Homélie de Benoît XVI à Arezzo, 13 mai 2012

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L’attention aux plus faibles, inséparable de la défense de la vie

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Traduction d’Anne Kurian

ROME, lundi 14 mai 2012 (ZENIT.org) – Benoît XVI a exhorté à « témoigner de l’amour de Dieu dans l’attention aux plus faibles », qui est inséparable de « la défense de la vie, de son commencement jusqu’à sa fin naturelle ».

Le pape était en visite pastorale en Toscane, hier, 13 mai 2012. Il a notamment célébré une messe le matin, à Arezzo, en présence de quelque 30.000 personnes.

Dans son homélie, Benoît XVI a invité les catholiques à se faire « concrètement solidaire de celui qui est dans le besoin », en « partageant ses ressources », en « promouvant des styles de vie plus simples », en « luttant contre la culture de l’éphémère, qui a illusionné de nombreuses personnes, provoquant une profonde crise spirituelle ».

Il faut aussi, a ajouté le pape, « éduquer au dépassement des logiques purement matérialistes, qui souvent marquent notre époque, et finissent par brouiller le sens de la solidarité et de la charité. »

Homélie de Benoît XVI:

Chers frères et sœurs,

Ma joie est grande de pouvoir partager avec vous le pain de la Parole de Dieu et de l’Eucharistie. Je vous salue tous cordialement et je vous remercie de votre accueil chaleureux ! Je salue votre pasteur, Mgr Riccardo Fontana, que je remercie pour ses aimables paroles de bienvenue, les autres évêques, les prêtres, les religieux et les religieuses, les représentants des associations et des mouvements ecclésiaux. Je salue respectueusement le maire, Giuseppe Fanfani, que je remercie pour ses salutations, le sénateur Mario Monti, président du Conseil des Ministres, et les autres autorités civiles et militaires. J’adresse un remerciement spécial à ceux qui ont généreusement collaboré à cette visite pastorale.

Aujourd’hui, je suis accueilli par une Eglise ancienne, experte en relations et qui s’est distinguée au cours des siècles par son engagement pour construire la Cité de l’homme à l’image de la Cité de Dieu. Sur la terre de Toscane, la communauté d’Arezzo s’est en effet distinguée de nombreuses fois dans l’histoire pour son sens de la liberté, et sa capacité de dialogue avec les diverses composantes de la société. En venant pour la première fois parmi vous, je souhaite que la ville sache toujours faire fructifier cet héritage précieux.

Au cours des siècles passés, l’Eglise qui est à Arezzo a été enrichie et animée de multiples expressions de la foi chrétienne, parmi lesquelles celle des saints. Je pense en particulier à saint Donat, votre saint Patron, dont le témoignage de vie, qui a séduit le christianisme du moyen âge, est encore actuel. Il fut un évangélisateur intrépide, pour que tous soient libérés de leurs pratiques païennes et retrouvent dans la parole de Dieu la force pour affirmer la dignité de chaque personne et le vrai sens de la liberté. A travers sa prédication, il a ramené à l’unité, grâce à la prière et à l’eucharistie, les peuples pour lesquels il fut évêque. Le calice brisé et recomposé par saint Donat, dont parle saint Grégoire le Grand (cf. Dialogues I, 7, 3), est une image de l’œuvre pacificatrice accomplie par l’Eglise dans la société, pour le bien commun. C’est ce qu’atteste aussi saint Pierre Damien et avec lui la grande tradition Camaldule qui depuis mille ans, depuis le Casentino, offre sa richesse spirituelle à cette église diocésaine et à l’Eglise universelle.

Le bienheureux Grégoire X, pape, repose dans votre cathédrale, comme pour montrer, dans la diversité des époques et des cultures, la continuité du service que l’Eglise du Christ entend rendre au monde. Grégoire X, soutenu par la lumière qui venait de l’Ordre mendiant naissant, et par des théologiens et les saints, dont saint Thomas d’Aquin et saint Bonaventure de Bagnoregio, a affronté les grands problèmes de son temps: la réforme de l’Eglise; la réparation du schisme avec l’Orient chrétien, qu’il a tenté de réaliser avec le Concile de Lyon; l’attention pour la Terre sainte; la paix et la relation entre les peuples: il fut le premier en Occident à avoir un échange d’ambassadeurs avec l’empereur Kublai Khan de Chine.

Chers amis, la première lecture nous a présenté un moment important, où se manifeste vraiment l’universalité du message chrétien et de l’Eglise: saint Pierre, dans la maison de Corneille, baptise les premiers païens. Dans l’Ancien Testament, Dieu avait voulu que la bénédiction du peuple juif ne demeure pas exclusive, mais soit étendue à toutes les nations. Déjà lors de l’appel d’Abraham, il avait dit: «En toi seront bénies toutes les familles de la terre» (Gn 12,3). Et ainsi Pierre, inspiré par le Ciel, a compris que «Dieu ne fait pas de différence entre les hommes, mais, quelle que soit leur race, il accueille les hommes qui l’adorent et font ce qui est juste» (Ac 10,34-35). Le geste accompli par Pierre devient image de l’Eglise ouverte à l’humanité entière. Suivant la grande tradition de votre Eglise et de vos communautés, vous êtes d’authentiques témoins de l’amour de Dieu envers tous!

