Résumé : Depuis 2350 ans, dans notre tiroir des opinions, il y a un vieux débat entre Aristote et Démocrite : les atomes sont-ils capables de s’organiser tous seuls, sans aucune instruction intelligente, pour créer des tulipes, des hamsters, des êtres humains ?
Nous avons vu la dernière fois qu’il est devenu très difficile de croire que la vie peut commencer de façon simple et naturelle et spontanée, comme le croyaient les philosophies niant une intelligence organisatrice. Quand Pasteur démontrait l’impossibilité de la génération spontanée, cela nous enseignait que le commencement de la vie était déjà beaucoup moins simple qu’il n’en avait l’air…
Mais Pasteur ne pouvait pas encore imaginer la complexité du système nécessaire pour que la vie puisse commencer sur notre planète ou une autre. En effet, nous le savons maintenant : il ne faut pas seulement une bonne température et pression, de l’eau liquide, de l’oxygène, du carbone et de la lumière !…
Il fallait également que soient inventés et mis en place de façon opérationnelle deux langages (celui de l’ADN et celui des protéines), chacun disposant de son propre alphabet (4 lettres et 20 lettres) de son vocabulaire et de sa grammaire. Mais ces deux alphabets ne serviraient à rien sans l’invention et la mise en place d’un traducteur entre les deux langages, comme le savent tous les biologistes du monde. Surtout depuis octobre 2009 où le prix Nobel de chimie a été décerné à trois chercheurs travaillant sur cet intitulé : « comment fonctionne le traducteur entre les deux langages ? ».
Chacun peut donc vérifier cette information apportée à l’enquête, cet indice qui nous permet de penser, en étant libéré de certaines idées fausses tendant à nous faire croire que la vie apparait spontanément dès que les conditions sont propices, sans avoir besoin de la moindre intelligence organisatrice, comme on dit : « par hasard » !
Autrement dit, plus les progrès des sciences avancent, plus les conditions nécessaires à l’apparition de la vie se révèlent exiger de l’intelligence et même, du génie.
En mettant fin à la génération spontanée, en 1961, Pasteur sortait l’humanité d’une fausse piste. Cette découverte a provoqué deux résultats : faire avancer la science et faire s’effondrer la philosophie hylozoïste* qui enseignait que les atomes vivants et doués de conscience s’organisent tout seuls car on voit qu’ils ont besoin d’être organisés par des instructions.
Mais cette réfutation n’a pas empêché Darwin de continuer de croire à la génération spontanée, comme il l’écrivait à son ami Joseph Hooker en 1871,à peine 10 ans après la démonstration de Pasteur :
« La vie est apparue dans un petit étang chaud, dans lequel il y avait un riche bouillon de produits chimiques organiques, à partir desquels s’est formé le premier organisme primitif à la suite d’une longue période d’incubation durant les temps géologiques ».
Il pensait très sincèrement que l’on n’allait pas tarder à trouver les passerelles entre la matière inerte et le vivant. Car entre le caillou et le brin d’herbe il y avait surement le même principe d’évolution qui se fait toute seule, qu’entre les espèces vivantes, sans quoi, comment expliquer la présence d’êtres vivants puis pensants dans un univers de matière inerte, privé d’intelligence organisatrice ? Mais c’est plutôt le contraire qu’on découvre : un abîme. On retrouve donc, chez Darwin et ses amis, la vieille croyance de Leucippe et Démocrite. Car, avant d’être une question scientifique, (qui reste une énigme à ce jour, pour les biologistes du monde entier), la question du commencement de la vie faisait l’objet d’un débat philosophique. Les « atomistes » Leucippe et Démocrite (-460 – 370 ), enseignaient qu’il n’y a pas besoin d’intelligence organisatrice pour créer des êtres vivants.
Ils ont posé à priori qu’il n’y a pas de dieu organisateur car ils n’aiment pas cette idée d’une intelligence organisatrice, ils préfèrent croire que ça se fait tout seul, autrement dit : « par hasard ». Aristote, (-384-322) au contraire, ne se gênait pas pour qualifier cette croyance de folie (mania) car, à ses yeux, elle refusait le réel qui témoigne d’une extrême complexité et d’une organisation intelligente de la matière, pour que des êtres vivants existent. Ce que les sciences confirmeront.
Alors, intelligence organisatrice et créatrice ou pas ? Le débat restait ouvert puisque, si la réponse sautait aux yeux d’Aristote (il faut de l’intelligence créatrice) les « atomistes »continuaient d’affirmer le contraire. Comment expliquaient-ils l’existence de ces structures complexes que sont les plantes, animaux, êtres humains ?
Uniquement par le jeu des probabilités. C’est simple : il y a un nombre infini d’atomes qui existent depuis l’éternité dans une sorte de Chaos (sans ordre). Ces atomes éternels et en quantité infinie sont en mouvement. (Eh oui, il faut bien qu’ils soient en mouvement car s’ils étaient immobiles, on comprend que rien ne pourrait se passer.) Mais pour une raison qu’on ignore, ils sont en mouvement et grâce à cela, ils peuvent se rencontrer de façon « fortuite », autrement dit « par hasard », sans aucune intention organisatrice. Ainsi, de la rencontre de deux atomes va naître une pâquerette, de trois autres un canard sauvage et d’autres encore un peuplier ou des êtres humains…
Lucrèce ( -270 -306,) pensera la même chose. C’est tellement facile, il suffit de laisser faire les lois des probabilités statistiques. (Personne ne semble se demander d’où viennent ces lois). C’est à cette antique philosophie que se rattachent les amis de Darwin. Le hasard s’occupe de tout et la sélection naturelle fait le tri. Pourquoi pas ? Cette philosophie pourrait avoir raison. En attendant de voir si on peut vérifier leurs affirmations, cette philosophie est à situer à sa juste place : une tentative d’interprétation et rien de plus. De même pour ceux qui comme Aristote enseignent qu’il y a un démiurge intelligent ou un dieu qui agit. Ce n’est qu’une autre tentative d’interprétation opposée à la précédente. Ce n’est donc pas un débat entre science et religion, mais entre deux interprétations d’un même fait scientifique : la vie a commencé sur notre planète et elle va du plus simple au plus complexe.
Car du point de vue purement scientifique rien ne permettait de donner raison à l’une ou l’autre de ces deux interprétations contradictoires. Rien ? Rien…jusqu’en 1953…
A suivre…
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NOTES:
*Hylozoïste : de Hylé=matière et zoé=vie. (Il y a de la vie dans la matière !)
*Voir le tome 3 des indices pensables : Le hasard n’écrit pas de messages.