Audience du 19 août 2020 © Vatican Media

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S. Bernard de Clairvaux : s’abandonner à la protection de Marie

Le pape salue la mémoire du « grand docteur de l’Eglise »

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Le pape François encourage à s’abandonner à la protection de Marie, à l’exemple de saint Bernard de Clairvaux (1090-1153), fêté le 20 août.

Lors de l’audience générale la veille, 19 août 2020, le pape a en effet évoqué cette mémoire liturgique du « grand docteur de l’Eglise et surtout doux chantre de la Vierge Marie ».

« Que son exemple suscite en chacun le désir de s’abandonner avec confiance à la protection maternelle de la Sainte Vierge, consolatrice des affligés », a-t-il encouragé en saluant spécialement les personnes âgées, les jeunes, les personnes malades et les nouveaux époux,

Le pape a aussi invité ceux qui suivaient l’audience en direct streaming de la Bibliothèque du palais apostolique « à dédier toujours plus de temps à la prière et à la formation chrétienne, pour être de fidèles disciples du Christ et grandir dans un esprit de solidarité fraternelle ».

En octobre 2009, le pape Benoît XVI avait consacré une catéchèse à saint Bernard de Clairvaux, « appelé le dernier des Pères de l’Eglise, car au XIIe siècle il a encore une fois souligné et rendu présente la grande théologie des pères ». Voici des extraits de sa catéchèse :

« Il naquit en 1090 à Fontaines en France, dans une famille nombreuse et assez aisée. Dans son adolescence, il se consacra à l’étude de ce que l’on appelle les arts libéraux – en particulier la grammaire, la rhétorique et la dialectique – à l’école des chanoines de l’église de Saint-Vorles, à Châtillon-sur-Seine et il mûrit lentement la décision d’entrer dans la vie religieuse. Vers vingt ans, il entra à Cîteaux, une fondation monastique nouvelle, plus souple par rapport aux anciens et vénérables monastères de l’époque et, dans le même temps, plus rigoureuse dans la pratique des conseils évangéliques. Quelques années plus tard, en 1115, Bernard fut envoyé par saint Etienne Harding, troisième abbé de Cîteaux, pour fonder le monastère de Clairvaux. C’est là que le jeune abbé (il n’avait que vingt-cinq ans) put affiner sa propre conception de la vie monastique, et s’engager à la traduire dans la pratique. En regardant la discipline des autres monastères, Bernard rappela avec fermeté la nécessité d’une vie sobre et mesurée, à table comme dans l’habillement et dans les édifices monastiques, recommandant de soutenir et de prendre soin des pauvres. Entre temps, la communauté de Clairvaux devenait toujours plus nombreuse et multipliait ses fondations.

Au cours de ces mêmes années, avant 1130, Bernard commença une longue correspondance avec de nombreuses personnes, aussi bien importantes que de conditions sociales modestes. Aux multiples Lettres de cette période il faut ajouter les nombreux Sermons, ainsi que les Sentences et les Traités. C’est toujours à cette époque que remonte la grande amitié de Bernard avec Guillaume, abbé de Saint-Thierry, et avec Guillaume de Champeaux, des figures parmi les plus importantes du XIIe siècle. A partir de 1130, il commença à s’occuper de nombreuses et graves questions du Saint-Siège et de l’Eglise. C’est pour cette raison qu’il dut sortir toujours plus souvent de son monastère, et parfois hors de France. Il fonda également quelques monastères féminins, et fut le protagoniste d’une vive correspondance avec Pierre le Vénérable, abbé de Cluny, dont j’ai parlé mercredi dernier. Il dirigea surtout ses écrits polémiques contre Abélard, le grand penseur qui a lancé une nouvelle manière de faire de la théologie en introduisant en particulier la méthode dialectique-philosophique dans la construction de la pensée théologique. Un autre front sur lequel Bernard a lutté était l’hérésie des Cathares, qui, méprisant la matière et le corps humain, méprisaient en conséquence le Créateur. En revanche, il sentit le devoir de prendre la défense des juifs, en condamnant les vagues d’antisémitisme toujours plus diffuses. C’est pour ce dernier aspect de son action apostolique que, quelques dizaines d’années plus tard, Ephraïm, rabbin de Bonn, adressa un vibrant hommage à Bernard. Au cours de cette même période le saint abbé rédigea ses œuvres les plus fameuses, comme les très célèbres Sermons sur le Cantique des Cantiques. Au cours des dernières années de sa vie – sa mort survint en 1153 – Bernard dut limiter les voyages, sans pourtant les interrompre complètement. Il en profita pour revoir définitivement l’ensemble des Lettres, des Sermons, et des Traités. (…)

