« Marie, à l’Annonciation, à la Visitation, aux noces de Cana, va à contre-courant ; elle se met à l’écoute de Dieu, elle réfléchit et cherche à comprendre la réalité, et elle décide de se confier totalement à Dieu », explique le pape François qui a offert, pour la fête de la Visitation et la fin du mois de mai, une méditation sur « le réalisme, l’humanité, le sens du concret de Marie ». A l’école de Marie, il invite à unir toujours « écoute, décision, action », ce qui lui a inspiré à la fin une prière à la Vierge Marie.
Pour conclure le mois marial, le cardinal Angelo Comastri, vicaire général du pape pour la Cité du Vatican et archiprêtre de la basilique Saint-Pierre a en effet présidé ce vendredi soir, 31 mai, à 20h, place Saint-Pierre, la prière du chapelet. Au cours de la célébration, la statue de la Vierge Marie a été portée en procession.
Le pape François s’est uni à la prière de l’assemblée depuis le parvis de la basilique vaticane et, avant de donner la bénédiction apostolique aux fidèles présents, il a offert une méditation sur la Vierge de la Visitation.
Le pape a ensuite donné sa bénédiction et ajouté des remerciements avec le souhait que « Marie nous rende plus frères ». Il a conclu en souriant: « Bonne nuit et bon repos ».
Méditation du pape François
Chers frères et sœurs,
Ce soir, nous avons prié le chapelet ensemble ; nous avons parcouru à nouveau quelques événements du chemin de Jésus, de notre salut, et nous l’avons fait avec celle qui est notre Mère, Marie, celle qui nous guide d’une main sûre vers son fils Jésus. Toujours, Marie nous conduit à Jésus.
Nous célébrons aujourd’hui la fête de la Visitation de la Bienheureuse Vierge marie à sa cousine Elisabeth. Je voudrais méditer avec vous ce mystère qui montre comment Marie affronte le chemin de sa vie, avec beaucoup de réalisme, d’humanité, de sens du concret.
Trois mots résument le comportement de Marie : écoute, décision, action ; ce sont des mots qui indiquent une route pour nous aussi devant ce que le Seigneur nous demande dans notre vie.
1. L’écoute. Marie se rend chez sa cousine Elisabeth. D’où lui vient ce geste ? D’une parole de l’ange de Dieu : « Et voici qu’Elisabeth, ta parente, vient, elle aussi, de concevoir un fils dans sa vieillesse » (Lc 1,36). Marie sait écouter Dieu. Attention ! il ne s’agit pas simplement d’ « entendre » superficiellement, mais c’est une « écoute » faite d’attention, d’accueil, de disponibilité envers Dieu. Ce n’est pas la manière distraite que nous avons souvent de nous mettre devant le Seigneur ou les autres : nous entendons ce qu’ils disent, mais nous n’écoutons pas vraiment.
Marie est attentive à Dieu, elle écoute Dieu. Mais Marie écoute aussi les faits, c’est-à-dire qu’elle lit les événements de sa vie, elle est attentive à la réalité concrète et elle ne s’arrête pas à la superficie des choses, mais elle va en profondeur pour en saisir la signification. Sa cousine, Elisabeth, qui est déjà âgée, attend un enfant : voilà le fait. Mais Marie est attentive à sa signification, elle sait la saisir : « Rien n’est impossible à Dieu » (Lc 1,37).
Cela vaut aussi dans notre vie : l’écoute de Dieu qui nous parle, et l’écoute aussi de la réalité quotidienne, l’attention aux personnes, aux faits, parce que le Seigneur est à la porte de notre vie et il frappe de différentes manières, il met des signes sur notre chemin ; à nous d’être capables de les voir. Marie est la mère de l’écoute, écoute attentive de Dieu et écoute tout autant attentive des événements de la vie.
2. La décision. Marie ne vit pas « pressée », dans l’anxiété, mais, comme le souligne Luc, « elle méditait toutes ces choses en son cœur » (Lc 2,19;51). Et même au moment décisif de l’Annonciation de l’ange, elle demande « Comment cela sera-t-il ? » (Lc 1,14). Mais elle ne s’arrête pas non plus au moment de la réflexion ; elle fait un pas en avant : elle décide. Elle ne vit pas dans l’urgence, mais simplement lorsque c’est nécessaire, « elle part en hâte ».