Mais comment pouvons-nous, avec notre faiblesse, porter cet amour? Dans la seconde lecture, saint Jean nous a dit avec force que la libération du péché et de ses conséquences n’est pas de notre initiative, mais de Dieu. Ce n’est pas nous qui l’avons aimé, mais c’est lui qui nous a aimés et qui a pris sur lui notre péché et l’a lavé par le sang du Christ. Dieu nous a aimés en premier et il veut que nous entrions dans sa communion d’amour, pour collaborer à son œuvre rédemptrice.

Dans le passage de l’Evangile, cet appel du Seigneur a résonné : «C’est moi qui vous ai choisis et établis afin que vous partiez, que vous donniez du fruit, et que votre fruit demeure» (Jn 15,16). C’est une parole adressée de façon particulière aux apôtres, mais, au sens large, elle concerne tous les disciples de Jésus. L’Eglise entière est envoyée dans le monde pour porter l’Evangile et le salut. Mais l’initiative est toujours de Dieu, qui appelle aux multiples ministères, pour que chacun participe personnellement au bien commun. Que l’on soit appelé au sacerdoce ministériel, à la vie consacrée, à la vie conjugale, à l’engagement dans le monde, à tous il est demandé de répondre avec générosité au Seigneur, soutenus par sa parole qui nous rassérène: «Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis» (ibidem).

Chers amis, je connais l’engagement de votre Eglise pour promouvoir la vie chrétienne. Soyez ferment dans la société, soyez des chrétiens présents, audacieux et cohérents. La ville d’Arezzo résume, dans son histoire plurimillénaire, des expressions significatives de culture et de valeurs. Parmi les trésors de votre tradition, il y a la fierté d’une identité chrétienne, témoignée par tant de signes et enracinée dans des dévotions comme celle envers Notre Dame de la Consolation. Cette terre, où sont nées de grandes personnalités de la Renaissance, de Pétrarque à Vasari, a eu une part active dans l’affirmation de cette conception de l’homme qui a influencé l’histoire d’Europe, tirant sa force des valeurs chrétiennes. Récemment encore, le patrimoine idéal de votre cité a été exprimé par quelques-uns de ses enfants les plus illustres, qui ont su élaborer le concept de civitas, dans leur recherche universitaire et dans d’autres institutions, en le définissant en termes d’idéal chrétien parmi les hommes de notre temps. Dans le contexte de l’Eglise en Italie, engagée actuellement sur le thème de l’éducation, nous devons nous demander, surtout dans la région qui est patrie de la Renaissance, quelle vis
ion de l’homme nous sommes en mesure de proposer aux nouvelles générations. La Parole de Dieu que nous avons écoutée est une invitation puissante à vivre l’amour de Dieu envers tous. Parmi ses valeurs distinctives, la culture de cette terre de Toscane vit la solidarité, l’attention aux plus faibles, le respect de la dignité de chacun. L’accueil, qu’encore récemment vous avez su donner à ceux qui sont venus en quête de liberté et de travail, est bien connu. Etre solidaire avec les pauvres c’est reconnaître le projet de Dieu créateur, qui a fait de tous une seule famille.

Bien sûr, votre province est aussi fortement éprouvée par la crise économique. A cause de la complexité des problèmes, il est difficile de trouver des solutions plus rapides et efficaces pour sortir de la situation présente, qui affecte surtout les plus faibles et préoccupe beaucoup les jeunes. Depuis les temps anciens, l’attention aux autres a conduit l’Eglise à se faire concrètement solidaire de celui qui est dans le besoin, en partageant ses ressources, en promouvant des styles de vie plus simples, en luttant contre la culture de l’éphémère, qui a trompé de nombreuses personnes, provoquant une profonde crise spirituelle. Que cette Eglise diocésaine, enrichie par le témoignage lumineux du Poverello d’Assise, continue à être attentive et solidaire de celui qui est dans le besoin, mais sache aussi éduquer au dépassement des logiques purement matérialistes, qui souvent marquent notre époque, et finissent par brouiller le sens de la solidarité et de la charité.

Témoigner de l’amour de Dieu dans l’attention aux plus faibles se conjugue aussi avec la défense de la vie, de son commencement jusqu’à sa fin naturelle. Dans votre région, assurer à tous la dignité, la santé et les droits fondamentaux est considéré à juste titre comme un bien indispensable. La défense de la famille, à travers des lois justes et capables de protéger aussi les plus faibles, constitue toujours un point important pour maintenir un tissu social solide et offrir des perspectives d’espérance pour le futur. De la même façon que les statuts de votre ville ont été, au moyen âge, instruments pour assurer des droits inaliénables à beaucoup, puisse l’engagement pour promouvoir une Cité au visage toujours plus humain être aujourd’hui poursuivi. En ceci, l’Eglise offre sa contribution pour que l’amour de Dieu soit toujours accompagné de celui du prochain.

Chers frères et sœurs, continuez le service de Dieu et de l’homme selon l’enseignement de Jésus, l’exemple lumineux de vos saints et la tradition de votre peuple. Dans cette tâche, que la protection maternelle de Notre Dame de la Consolation, tant aimée et vénérée par vous, vous accompagne et vous soutienne toujours. Amen!

© Libreria Editrice Vaticana

Traduction de ZENIT

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ZENIT Staff

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