Je voudrais à présent m’arrêter sur deux aspects centraux de la riche doctrine de Bernard : elles concernent Jésus Christ et la Très Sainte Vierge Marie, sa Mère. Sa sollicitude à l’égard de la participation intime et vitale du chrétien à l’amour de Dieu en Jésus Christ n’apporte pas d’orientations nouvelles dans le statut scientifique de la théologie. Mais, de manière plus décidée que jamais, l’abbé de Clairvaux configure le théologien au contemplatif et au mystique. Seul Jésus – insiste Bernard face aux raisonnements dialectiques complexes de son temps – seul Jésus est « miel à la bouche, cantique à l’oreille, joie dans le cœur (mel in ore, in aure melos, in corde iubilum) ». C’est précisément de là que vient le titre, que lui attribue la tradition, de Docteur mellifluus : sa louange de Jésus Christ, en effet, « coule comme le miel ». (…)

Pour Bernard, la véritable connaissance de Dieu consiste dans l’expérience personnelle et profonde de Jésus Christ et de son amour. Et cela, chers frères et sœurs, vaut pour chaque chrétien : la foi est avant tout une rencontre personnelle, intime avec Jésus, et doit faire l’expérience de sa proximité, de son amitié, de son amour, et ce n’est qu’ainsi que l’on apprend à le connaître toujours plus, à l’aimer et le suivre toujours plus. Que cela puisse advenir pour chacun de nous !

Dans un autre célèbre Sermon le dimanche entre l’octave de l’Assomption, le saint Abbé décrit en termes passionnés l’intime participation de Marie au sacrifice rédempteur du Fils. « O sainte Mère, – s’exclame-t-il – vraiment, une épée a transpercé ton âme !… La violence de la douleur a transpercé à tel point ton âme que nous pouvons t’appeler à juste titre plus que martyr, car en toi, la participation à la passion du Fils dépassa de loin dans l’intensité les souffrances physiques du martyre » (14 : PL 183-437-438). Bernard n’a aucun doute : « per Mariam ad Iesum », à travers Marie, nous sommes conduits à Jésus. Il atteste avec clarté l’obéissance de Marie à Jésus, selon les fondements de la mariologie traditionnelle. (…)

Ces réflexions, caractéristiques d’un amoureux de Jésus et de Marie comme saint Bernard, interpellent aujourd’hui encore de façon salutaire non seulement les théologiens, mais tous les croyants. On prétend parfois résoudre les questions fondamentales sur Dieu, sur l’homme et sur le monde à travers les seules forces de la raison. Saint Bernard, au contraire, solidement ancré dans la Bible, et dans les Pères de l’Eglise, nous rappelle que sans une profonde foi en Dieu alimentée par la prière et par la contemplation, par un rapport intime avec le Seigneur, nos réflexions sur les mystères divins risquent de devenir un vain exercice intellectuel, et perdent leur crédibilité. La théologie renvoie à la « science des saints », à leur intuition des mystères du Dieu vivant, à leur sagesse, don de l’Esprit Saint, qui deviennent un point de référence de la pensée théologique. Avec Bernard de Clairvaux, nous aussi nous devons reconnaître que l’homme cherche mieux et trouve plus facilement Dieu « avec la prière qu’avec la discussion ». A la fin, la figure la plus authentique du théologien et de toute évangélisation demeure celle de l’apôtre Jean, qui a appuyé sa tête sur le cœur du Maître.

Je voudrais conclure ces réflexions sur saint Bernard par les invocations à Marie, que nous lisons dans une belle homélie. ‘Dans les dangers, les difficultés, les incertitudes – dit-il – pense à Marie, invoque Marie. Qu’elle ne se détache jamais de tes lèvres, qu’elle ne se détache jamais de ton cœur ; et afin que tu puisses obtenir l’aide de sa prière, n’oublie jamais l’exemple de sa vie. Si tu la suis, tu ne te tromperas pas de chemin ; si tu la pries, tu ne désespéreras pas ; si tu penses à elle, tu ne peux pas te tromper. Si elle te soutient, tu ne tombes pas ; si elle te protège, tu n’as rien à craindre ; si elle te guide, tu ne te fatigues pas ; si elle t’est propice, tu arriveras à destination…' »

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Anne Kurian-Montabone

Baccalauréat canonique de théologie. Pigiste pour divers journaux de la presse chrétienne et auteur de cinq romans (éd. Quasar et Salvator). Journaliste à Zenit depuis octobre 2011.

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