M. Jean Castex, 18 oct. 2021 © Vatican Media

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Centenaire de la reprise des relations diplomatiques: le Premier ministre français Jean Castex au Vatican

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Les points de convergence

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Le Premier ministre français Jean Castex a été reçu par le pape François au Vatican, ce lundi 18 octobre 2021, à l’occasion du centenaire de la reprise des relations diplomatiques entre la France et le Saint-Siège, sous Benoît XV, après 17 ans d’interruption (1904-1921).

Accompagné de son épouse, Sandra, M. Castex est arrivé peu avant 10H00 au Vatican où il a été reçu en audience privée par le pape : ils ont échangé en espagnol.

La rencontre en tête à tête a duré environ 35 minutes, jusqu’à 10H30. Le Premier ministre a renouvelé l’invitation de la France au pape.

« Cette rencontre, indique Matignon, leur a permis d’aborder les grands enjeux d’aujourd’hui tels que le changement climatique, le développement durable ou l’action contre les inégalités mondiales. »

La conversation a été l’occasion en effet d’un tour d’horizon de la situation internationale, en constatant que la diplomatie vaticane et la diplomatie française se trouvent « en phase » sur beaucoup de sujets comme le Liban, les chrétiens d’Orient, l’Irak, la Méditerranée, mais aussi l’Afghanistan.

En phase aussi pour les questions d’environnement, spécialement à l’approche du sommet de Glasgow, la COP26, : M. Castex a spécialement évoqué la loi sur climat et résilience.

Une « convergence » en somme sur « beaucoup » de points de vue.

La rencontre survient peu après la visite de trois groupes d’évêques de France « ad limina » à Rome et la publication du Rapport Sauvé sur les abus sexuels en milieu catholique en France (1950-2020): il a donc été question aussi de la situation de l’Eglise dans l’hexagone.

M. Castex a constaté que le pape François était « particulièrement bien informé » de la situation. Convergence là aussi pour saluer le « courage » des évêques qui ont voulu ce rapport « totalement indépendant » et qui ont permis cette enquête, avec des conclusions certes « inquiétantes », mais qui doivent susciter « la sollicitude à l’égard des victimes signalées à faveur ce travail », et indiquent la « nécessité pour l’Eglise catholique de tirer les enseignements dans le processus qui va s’engager maintenant ».

La délégation française

Puis le Premier ministre a présenté au pape François la délégation française, dont M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères – qui avait déjà rencontré le pape à l’occasion de la visite du président de la République le 26 juin 2018 – et M . Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, chargé des cultes.

Le pape François a offert au Premier ministre une mosaïque représentant les « vignerons » avec cette inscription : « Que le fruit de la vigne et du travail des hommes devienne pour nous breuvage de salut ».

Comme c’est la coutume, le pape a offert les principaux documents du pontificat, dont le Message pour la paix du 1er janvier 2021, le document sur la Fraternité humaine.

Le pape a aussi remis au Premier ministre un livre sur la fameuse « Statio Orbis » du 27 mars 2020, la célébration sur la Place Saint-Pierre quasi déserte, pour implorer la fin de la pandémie : un présent qui souligne l’engagement commun à lutter pour la fin de la crise du coronavirus.

Un cadeau spécial : le pape a offert un volume sur l’appartement papal des audiences, édité par la Préfecture de la Maison pontificale.

Pour sa part, M. Castex a offert au pape François une édition de « Notre Dame de Paris » de Victor Hugo, datant de 1836 et illustrée par Tony Johannot, ainsi qu’un maillot au nom d’un joueur argentin, Lionel Messi, marqué du numéro 30, mais surtout, signé par le joueur du PSG.

M. Castex et sa délégation ont ensuite visité notamment la chapelle Sixtine et la basilique Saint-Pierre.

Colloque à la Villa Bonaparte

L’après-midi, le Premier ministre a remis les insignes de commandeur de l’Ordre de la Légion d’honneur du cardinal Parolin au siège de l’ambassade de France au Vatican, la Villa Bonaparte.

Le cardinal Parolin a ensuite prononcé un discours, puis M. Castex s’est exprimé lui aussi sur ces circonstances historiques. On peut trouver la vidéo sur le site de Matignon.

Quant aux relations avec l’Italien, le Premier ministre a rencontré le président du Conseil Mario Draghi : il a été notamment question d’Europe et de migrations, et des plans de relance. Avec un accent sur la Conférence pour la Libye en novembre prochain et le semestre de présidence française de l’Union européenne, à partir du 1er janvier.

La rencontre à la Villa Bonaparte, introduite par l’ambassadrice, Mme Elisabeth Beton Delègue, a été suivie d’une table ronde avec comme intervenants Mgr Bernard Ardura, président du Comité pontifical de sciences historiques, Constance Colonna-Cesari, journaliste et réalisatrice, spécialiste du Vatican, M. Jean-Dominique Durand, historien, président de l’Amitié judéo-chrétienne de France, et M. Michel Fanget, député du Puy-de-Dôme, chargé d’une mission sur les relations France-Vatican. A cette occasion, il a rencontré le pape François en juin 2020 et le cardinal Parolin en août dernier. Il a invité le pape au Puy-en-Velay. La rencontre était modérée par Jérôme Chapuis, rédacteur en chef de La Croix.

Cent ans de dialogue

Le point de départ de ce déplacement, prévu en mai, reporté en juin, puis en octobre du fait de la crise sanitaire, c’est donc le centenaire de la reprise des relations diplomatiques entre le Saint-Siège et la France, interrompues pendant 17 ans.

Il s’agissait, « cent ans plus tard, marquer la continuité et la force de ce dialogue » a indiqué l’entourage du Premier ministre: un projet de longue date du Quai d’Orsay, partagé de part et d’autre.

C’est le 28 mai 1921 en effet que Charles Jonnart, ambassadeur de la République française, a présenté ses lettres de créance au pape Benoît XV, ce qui tournait une page de l’histoire des relations entre la France et le Saint-Siège: la rupture avait été consommée dix-sept ans auparavant, le 29 juillet 1904, après le rappel de l’ambassadeur précédent, M. Nizard.

Cependant la rupture ne signifiait pas l’absence de contacts, ainsi, en 1914, dès le début de la Première guerre mondiale – dont le pape avait dit que c’était une « boucherie inutile » – , le ministre français Viviani délégua Charles Loiseau au palais Farnèse – l’ambassade en Italie –  avec mission d’entretenir des contacts avec le Vatican, sans aucun caractère officiel.

A la fin de la guerre, les cartes étaient redistribuées. En avril 1919, Clemenceau nommait les évêques de Metz et de Strasbourg, le Concordat existant toujours pour l’Alsace-Lorraine. Le choix fut ratifié par Benoît XV. En mai, une pétition pour la reprise des relations recueillit un nombre important de signatures. De son côté le Saint-Siège paraissait très disposé à chercher un terrain d’entente avec la République française. Benoît XV aurait déclaré au cardinal Amette : « Si l’on me tend le doigt, j’ouvrirai la main. Si l’on me tend la main, j’ouvrirai les bras. »

En mars 1920, un diplomate de carrière, Jean Doulcet, était envoyé officiellement à Rome pour engager, en qualité de chargé de mission, des négociations en vue du rétablissement des relations diplomatiques. Le 30 novembre, la Chambre votait les crédits pour une ambassade. Le choix du diplomate se porta sur Charles Jonnart, sénateur du Pas-de-Calais.

Benoît XV décéda moins d’un an après le rétablissement, le 22 janvier 1922. Son successeur, Pie XI allait s’employer à les reconstruire.

 

 

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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