Le p. Miguel A. Fiorito (bras croisés) et ses étudiants dont le p. J.M. Bergoglio @ Archives Jésuites

Le p. Miguel A. Fiorito (bras croisés) et ses étudiants dont le p. J.M. Bergoglio @ Archives Jésuites

50 ans de sacerdoce : le pape François présente les écrits du «Maître Fiorito»

« L’homme d’un combat contre un seul ennemi, satan »

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Le pape François présentera les “Ecrits” (Escritos) du p. Miguel Ángel Fiorito (1916-2005), jésuite – son ancien père spirituel qu’il appelle le «Maître Fiorito» -, à Rome, à la curie générale des jésuites, vendredi prochain, 13 décembre 2019, à 18h30.
L’événement marquera le 50e anniversaire de l’ordination sacerdotale du pape, le 13 décembre 1969, par Mgr Ramón José Castellano, archevêque de Córdoba.
Pour le bien de l’Eglise
Annonçant la rencontre, le directeur de la Civiltà Cattolica, le p. Antonio Spadaro S.J., révèle aussi que le pape François signe la préface de ces cinq volumes. Le pape y affirme notamment: « L’édition des écrits du père Miguel Ángel Fiorito est une source de consolation pour nous qui, depuis de nombreuses années, nous nourrissons de ses enseignements. Ces écrits feront un grand bien à toute l’Eglise.”
Il précise: « Ce fut l’homme d’un combat contre un seul ennemi: le mauvais esprit, satan, le démon, le tentateur, l’accusateur, l’ennemi de notre nature humaine ».
Ces écrits sont rassemblés par le p. José Luis Narvaja S.I., par ordre chronologiques, de 1952 à 1991, soit le rectorat du p. Fiorito à l’Université jésuite “del Salvador” de Buenos Aires, son enseignement comme doyen et professeur à la faculté de théologie de San Miguel, et son activité de directeur spirituel et de formateur.
Les “Escritos seront disponibles en espagnol, sous forme numérique sur le site de la Civiltà Cattolica, et sous format papier sur Amazon.
Quatre principes fondamentaux
Beaucoup de ses écrits concernent la Compagnie de Jésus, continue le p. Spadaro, mais aussi le “discernement spirituel” et le contexte de l’Eglise et de la société en Amérique latine, ou la religiosité populaire: autant de thèmes chers au pape François dont on découvre le développement progressif.
Le p. Fiorito ne réfléchissait pas de façon isolée, mais en dialogue avec un groupe de jeunes jésuites, à partir de leur expérience pastorale dans les paroisses et notamment dans la banlieue de Buenos Aires.
Feuilleter cet ouvrage c’est faire un plongeon “au coeur du pontificat”, estime le p. Spadaro. Ces réflexions se retrouvent par exemple dans les  “quatre principes” fondamentaux de “Evangelii gaudium”, qui sont, rappelons-le : le temps est supérieur à l’espace, l’unité prévaut sur le conflit, la réalité est plus importante que l’idée, le tout est supérieur à la partie.
Par cette publication, La Civiltà Cattolica, lance les célébrations pour ses 170 ans d’existence (1850-2020).
Fiorito et Bergoglio, l’ordination
Le p. José Luis Narvaja, qui a rassemblé ces documents, avait déjà écrit un article sur le pape François et le p. Fiorito, dans L’Osservatore Romano en italien du vendredi 6 avril 2018 « Le père Fiorito et Bergoglio », dans lequel il retrace les racines de la pensée théologique du pape François, à travers la personne du père Miguel Ángel Fiorito, dans les années qui ont suivi le Concile Vatican II.
Il souligne l’importance du jésuite argentin lorsque Bergoglio devient prêtre: « Au moment de son ordination sacerdotale (1969), il avait presque 33 ans. À cette période, une personne a eu une grande influence sur lui : le p. Miguel Ángel Fiorito (1916-2005), qui fut recteur de l’Université del Salvador (1970-1973) à Buenos Aires, professeur de métaphysique, ainsi que doyen (1964-1969) à la Faculté de philosophie du Collège Massimo de San Miguel, et directeur de la revue « Stromata » dans laquelle étaient publiés des articles des professeurs de la Faculté. En raison de ses capacités intellectuelles et spirituelles, le p. Fiorito était devenu le point de référence indiscuté de ses étudiants. »
Le p. Narvaja précisait: « Déjà lorsqu’il était provincial, Bergoglio avait confié au père Fiorito deux charges importantes dans la province : celle d’instructeur de la « Troisième probation » (c’est-à-dire la dernière étape de formation des jésuites) et celle de directeur du « Bulletin de Spiritualité ». La majeure partie des études du père Fiorito sur la spiritualité de la Compagnie de Jésus, en particulier sur les Exercices de saint Ignace et sur le discernement spirituel, appartiennent à cette période. » Le p. Narvaja les a maintenant rassemblés dans la langue originale.
