Lazare, 29 mai 2020 © Facebook de Lazare

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Dialogue du pape avec «Lazare» : « Parfois, il faut toute une vie pour pardonner » (3)

« L’important, c’est de marcher sur les chemins du pardon »

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« Parfois, il faut toute une vie pour pardonner », explique le pape François en visioconférence avec les colocataires de l’Association « Lazare ».

Une délégation de l’association d’origine française et aujourd’hui européenne, accompagnée de l’archevêque émérite de Lyon, le cardinal Philippe Barbarin, est venue lui rendre visite à la maison Sainte-Marthe, le 29 mai 2020. Durant cette rencontre le pape a dialogué avec les différentes « colocations » de Lazare dans le monde, en visioconférence.

Les Colocataires de « Lazare » ont posé au pape François 10 questions. Voici la traduction, faite par « Lazare », de sa réponse à la 5e question, sur le pardon.

Le pape invite notamment à penser à toutes les fois où nous-même nous avons été pardonnés: « Je pense: « Il m’a pardonné, Dieu m’a pardonné ceci, cette personne m’a pardonné cela, la société m’a pardonné ceci ; je devrais donc pardonner ! » Ce raisonnement m’aide beaucoup. »

Les premiers échanges (questions 1-3) sont ici.

Le second volet, sur la dignité (question 4), est ici.

AB

Le pardon (5e question)

Félicie de Vaumoise – Très Saint Père, bonjour et merci beaucoup. Nous avons un coloc qui a connu plusieurs années de galère. Il a perdu confiance en Dieu et dans les hommes. Comment peut-il garder l’Esperance et réussir à pardonner ?

Pape François – Je commence par la fin : le pardon. Le pardon est une chose très difficile. J’ai 83 ans, et je ne peux toujours pas pardonner certaines choses. Je demande la grâce de pouvoir le faire. Permettez-moi de vous dire que c’est un défaut de fabrication que nous avons : l’incapacité de pardonner. Parce que la haine, le ressentiment, le fait de ne pas pouvoir pardonner est une richesse. Mais une mauvaise richesse ! Une richesse qui ne t’enrichit pas. Mais nous devons malheureusement vivre avec cette limite pendant longtemps, jusqu’à ce que notre cœur change. Cela m’aide de penser à toutes les fois où j’ai été pardonné. Je pense « Il m’a pardonné, Dieu m’a pardonné ceci, cette personne m’a pardonné cela, la société m’a pardonné ceci ; je devrais donc pardonner ! » Ce raisonnement m’aide beaucoup. Mais c’est une pensée qui doit s’infiltrer dans la conscience comme une eau de pluie douce et tranquille. Et parfois, il faut toute une vie pour pardonner.

C’est pourquoi ce qui est important c’est de marcher sur les chemins du pardon. C’est à dire, de marcher sur le chemin de la confiance en l’idée que j’ai été pardonné. Et de marcher sur ce même chemin en demandant la capacité de pouvoir pardonner. Lorsque nous prions le Notre Père, nous disons : « Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés. » C’est comme un billet aller-retour. Pardonner pour être pardonné. Je suis pardonné, cela me remplit de joie et me conduit à pardonner. Et cela prend toute une vie. C’est un chemin humble et tranquille mais qui guérit le cœur. C’est ce que j’ai à vous dire à propos du pardon.

Et d’ailleurs, je vais sortir de la question. J’ai trois mots magiques qui me viennent à l’esprit. Quand les jeunes mariés viennent ici pour rendre visite au Pape, ils me demandent : « Comment pouvons-nous bien vivre la vie de couple ? Je leur dis : « Eh bien, il y a trois mots magiques, que vous devez dire et vivre chaque jour. Premièrement : s’il te plait, est-ce que peux ? Le deuxième : merci. Et le troisième : pardon. Le premier : demander la permission pour ne pas être envahissant dans la vie conjugale. Le deuxième – merci – parce que la gratitude ouvre le cœur des époux. Soit dit en passant : vous, vous avez vu que, dans la vie, il y a des gens qui ne savent pas dire merci. Et le troisième mot : pardon pour quelque chose que j’ai fait de mal, ou parce que je me suis mal comporté, ou après une dispute. Et ils me disent tous : « Le troisième mot est le plus difficile ». Et parfois, je demande à l’un ou l‘autre : « Pourquoi est-ce difficile ? » « Parce que ce n’est pas impossible que nous ayons eu une dispute aujourd’hui. » Mais je leur dis : « C’est normal de se disputer dans le mariage. Et c’est aussi normal de se disputer chaleureusement. Et si parfois, les assiettes volent, c’est aussi normal. Mais à une condition : que l’on fasse la paix avant la fin de la journée. Cela signifie : demander pardon. « Oui Père, mais j’ai honte de demander pardon. Je ne sais pas comment faire ! » Fais-le sans paroles ! Par une caresse, et c’est tout ! Il est important de faire la paix avant de s’endormir car la Guerre Froide du lendemain est très dangereuse.

« C’est pour ça que c’est si difficile de s’excuser », disent-ils.

Mais il y a une autre condition. Lorsque vous vous disputez, ne le faites jamais devant les enfants ! Vous ne pouvez pas imaginer l’angoisse qu’un enfant ressent lorsqu’il voit ses parents se disputer. Il y a un film italien – un vieux film maintenant – de Vittorio de Sica. Il s’appelle : I bambini ci guardano. Il s’appelle : « Les enfants prennent soin de nous ». Mais j’ai fait une digression. Revenons au pardon. Le pardon est un chemin qui dure toute la vie. J’ai beaucoup parlé.

(à suivre!)

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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