« La solennité d’aujourd’hui ne célèbre pas une idée abstraite, mais un mystère et un fait historique : Jésus-Christ, personne divine, né de la Vierge Marie qui est sa vraie Mère ».
Dans sa méditation des textes de la liturgie de ce dimanche 1er janvier 2023, solennité de la Bienheureuse Vierge Marie Mère de Dieu, Mgr Francesco Follo, observateur permanent du Saint-Siège à l’Unesco, invite à s’émerveiller devant le mystère de l’Incarnation avec Marie, Mère de Dieu et Mère de Jésus :
« Avec les yeux de Marie, contemplons le Fils de Dieu né homme pour l’homme et confié aux soins de sa mère », « à l’école du regard de Marie, surpris par la joie, nous pouvons cueillir par le cœur ce que nos yeux et notre esprit seuls ne parvient ni à percevoir, ni à contenir. »
Mère du Dieu de la Paix, Pain de Vie à partager dans l’actuelle famine de paix
Solennité de Ste Marie, Mère de Dieu (Ier Dimanche après Noël) – Année A – 1er janvier 2023
Nm 6, 22-27; Ps 66; Gal 4,4-7; Lc 2,16-21)
1) Bénie par le Fruit béni
Il y a huit jours, nous avons célébré la naissance, à Bethléem, du Fils de Dieu qui “s’est fait enfant pour nous faire devenir hommes” (Saint Ambroise). Aujourd’hui, une semaine après la naissance de Jésus, la liturgie nous invite à célébrer la Vierge Marie en tant que Mère de Dieu : celle « qui a donné à la lumière le Roi qui gouverne le ciel et la terre pour les siècles éternellement » (Antienne d’entrée de la Messe d’aujourd’hui). La liturgie nous fait méditer aujourd’hui sur le Verbe fait homme, et répète qu’il est né de la Vierge. Il est le « fruit béni des entrailles » de cette Vierge qui trouva en ce « fruit » tout ce qu’Ève avait désiré en mangeant le fruit mais qu’elle ne trouva pas. En fait, dans son fruit, Ève désira trois choses que le diable lui avait faussement promises, c’est-à-dire de 1) devenir comme Dieu et être conscient du bien et du mal, 2) d’avoir le plaisir parce que ce fruit était « bon à manger », 3) d’avoir la beauté parce que ce fruit était si beau à voir.
En mangeant le fruit défendu, Ève a enfreint l’image et la ressemblance à Dieu. Dans le fruit béni de son sein, Marie, et avec elle tous les chrétiens, a trouvé ce que Ève cherchait : l’union à Dieu à travers le Christ et la ressemblance avec Lui. Ève cherchait le plaisir et la joie, mais elle a trouvé la douleur et la nudité. Dans le fruit du sein de la Vierge nous trouvons grâce et salut : celui qui mangera ce fruit aura la vie éternelle.
Ève cherchait la beauté qui passe et prit un fruit de la mort, Marie a donné à l’humanité le fruit le plus beau que les anges contempleront : il est le plus beau parmi les fils des hommes (cf. Ps44,3.) parce qu’il est la splendeur de la gloire du Père (Hb 1,3). Jésus, le Seigneur.
Donc « cherchons dans le fruit de la Bienheureuse Vierge ce que nous désirons parce que c’est cela le fruit béni par Dieu. La Vierge est donc bénie mais son fruit, Jésus, est encore plus béni » (Saint Thomas d’Aquin, Commentaire au ‘Je vous salue Marie’).
2) Les langes du Christ
Il est vrai qu’aujourd’hui, octave de Noël, on célèbre la fête de « Marie, Mère de Dieu », mais on ne peut oublier qu’aujourd’hui c’est aussi le 1er janvier. Une nouvelle année solaire commence donc. C’est est un temps « supplémentaire » que la Providence nous donne dans le contexte du salut inauguré par le Rédempteur il y a 2017 ans.
Même si les lectures bibliques de la Messe d’aujourd’hui mettent l’accent sur le « Fils de Marie » et sur le « Nom du Seigneur » au lieu de Marie, la solennité d’aujourd’hui est dédiée à la Vierge Mère de Dieu, pour souligner que le Verbe « sans temps » est entré dans le temps par l’intermédiaire de Marie. L’apôtre Paul le rappelle en affirmant que Jésus est « né d’une femme” (cf. Gal 4,4 – IIème lecture d’aujourd’hui).
