Seigneur, vous devez examiner avec attention le point suivant: si je vous avais dit que la semence représente la parole, le champ le monde, les oiseaux les démons, et les épines les richesses, vous auriez peut-être, dans le secret de votre cœur, hésité à me croire. Aussi bien le Seigneur a-t-il daigné expliquer lui-même ce qu’il venait de dire, pour que vous soyez capables de rechercher également la signification des paroles qu’il n’a pas voulu expliquer lui-même.

Qui donc m’aurait cru si j’avais avancé que les épines figurent les richesses, d’autant plus que les premières sont acérées et les secondes agréables. Les richesses sont pourtant bien des épines, puisque les soucis qu’elles entraînent avec elles déchirent l’âme de leurs pointes et, après l’avoir poussée au péché, la laissent couverte de sang, comme par une blessure. D’après un autre évangéliste qui rapporte la même parabole, le Seigneur ne les appelle pas richesses mais, avec raison, richesses trompeuses (cf. Mt 13,22). Elles le sont, en effet, puisqu’elles ne peuvent demeurer longtemps en notre possession et qu’elles ne font pas disparaître la pauvreté de notre âme.
Car les seules vraies richesses sont celles qui nous enrichissent de vertus. Aussi, frères bien-aimés, si vous désirez vous enrichir, aimez les vraies richesses. Si vous cherchez à parvenir au sommet de l’honneur véritable, avancez-vous vers le Royaume céleste. Si vous affectionnez la gloire que procure un rang élevé, hâtez-vous de vous enrôler dans la céleste cour des anges.
Après avoir écouté les paroles du Seigneur, retenez-les dans votre âme, car la parole de Dieu est la nourriture de l’âme. La parole que l’on écoute sans la conserver dans les profondeurs de la mémoire, ressemble à une nourriture avalée, puis rejetée par un estomac malade. Aussi bien, celui qui ne garde pas les aliments n’a absolument aucun espoir de vivre. Si donc, après avoir reçu la nourriture de la sainte exhortation, vous ne gardez pas en mémoire les paroles de vie, qui sont les aliments de la justice, craignez le péril de la mort éternelle.

  Veillez dès lors à ce que la parole que vous avez reçue résonne au fond de votre cœur et y demeure. Prenez garde que la semence ne tombe le long du chemin, de crainte que l’Esprit mauvais ne vienne enlever la parole de votre mémoire. Prenez garde que le sol pierreux ne reçoive la semence et ne produise une bonne action dépourvue des racines de la persévérance. Beaucoup, en effet, se réjouissent en entendant la parole, et se disposent à entreprendre de bonnes œuvres. Mais à peine les épreuves ont-elles commencé à les assaillir qu’ils renoncent à ce qu’ils avaient entrepris. Ainsi, le sol pierreux a manqué d’eau, si bien que le germe de la graine n’est pas parvenu à donner le fruit de la persévérance.

  Mais la bonne terre donne du fruit par la patience: entendons par là que nos bonnes œuvres ne peuvent avoir aucune valeur si en outre nous ne supportons pas patiemment les désagréments que nous cause notre prochain. D’ailleurs, plus nous avançons vers la perfection, plus nous avons à endurer de souffrances ici-bas. En effet, une fois que notre âme a abandonné l’amour du monde présent, l’hostilité de ce monde grandit. Voilà pourquoi nous en voyons beaucoup peiner sous un lourd fardeau, alors que leurs œuvres sont bonnes. Ils ont, il est vrai, déjà renoncé aux convoitises terrestres, et pourtant ils sont affligés de très cruelles épreuves. Mais, selon la parole du Seigneur, ils portent du fruit par leur constance (Lc 8,15), en supportant humblement ces épreuves, si bien qu’après avoir souffert, ils seront invités à entrer dans la paix du ciel.

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Mgr Francesco Follo

Mgr Francesco Follo est ordonné prêtre le 28 juin 1970 puis nommé vicaire de San Marco Evangelista à Casirate d’Adda de 1970 à 1976. Il obtient un doctorat en Philosophie à l’Université pontificale grégorienne en 1984. De 1976 à 1984, il travaille comme journaliste au magazine Letture du Centre San Fedele de la Compagnie de Jésus (jésuites) à Milan. Il devient membre de l’Ordre des journalistes en 1978. En 1982, il occupera le poste de directeur-adjoint de l’hebdomadaire La Vita Cattolica. De 1978 à 1983, il est professeur d’Anthropologie culturelle et de Philosophie à l’Université catholique du Sacré Cœur et à l’Institut Supérieur des Assistant Educateurs à Milan. Entre 1984 à 2002, il travaille au sein de la Secrétairerie d’Etat du Saint-Siège, au Vatican. Pendant cette période il sera professeur d’Histoire de la Philosophie grecque à l’Université pontificale Regina Apostolorum à Rome (1988-1989). En 2002, Mgr Francesco Follo est nommé Observateur permanent du Saint Siège auprès de l’UNESCO et de l’Union Latine et Délégué auprès de l’ICOMOS (Conseil international des Monuments et des Sites). Depuis 2004, Mgr Francesco Follo est également membre du Comité scientifique du magazine Oasis (magazine spécialisé dans le dialogue interculturel et interreligieux). Mgr Francesco Follo est Prélat d’Honneur de Sa Sainteté depuis le 27 mai 2000.

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