Pour le cardinal Amato, les martyrs catholiques du nazisme « interrogent chaque jour sur notre vie de cohérence chrétienne ».
Le cardinal Angelo Amato, préfet émérite de la Congrégation pour les causes des saints, a participé à la présentation à Rome, à l’Université pontificale grégorienne (PUG), mercredi, 15 mai 2019, de deux volumes intitulés « Persécutés pour la foi. Les victimes du national socialisme en Europe centrale et orientale » qui s’inscrit dans la collection sur l' »Histoire de l’Église en Europe centrale et orientale » (“Storia della Chiesa in Europa Centro-Orientale”, chez Gabrielli Editori), rapporte Radio Vatican (Luisa Urbani).
Une publication qui a voulu « mettre en lumière les récits des martyrs que le nazisme lui-même voulait plonger dans l’oubli », en donnant la parole aux historiens des pays affectés par la persécution.
« Les nombreux martyrs, dont certains ont déjà été érigés aux honneurs des autels par l’Église, nous interrogent chaque jour sur notre vie de cohérence chrétienne. Ne perdons pas le grand cadeau de la foi comme de l’eau sur le sable. L’Evangile a encore besoin de témoins crédibles aujourd’hui », a déclaré le préfet émérite, ajoutant que « la lecture de cet ouvrage sera d’une grande édification pour tous ».
Des noms connus, des milliers d’inconnus
« Le concept méthodologique de ces deux volumes est très différent », a expliqué le père Jan Mikrut, éditeur de la collection, soulignant que le texte consacré au rôle de l’Église « est conçu comme un manuel pour les étudiants et les professeurs ».
Il a précisé que le deuxième projet, concernant les martyrs victimes du nazisme, « souhaite présenter les différentes formes de destruction de l’Église et de ses personnages », et que « ce n’est pas un recueil des biographies des martyrs de ces années », mais une véritable analyse de la persécution de l’Église.
Il a cité, parmi les martyrs polonais victimes du nazisme saint Maximilien Kolbe, mais il a aussi cité la famille catholique Ulma, exterminée par les nazis pour avoir caché et aidé des juifs: « Dans leur histoire un double scénario est présenté: d’une part, des victimes innocentes et de l’autre, des auteurs sans scrupules. D’un côté la civilisation de l’amour de l’autre, l’incivilité du mal ».
Il a aussi cité les bienheureux autrichiens Otto Neururer et Josef Mayr Nusser, respectivement un prêtre catholique et un laïc qui « a jugé important de témoigner avec une conscience claire face aux consciences obscurcies par le mal et l’idéologie », a expliqué Don Nicola Spinato, l’un des auteurs du volume: « Ces deux personnages nous apprennent l’importance de la formation intime de la conscience à la lumière de l’enseignement de l’Église et de sa foi en Dieu ».
Rappelons en outre qu’en décembre dernier, le pape François a approuvé la publication d’un décret attestant du martyre de Richard Henkes, prêtre de la Société de l’Apostolat catholique (Pères Pallotins) : il est né à Ruppach en Allemagne le 26 mai 1900 et mort en haine de la foi au camp de concentration de Dachau le 22 février 1945. Prédicateur renommé, il dénonçait le régime nazi et ses exterminations programmées dans ses homélies. Il a succombé au typhus en déportation, après avoir longtemps assisté les malades.
L’avenir de l’Europe
« Pour décrire les blessures de l’Église, il ne suffit pas de compter les morts et il ne suffit pas de répertorier les pertes matérielles », a fait observer notamment le cardinal Amato.
« Le 20ème siècle, a-t-il expliqué, a été pour l’Eglise en Europe l’époque douloureuse et glorieuse des martyrs. Hommes et femmes, personnes âgées et enfants, riches et pauvres, à travers lesquels Dieu manifeste le pouvoir de sa grâce et de sa charité « . Ce sont des gens qui « par l’offrande de leur vie innocente, introduisent dans la société la graine divine de l’amour et du pardon, surmontant le mal par le bien », en promouvant « l’espérance » et la « fraternité ».
Le cardinal Angelo Amato s’est interrogé sur l’avenir de l’Europe: « La question fondamentale est de savoir pourquoi ce désordre s’est produit en Europe et pourquoi les personnes qui font du christianisme leur identité ont-elles généré un monstre aussi pervers que le diable? »
Il s’est demandé si « les racines chrétiennes de l’Europe sont toujours solides et saines ».
Il estime que cette publication peut apporter des réponses: « Tout en décrivant les tyrans, ces volumes documentent l’humanité des martyrs, la saine réaction des chrétiens face aux oppresseurs ». Il estime donc que « l’Eglise et le christianisme ont suffisamment d’anticorps pour neutraliser les métastases du mal et affirmer le bien ». Les racines chrétiennes de l’Europe « ne semblent donc pas se tarir mais fournissent encore de l’oxygène vital ».
Un message de bonté
Il a aussi évoqué les persécutions actuelles: « Les noms des persécuteurs changent, mais les victimes sont toujours les mêmes », pourtant, « l’Eglise du Christ continue à diffuser son message de bonté ».
L’objectif va donc au-delà de la simple reconstitution historique : « Sans une connaissance approfondie de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, il est impossible de comprendre encore plus pour guider l’Eglise d’aujourd’hui », explique Mgr Grzegorz Rys, archevêque polonais de Lodz, dans la préface.
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Les martyrs catholiques du nazisme et le défi de la "cohérence" chrétienne
L’avenir de l’Europe et ses racines