Le titre « Mère de Dieu » souligne la mission unique de la Vierge sainte dans l’histoire du salut : mission qui est à la base du culte et de la dévotion que le peuple chrétien lui réserve. Notre Dame n’a pas reçu le don de Dieu uniquement pour elle-même, mais pour le donner au monde : dans sa virginité féconde, Dieu a donné aux hommes les biens du salut éternel, comme dit la Collecte : « Dieu qui dans la virginité féconde de Marie as donné aux hommes les biens du salut éternel, fais que nous expérimentions son intercession parce qu’à travers elle nous avons reçu l’auteur de la vie, le Christ, ton fils ».
Dans la liturgie d’aujourd’hui, c’est humblement que domine la figure de Marie, vraie Mère de Jésus, Homme-Dieu. La solennité d’aujourd’hui ne célèbre pas une idée abstraite, mais un mystère et un fait historique : Jésus-Christ, personne divine, né de la Vierge Marie qui est sa vraie Mère.
Cette Mère enveloppe le Fils avec des langes et cet Enfant, ce “nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire » (cf. Lc 2, 12) est le signe donné par les anges aux bergers pour reconnaître le Roi des Rois. Partis rapidement, les bergers arrivèrent à la grotte de Bethléem et trouvèrent l’enfant emmailloté non seulement par des langes blancs mais ils trouvèrent Marie et Joseph, les personnes blanches de pureté qui, d’amour pur, emmaillotaient et réchauffaient le Nouveau-Né.
Noël, mystère de la joie : mystère de l’Incarnation, de la génération miraculeuse d’un Dieu qui choisit de révéler son visage aux hommes non par l’embrassade d’un immense ciel orné par des étoiles splendides, mais entre les bras d’une jeune femme pure, gardée par un homme pur : Joseph.
Avec les yeux de Saint Joseph regardons Marie, la Vierge Mère, qui est la première à croire, et la première à voir le miracle né dans et de sa chair : son corps est la seconde nature -la nature humaine- du Christ et son ventre est le premier trône du Roi des rois, puis viendra la mangeoire, puis la croix : aujourd’hui nous.
Avec les yeux de Marie, contemplons le Fils de Dieu né homme pour l’homme et confié aux soins de sa mère. Elle vit avec les yeux posés sur le Christ et fait trésor de chacun de ses gestes. A l’école du regard de Marie, surpris par la joie, nous pouvons cueillir par le cœur ce que nos yeux et notre esprit seuls ne parvient ni à percevoir, ni à contenir.
Avec les yeux des bergers, surpris par la joie, nous regardons le fait que la paix pour tous est née et gardée par la tendresse de la Mère de Dieu : Marie a donné au monde le Prince de la Paix, Jésus le Rédempteur de l’humanité.
Notre paix, le Christ, est entre les bras d’une mère : Marie, une de nous. La Paix, Jésus, né d’une femme, est le don de Noël par excellence mis dans nos bras. Lui est le visage de la Paix qui rayonne par nos visages, mendiants la paix.
Mendions cette paix de la Vierge Marie et nous l’aurons, comme l’eurent les pasteurs qui « allèrent, sans tarder, et trouvèrent Marie et Joseph et l’enfant, couché dans la crèche » (Lc 2, 16). Ces pauvres bergers, mendiants de Dieu dans un enfant, rencontrèrent le Prince de la Paix dans l’enfant-Jésus qui faisait d’eux des témoins de la joie de se sentir aimés et capables d’aimer, « artisans » de paix, de la paix qui nait de l’expérience d’être aimé. Demandons à Marie, Mère de Dieu, de nous aider à accueillir son Enfant et, en Lui, la vraie paix.
Comme les bergers, essayons d’être mendiants du Ciel, affamés d’amour, assoiffés de paix, rendons-nous à Bethléem et mettons-nous à genoux devant la crèche, qui montre Dieu qui devient Enfant de paix et une Mère, qui nous l’offre. Cette Vierge Mère fait naître de nuit l’Enfant parce que l’amour est toujours un don qui fait naître le jour. Elle donna le jour à la Lumière. Marie reflète avec beaucoup de splendeur la Lumière qui est descendue sur la terre. Que cette Lumière nous conduise sur les chemins de la paix, parce que « la lumière de Jésus est une lumière douce, une lumière tranquille, c’est une lumière de paix, c’est comme la lumière de la nuit de Noël : sans prétentions » (Pape François).