Le « Maître Fiorito » et l’infinie miséricorde
Le pape avait aussi évoqué le « Maître Fiorito » à l’occasion de la publication des « Lettres sur la tribulation », dans sa préface de cet essai qui a été à nouveau publié, complété et adapté à notre temps, trente ans après sa première publication, en janvier dernier, sous la direction des pères jésuites Antonio Spadaro et Diego Fares, et aux éditions Ancora et de La Civiltà Cattolica.
C’est le pape lui-même qui avait assumé la direction lors de sa première édition en 1987, à l’invitation du p. Miguel Angel Fiorito. À cette occasion, huit lettres de deux préposés généraux de la Compagnie de Jésus avaient été publiées : sept du p. Lorenzo Ricci, écrites entre 1758 et 1773 et une du p. Jan Roothaan, de 1831. Les missives se réfèrent à la « grande tribulation » due à la décision prise par Clément XVI en 1773 de supprimer l’Ordre des Jésuites, reconstitué en 1814 selon la volonté de Pie VII.
Dans sa récente préface, le pape se souvient de la publication de cet ouvrage en 1987 : « Quand j’ai soumis au p. Miguel Angel Fiorito l’ébauche de la préface que j’avais écrite pour la première édition des Lettres de la tribulation, le Maître – nous l’appelions ainsi parce qu’il l’était, et il le reste aujourd’hui, étant donné la manière dont il a su former une école de discernement – me demanda de mieux développer le dernier paragraphe dans lequel je parlais de l’importance de recourir à l’accusation de soi-même. Il s’agissait du discernement et de la façon de bien faire face à la honte et la confusion qui deviennent manifestes quand le Malin déchaîne une persécution féroce contre les fils de l’Église. La réponse, explique le pape François, était de lui opposer une saine honte et la confusion que l’infinie miséricorde du Seigneur et sa loyauté font éprouver à ceux qui demandent pardon pour leurs péchés. ‘Là, il y a une grâce, me dit-il. Développez-la !’ ».
Le discernement spirituel, en Birmanie
Le pape recommandait la lecture priante de ces lettres: « Trente ans plus tard, nous sommes dans un autre contexte, mais la guerre est la même et appartient seulement au Seigneur. Ces Lettres sont « un traité de discernement à une époque de confusion et de tribulation » et leur réédition m’invite avec force, ainsi que les réflexions des autres compagnons qui sont incluses dans le livre, à continuer de m’acquitter de la charge qui m’a été donnée par mon Maître – qui a maintenant pour moi la saveur de la prophétie d’un ancien – de “développer une grâce”. »
Lors de sa rencontre avec les jésuites, en Birmanie, en décembre 2017, le pape a cité son maître en parlant justement du discernement: « Je veux le citer ici, en Birmanie, car je crois qu’il n’a jamais imaginé que son nom serait prononcé dans les parages. Il s’agit d’un jésuite argentin et il s’appelait Miguel Angel Fiorito. Il a établi une édition critique du Mémorial de saint Pierre Favre, mais c’était un philosophe et il avait fait sa thèse sur le désir naturel de l’homme de trouver Dieu en saint Thomas. C’était un professeur de philosophie, président de la Faculté, mais il aimait la spiritualité. Et il nous enseignait, à nous étudiants, la spiritualité de saint Ignace. C’est lui qui nous a enseigné la voie du discernement. Toi qui es formateur, si tu rencontres un jésuite qui est en formation, mais qui ne sait pas discerner, qui n’a pas appris le discernement et qui montre peu d’espoir de parvenir à l’apprendre, même si c’est un garçon excellent, dis-lui de chercher une autre voie. »
Le pape affirmait: « Le jésuite doit être maître en discernement, pour lui et pour les autres. Saint Ignace ne nous a pas demandé d’accomplir deux examens de conscience par jour pour nous trier les poux ou les puces. Non : il l’a fait pour que nous regardions ce qui se passe dans notre cœur. Selon moi, le critère vocationnel pour la Compagnie est celui-ci : le candidat sait-il discerner ? apprendra-t-il à discerner ? S’il sait discerner, il sait reconnaître ce qui vient de Dieu et ce qui vient du mauvais esprit, alors, cela lui suffit pour aller de l’avant. Même s’il ne comprend pas grand-chose, même s’il rate ses examens… Tant pis, pourvu qu’il sache mener un discernement spirituel. Pensez à saint Pierre Claver. Il savait discerner et il savait que Dieu voulait sa vie parmi les esclaves noirs, parmi ceux dont certains théologiens estimés discutaient pour savoir s’ils avaient ou non une âme. »

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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