Le cardinal Mauro Piacenza, s’adressant au Saint-Père

Le cardinal Mauro Piacenza, s’adressant au Saint-Père

Le pape s’adresse aux participants à la formation sur le for interne

Pour faire circuler dans les veines de l’Église la sève de la Miséricorde

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Discours intégral -Traduction de l’italien par Zenit

 

DISCOURS DU SAINT-PÈRE

AUX PARTICIPANTS DU COURS SUR LE FOR INTERNE

ORGANISÉ PAR LA PÉNITENCERIE APOSTOLIQUE

 

Chers confrères, soyez les bienvenus !

Merci d’être venus assister à la formation annuelle sur le for interne, organisée par la Pénitencerie apostolique, pour sa XXXIIIe édition. Je remercie le cardinal Mauro Piacenza, Pénitencier majeur, pour ses aimables paroles et pour son action ; ainsi que Mgr Nykiel, Régent de la Pénitencerie apostolique, qui se donne tant de mal, aux prélats, aux fonctionnaires et au personnel de la Pénitencerie, – merci à tous ! – aux Collèges des pénitenciers des basiliques papales et à vous tous qui participez au cours.

Depuis plus de trois décennies, la Pénitencerie apostolique offre ce moment important et précieux pour permettre la formation de bons confesseurs, pleinement conscients de leurs responsabilités au service des pénitents.

Je renouvelle au Pénitencier ma gratitude et mon encouragement à poursuivre cet engagement de formation, qui fait tant de bien à l’Église parce qu’elle aide à faire circuler dans ses veines la sève de la miséricorde. Il est bon de le souligner. Le cardinal l’a répété de nombreuses fois : la sève de la miséricorde.

Si quelqu’un ne se sent pas capable de transmettre la miséricorde reçue de Jésus, il ne doit pas confesser. Dans l’une des basiliques papales, par exemple, j’ai dit au cardinal : « Il y en a un qui écoute et réprimande, qui réprimande et qui vous donne ensuite une pénitence que vous ne pouvez pas faire… » S’il vous plaît, cela ne va pas. Miséricorde ! Vous êtes là pour pardonner et adresser une parole pour que le pénitent puisse être renouvelé, régénéré par le pardon. Vous êtes là pour pardonner : gardez cela dans votre cœur.

L’exhortation apostolique Evangelii gaudium affirme que « L’Église en sortie, (…) pour avoir expérimenté la miséricorde du Père et sa force de diffusion, vit un désir inépuisable d’offrir la miséricorde. » (24). Il existe donc un lien inséparable entre la vocation missionnaire de l’Église et l’offre de la miséricorde à tous les hommes. En vivant de miséricorde et en l’offrant à tous, l’Église se réalise et accomplit son action apostolique et missionnaire. Nous pourrions presque dire que la miséricorde est incluse dans les « notes » caractéristiques de l’Église, en particulier elle fait resplendir la sainteté et l’apostolicité.

Depuis toujours, l’Église, avec des styles différents selon les époques, a exprimé cette « identité de la miséricorde », qui s’adresse à la fois au corps et à l’âme, désirant, avec son Seigneur, le salut intégral de la personne. Ainsi l’œuvre de la miséricorde divine coïncide ainsi avec l’action missionnaire de l’Église, avec l’évangélisation, parce qu’elle laisse transparaître le visage de Dieu, comme Jésus nous l’a montré.

C’est pourquoi il n’est pas possible, surtout en cette période de Carême, de relâcher l’attention sur l’exercice de la charité pastorale, qui s’exprime de manière tangible et durable, qui s’exprime de façon concrète et éminente, précisément dans une grande disponibilité des prêtres, sans réserve, à l’exercice du ministère de la réconciliation.

La disponibilité du confesseur se manifeste dans certaines attitudes évangéliques. Tout d’abord en accueillant toutes les personnes sans préjugés, car seul Dieu sait ce qui peut faire agir la grâce dans les cœurs, à tout moment ; ensuite dans l’écoute de nos frères avec l’oreille du cœur, blessé comme le cœur du Christ ; dans l’absolution des pénitents, en dispensant généreusement le pardon de Dieu ; dans l’accompagnement du chemin de pénitence, sans le forcer, au rythme des fidèles, avec patience et dans une prière constante.

Pensons à Jésus qui, devant la femme adultère, choisit de se taire pour lui éviter d’être condamnée à mort (cf. Jn 8, 6) ; de même, le prêtre dans le confessionnal aime le silence, qu’il ait le cœur magnanime, sachant que chaque pénitent le rappelle à sa propre condition personnelle : être pécheur et ministre de la miséricorde. C’est votre vérité ; si quelqu’un ne se sent pas pécheur, s’il vous plaît, qu’il n’aille pas au confessionnal : pécheur et ministre de la miséricorde vont de pair. Cette prise de conscience permettra d’éviter que les confessionnaux ne restent abandonnés et que les prêtres ne manquent de disponibilité. La mission évangélisatrice de l’Église passe en grande partie par la redécouverte du don de la confession, y compris à l’approche du Jubilé de 2025.

Je pense aux projets pastoraux des Églises locales, dans lesquels le ministère de la réconciliation sacramentelle doit avoir sa juste place. Je pense en particulier aux confessionnaux de chaque cathédrale, aux confessionnaux des sanctuaires ; je pense surtout à la présence régulière d’un confesseur, avec des créneaux horaires suffisants, dans chaque secteur pastoral, ainsi que dans les églises desservies par des communautés religieuses, qu’il y ait toujours un confessionnal en service. Jamais de confessionnaux vides ! « Mais, me direz-vous, les gens ne viennent pas ». Sollicitez, priez, mais attendez, ils viendront !

