Le cardinal Bertone dénonce la « partialité » du film sur Jean-Paul Ier diffusé par la RAI

ROME, Vendredi 27 octobre 2006 (ZENIT.org) – Le film « Le pape Luciani – le sourire de Dieu » sur la vie et la mort de Jean-Paul Ier, transmis les 23 et 24 octobre par la télévision italienne RAI Uno et vu par plus de dix millions de téléspectateurs, a suscité un véritable débat.

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Dans un entretien publié jeudi 26 octobre par le quotidien italien « Avvenire », le cardinal Tarcisio Bertone, secrétaire d’Etat, a émis certaines critiques.

Le cardinal Bertone a notamment démenti le fait que Jean-Paul Ier ait été contraire à l’encyclique Humanae Vitae, et déclaré sans fondement l’information selon laquelle sœur Lucie, la voyante de Fatima, aurait prédit au cardinal Albino Luciani qu’il serait devenu pape et que son pontificat aurait été très bref. Le secrétaire d’Etat déplore par ailleurs la manière « déformée » dont est présentée la Curie romaine et le fait que le film présenté en avant-première au pape Benoît XVI ait été une version réduite du film.

A un moment donné, le film présente le cardinal Luciani qui conteste l’encyclique de Paul VI Humanae Vitae. Le cardinal Bertone affirme : « Il me semble que le film n’a pas souligné clairement le fait que le pape Luciani, bien que doux et humble, était aussi ‘fort dans la foi’, ‘ferme dans les principes’ et ‘fidèle à la tradition’. Pour cette raison, le temps consacré à ses soi-disant ouvertures sur des questions délicates de morale sexuelle, qui seraient de toute façon à dater avant l’encyclique Humanae Vitae qu’il a, que je sache, soutenue sans réserve, m’a semblé exagéré. A ce sujet, d’autres ont par ailleurs rappelé que le patriarche Luciani avait dissout la FUCI (Fédération Universitaire Catholique Italienne, ndlr) de Venise, car celle-ci s’était prononcée en faveur du ‘oui’ au référendum sur le divorce de 1974, s’opposant aux indications qui faisaient autorité de la Curie romaine. Cet épisode n’apparaît cependant pas dans le film ».

Pour ce qui concerne la Curie, décrite dans le film comme hostile et conspiratrice, le cardinal Bertone affirme : « Je comprends que dans tout bon film, il faille toujours opposer la figure du méchant ou des méchants à celle du bon (…). Et ainsi, parmi les méchants nous avons retrouvé l’immanquable archevêque Paul Marcinkus, quelques cardinaux et un peu toute la Curie ».

« Personnellement, j’ai été frappé par le portrait négatif – et injuste ! – qui a été fait du secrétaire d’Etat de l’époque, le cardinal Jean Villot, et de mon grand prédécesseur à Gênes, le cardinal Giuseppe Siri. Raconter la Curie romaine à l’époque du pape Luciani, comme un groupe d’ecclésiastiques qui n’auraient rien eu d’autre à faire que mettre des bâtons dans les roues au nouveau pape, m’a semblé injuste à l’égard de la Curie, de l’Eglise catholique tout entière et même du pape Luciani lui-même ».

Concernant la mort subite du pape Jean-Paul Ier, après à peine 33 jours de pontificat, l’image s’arrête sur la tasse de café comme pour laisser planer le doute, indiquant que c’est là que réside le secret de la mort prématurée du pape. A ce sujet, le cardinal Bertone déclare : « Ceci, franchement, m’a semblé une chute de style que l’on aurait pu nous épargner, tout en respectant la liberté d’expression artistique qui est et doit être garantie à tous. Lancer une allusion aussi lourde, comme s’il s’agissait d’un commentaire obligatoire, m’a semblé déplacé. Egalement parce qu’il n’existe aucun élément sérieux et sûr pouvant conduire à ce type de conclusion, comme l’a par ailleurs répété son frère (du pape Luciani, ndlr) Edoardo ».

L’intrigue du film se base en grande partie sur la rencontre à Coïmbre, entre le cardinal Luciani et sœur Lucie qui dans le film annonce au patriarche de Venise qu’il serait devenu pape et que son pontificat aurait été très bref.

Le cardinal Bertone – qui connaissait très bien sœur Lucie – affirme à ce sujet : « Il s’agit d’une thèse ancienne mais privée de fondement. Je me souviens très bien que le 9 décembre 2003 je me suis rendu à Coïmbre où j’ai célébré la messe pour la communauté des carmélites, et que j’ai eu l’occasion de parler quelques heures avec sœur Lucie. A cette occasion, j’ai évoqué avec elle les relations qu’elle avait eues avec Jean-Paul Ier. Je l’ai déjà dit et je le répète : sœur Lucie, désignant le banc où ils s’étaient assis et où ils avaient longuement parlé, me déclara que de sa part il n’y avait eu aucune prédiction concernant Albino Luciani. Elle s’était seulement exclamée, devant la communauté, après son départ : « S’il devenait pape, cela ne me déplairait pas ! ». Par ailleurs, Albino Luciani lui-même a rédigé un rapport de cette rencontre dans lequel il n’est fait aucune mention de telles prophéties.

Le frère de Jean-Paul Ier dénonce quant à lui, toujours dans les colonnes de « l’Avvenire » du 26 octobre, les soi-disant intrigues du Vatican contre le pape Luciani, qui ne sont, affirme-t-il, que des « stupidités ».

Le directeur du Centre Pape Luciani, Mgr Giorgio Lise, dénonce également le fait que le film sous-entende que la mort de Jean-Paul Ier n’ait pas été une mort naturelle. Il affirme que lorsque l’entourage du pape a découvert qu’il n’était plus en vie, « la tasse de café était encore pleine et c’est ce qui a surpris sœur Vincenza ».

Le directeur du Centre parle non seulement d’« interprétation forcée » mais de « déformation de la vérité historique ».

Concernant le secrétaire d’Etat de l’époque, Edoardo Luciani affirme : « Mon frère appréciait beaucoup le cardinal Villot. Il l’appréciait tant qu’il me l’a dit directement ». Il raconte que son frère « a prié presque jusqu’aux larmes pour que le cardinal Villot reste à son poste » et ne se retire pas dans un monastère en France.

Edoardo Luciani précise par ailleurs que contrairement à ce que le film lui fait dire, il n’est pas lui non plus contre l’encyclique Humanae Vitae : « J’ai dix enfants et je n’avais absolument rien contre notre Mère l’Eglise. Cette partie du film… ne correspond absolument pas à la réalité ».

La nièce de Jean-Paul Ier, Pia Luciani déplore quant à elle dans les colonnes du « Corriere della Sera » du 25 octobre, le fait que ni l’acteur qui joue le rôle du pape Luciani, ni le metteur en scène du film, n’ait pris contact avec elle ou avec son père.

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ZENIT Staff

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