Marie ne se laisse pas emporter par les événements, elle ne fait pas l’économie de l’effort de la décision. Et ceci non seulement lors du choix fondamental qui changera sa vie : « Je suis la servante du Seigneur… » (Lc 1,38) mais aussi dans les choix plus quotidiens mais riches aussi de signification. Il me vient à l’esprit l’épisode des noces de Cana (cf. Jn 2,1-11) : là aussi, on voit le réalisme, l’humanité, le sens du concret de Marie, qui est attentive aux faits, aux problèmes ; elle voit et comprend la difficulté de ces deux jeunes mariés auxquels le vin de la fête vient à manquer, elle réfléchit, sachant que Jésus peut faire quelque chose, et elle décide de s’adresser à son Fils pour qu’il intervienne : « Ils n’ont plus de vin » (cf. v.3). Elle décide.
Dans la vie, il est difficile de prendre des décisions, nous avons souvent tendance à les reporter, à laisser les autres décider à notre place, nous préférons souvent nous laisser porter par les événements, suivre l’air du temps ; parfois nous savons ce que nous devons faire, mais nous n’en avons pas le courage ou cela nous paraît trop difficile parce que cela signifie aller à contre-courant.
Marie, à l’Annonciation, à la Visitation, aux noces de Cana, va à contre-courant. Marie va à contre-courant. Elle se met à l’écoute de Dieu, elle réfléchit et cherche à comprendre la réalité, et elle décide de se confier totalement à Dieu ; elle décide, alors qu’elle est enceinte, de rendre visite à la vieille cousine, elle décide de faire confiance à son Fils, avec insistance, pour sauver la joie des noces.
3. L’action. Marie se mit en route et « se rendit en hâte… » (cf. Lc 1,39). Dimanche dernier, j’ai souligné cette façon de faire de Marie : malgré les difficultés, les critiques que lui aura values sa décision de partir, rien ne l’arrête. Et là, elle part « en hâte ». Dans la prière, devant Dieu qui parle, dans la réflexion et la méditation sur les faits de sa vie, Marie n’est pas pressée, elle ne se laisse pas prendre par le temps, elle ne se laisse pas emporter par les événements.
Mais quand elle voit clairement ce que Dieu lui demande, ce qu’elle doit faire, elle n’hésite pas, elle ne reporte pas mais elle va « en hâte ». Saint Ambroise fait le commentaire suivant : « Les lents calculs sont étrangers à la grâce de l’Esprit Saint » (Expos. Evang. Sec. Lucam, II, 19 : PL 15,1560). L’agir de Marie est une conséquence de son obéissance aux paroles de l’ange, mais unie à la charité : elle va chez Elisabeth pour se rendre utile ; et en sortant ainsi de chez elle, d’elle-même, par amour, elle apporte ce qu’elle a de plus précieux, Jésus ; elle apporte son Fils.
Parfois, nous-mêmes, nous nous arrêtons à l’écoute, à la réflexion sur ce que nous devrions faire, peut-être voyons-nous clairement la décision que nous devons prendre, mais nous ne passons pas à l’action. Et surtout, nous ne nous mettons pas en jeu pour apporter nous aussi, comme Marie, ce que nous avons de plus précieux et que nous avons reçu: Jésus et son Évangile, par la parole et surtout par le témoignage concret de notre agir. Marie, femme de l’écoute, de la décision, de l’action.
Marie, femme de l’écoute, fais que nos oreilles s’ouvrent ; fais que nous sachions écouter la Parole de ton Fils Jésus, au milieu des paroles de ce monde ; fais que nous sachions écouter la réalité dans laquelle nous vivons, chacune des personnes que nous rencontrons, en particulier celle qui est pauvre, qui est dans le besoin, en difficulté.
Marie
, femme de la décision, illumine notre esprit et notre cœur, pour que nous sachions obéir à la Parole de ton Fils Jésus, sans hésitation ; donne-nous le courage de la décision, de ne pas nous laisser porter pour que les autres orientent notre vie.
Marie, femme de l’action, fais que nos mains et nos pieds se dirigent « en hâte » vers les autres, pour apporter la charité et l’amour de ton Fils Jésus, pour apporter, comme toi, au monde la lumière de l’Évangile. Amen.
Traduction de Zenit, Hélène Ginabat
Avec Anita Bourdin