3) Maternité1 et virginité de Lumière et de Paix
Cette douce et humble lumière du Christ est portée aujourd’hui de façon particulière par les Vierges consacrées dans le monde. Grâce au don d’elles-mêmes au Christ, elles vivent par et pour amour de Dieu et des autres. Les consacrées irradient la même lumière que leur Epoux apporte au monde. Leur vie vécue humblement rappelle « le premier amour avec lequel le Seigneur Jésus Christ a réchauffé votre cœur » (Benoît XVI). Ces femmes qui s’offrent complètement dans la virginité, s’offrent corps et âme pour être avec le Christ et se mettre, comme Lui, au service de Dieu et des frères. Leur chemin est un chemin continu avec le Christ, rencontré aujourd’hui à Bethlehem, puis sur les terres de la Terre Sainte dans le cœur jusqu’au Calvaire, pour être avec Lui, instruments de Sa paix.
Lecture Patristique
Saint Athanase
Lettre à Épictète
PG 26, 1-58, 1062, 1066
En Marie, Dieu s’est vraiment fait homme.
Le Verbe a pris en charge la descendance d’Abraham, c’est pourquoi il devait se faire en tous points semblable à ses frères et prendre un corps pareil au nôtre. Aussi Marie est-elle vraiment nécessaire pour qu’il prenne ce corps en elle et l’offre en notre faveur comme étant le sien. ~ L’Écriture rappelle son enfantement et dit : Elle emmaillota son fils ; le sein qui l’allaita a été déclaré bienheureux, et l’on a considéré qu’il est né d’elle comme pour l’offrande d’un sacrifice. ~ Gabriel le lui avait annoncé en termes soigneusement choisis. Il n’a pas dit, de façon banale : « Celui qui va naître en toi » pour ne pas faire croire que ce serait un corps extérieur introduit du dehors ; il a dit : Celui qui va naître de toi, pour inviter à croire que celui qui allait naître sortirait d’elle. ~
Tout cela s’est fait ainsi pour que le Verbe, en assumant notre nature et en l’offrant en sacrifice, la fasse totalement sienne. Il a voulu nous revêtir ensuite de sa propre nature, ce qui permet à saint Paul de dire : Il faut que cet être corruptible revête l’incorruptibilité, que cet être mortel revête l’immortalité. Cela ne s’est pas fait de façon fictive comme certains hérétiques l’ont encore imaginé : jamais de la vie ! Le Sauveur est devenu vraiment homme, et le salut de l’homme tout entier est venu de là. ~ Notre salut n’est pas une apparence, il n’est pas pour le corps seul, mais pour l’homme tout entier, âme et corps, et ce salut est venu du Verbe lui-même.
Ce qui est venu de Marie était donc humain par nature, selon les Écritures, et le corps du Seigneur était un vrai corps ; oui, un vrai corps, puisqu’il était identique au nôtre, car Marie est notre sœur, puisque nous descendons tous d’Adam. ~
Bien entendu, le Verbe ne s’est pas transformé en chair ; il seulement pris notre nature ; le mot de saint Jean : le Verbe s’est fait chair ne signifie pas autre chose, ainsi qu’on peut le voir à des expressions analogues, par exemple chez saint Paul : le Christ s’est fait malédiction pour nous.
L’union du Verbe à la nature n’ajoute rien à la Trinité, tandis que le corps humain a reçu un grand avantage de sa communion et de son unité avec le Verbe : de mortel il est devenu immortel, de purement humain il est devenu spirituel et lui qui vient de la terre, il franchit les portes du ciel.
Certes, même après que le Verbe a pris un corps en Marie, la Trinité demeure la Trinité, sans addition ni diminution. Elle est toujours parfaite : dans la Trinité on reconnaît l’unique divinité, et c’est ainsi que dans l’Eglise on proclame un seul Dieu, le Père du Verbe.
Les temps sont accomplis :
Aujourd’hui naît d’une femme,
celui qui nous rend fils de Dieu.
Son visage brille sur nous
et son Esprit pénètre nos cœurs.
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1 Comment ne pas penser au sanctuaire du Puy-en-Velay (France) ? Selon la tradition, l’origine du sanctuaire est contemporaine de la proclamation solennelle de la maternité divine de Marie par le concile d’Ephèse (431).
Le Puy semble donc un lieu majeur choisi très tôt par Marie pour rendre visible et concrète en Europe sa maternité divine. La prière que nous aimons spécialement au Puy est l’Angelus où, trois fois par jour, avec Marie, nous accueillons dans la joie, la venue du Fils de Dieu parmi nous. Nous chantons aussi très souvent le Salve Regina. En 1998, l’UNESCO l’a inscrit au patrimoine mondial de l’humanité en raison de son rayonnement sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle (Un des premiers pèlerins connus est Godescalc, évêque du Puy, parti en pèlerinage en 951).