Si la miséricorde est la mission de l’Église – et c’est la mission de l’Église ! – nous devons faciliter au maximum l’accès des fidèles à cette « rencontre d’amour », en y veillant dès la première confession des enfants et en étendant ce sacrement aux lieux de soins et de souffrance. Si l’on ne peut plus faire grand-chose pour guérir le corps, on peut et on doit faire beaucoup pour la santé de l’âme ! En ce sens, la confession individuelle est la voie privilégiée à suivre, car elle favorise la rencontre personnelle avec la miséricorde divine, que tout cœur repentant attend. Tout cœur repentant attend la miséricorde. Dans la confession individuelle, Dieu veut caresser personnellement chaque pécheur de sa miséricorde : le Pasteur, lui seul, connaît et aime chacune de ses brebis, surtout les plus faibles et les plus blessées. Les célébrations communautaires devraient être encouragées en certaines occasions, sans renoncer aux confessions individuelles comme forme ordinaire de célébration du sacrement.

Dans le monde, nous le voyons malheureusement tous les jours, les foyers de haine et de violence ne manquent pas. Nous, confesseurs, devons alors multiplier les « foyers de miséricorde ». N’oublions pas que nous sommes dans un combat surnaturel, un combat qui apparaît particulièrement virulent à notre époque, même si nous connaissons déjà l’issue finale de la victoire du Christ sur les puissances du mal. La lutte, cependant, est toujours en cours et la victoire se réalise vraiment à chaque fois qu’un pénitent est absous. Rien ne chasse et ne vainc le mal plus que la miséricorde divine.

À ce propos, je voudrais vous dire quelque chose : Jésus nous a enseigné qu’il ne faut jamais converser avec le diable, jamais ! Lors de la tentation au désert, il a répondu par la Parole de Dieu, mais il n’a pas dialogué avec le diable. Dans le confessionnal, soyez prudents : ne négociez jamais avec le « mal », jamais ; présentez ce qui est juste pour le pardon et ouvrez quelques portes pour vous permettre de progresser, mais ne soyez jamais un psychiatre ou un psychanalyste ; s’il vous plaît, ne vous engagez pas dans ces choses-là ! Si l’un d’entre vous a cette vocation, qu’il l’exerce ailleurs, mais pas au tribunal de la pénitence. C’est un dialogue qu’il n’est pas opportun d’avoir au moment de recevoir la miséricorde du Seigneur. Là, tu dois seulement penser au pardon et à la manière de « faire entrer » le pardon : « Es-tu repentant ?  – « Non » – « Mais cela ne te coûte pas ? » – « Non » – « Mais voudrais-tu quand même te repentir ? » – « J’aimerais bien. » Une porte s’ouvre, il faut chercher cette porte pour accéder au pardon. Et lorsque l’on ne peut pas entrer par la porte, on entre par la fenêtre : il faut toujours chercher à accéder au pardon. Avec un pardon magnanime ; « que ce soit la dernière fois, la prochaine fois je ne te pardonnerai pas » : non, pas comme cela. Aujourd’hui c’est mon tour, à trois heures le confesseur vient me voir !

Autre chose : il faut penser que Dieu pardonne en abondance. Je l’ai dit l’année dernière, mais je veux le répéter. Il y a quelques années, un spectacle a été présenté sur le fils prodigue, adapté à la culture d’aujourd’hui, où le jeune homme raconte ses aventures et comment il s’est éloigné de la maison. À la fin, il se confie à un ami, à qui il dit qu’il a la nostalgie de son père et qu’il veut rentrer chez lui. L’ami lui conseille d’écrire à son père en lui demandant s’il veut le revoir et, dans l’affirmative, de mettre un mouchoir blanc à une fenêtre de la maison : ce sera le signal qu’il sera reçu. Le spectacle se poursuit et, lorsque le jeune homme approche de la maison, il la voit remplie de mouchoirs blancs. Le message est le suivant : l’abondance. Dieu ne dit pas : « Seulement ceci… », il dit : « Tout ! » Dieu est-il naïf ? Je ne sais pas s’il est naïf, mais il est généreux : il pardonne toujours plus, toujours ! J’ai connu de bons confesseurs et le bon confesseur sait toujours comment y arriver.

Chers frères, je sais que demain, à la fin de cette formation, vous participerez à une célébration pénitentielle. C’est une chose bonne et utile : accueillir et célébrer en personne le don que nous sommes appelés à apporter à nos frères et sœurs ; expérimenter la tendresse de l’amour miséricordieux de Dieu. Il ne se lasse jamais de nous montrer son amour miséricordieux. Il ne se lasse jamais de pardonner. C’est nous qui nous fatiguons de demander pardon, mais lui ne se lasse jamais.

Je vous accompagne de ma prière et je remercie la Pénitencerie apostolique pour le travail qu’elle accomplit inlassablement en faveur du sacrement du pardon. Je vous invite à redécouvrir, à approfondir théologiquement et à diffuser pastoralement – également en vue du Jubilé – ce prolongement spirituel de la miséricorde que sont les indulgences, selon la volonté du Père céleste de nous avoir toujours et seulement avec lui, tant dans cette vie que dans la vie éternelle.

Merci pour votre engagement quotidien et pour les fleuves de la miséricorde que, comme d’humbles canaux, vous déversez et déverserez dans le monde, pour éteindre les feux du mal et allumer le feu de l’Esprit Saint. Je vous bénis tous de tout cœur. Et je vous demande, s’il vous plaît, de prier pour moi. Je vous remercie.

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Rédaction

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