ROME, Vendredi 6 mars 2009 (ZENIT.org) – Aux Philippines, l’Eglise catholique apporte son soutien à un projet de loi contre la pornographie, rapporte Eglises d’Asie (EDA), l’agence des Missions étrangères de Paris (MEP).
Aux Philippines, bien qu’illégale, la prostitution est omniprésente, certaines estimations faisant état de quelque 500 000 prostituées pour une population de 96 millions de personnes. La pornographie, quant à elle, n’est pas explicitement définie dans le Code pénal et un projet de loi est actuellement à l’étude au Congrès philippin visant à pénaliser la production, la distribution et la mise en évidence de matériel « pornographique et obscène ». L’Eglise catholique apporte son soutien à cette initiative.
Dans le sud philippin, Mgr Antonio Ledesma, archevêque de Cagayan de Oro, a pris l’habitude de réunir évêques catholiques et législateurs lors de forums destinés à des échanges de points de vue et d’informations. Récemment, lors de l’une de ces rencontres, il a expliqué que l’Eglise se devait de se mobiliser pour soutenir un projet contre la pornographie actuellement à l’étude. « Un tel projet ne peut qu’aider à défendre les valeurs morales dans notre société, a-t-il déclaré. Nous avons besoin d’un tel texte pour sauvegarder ce qui peut encore l’être de la moralité dans ce pays. »
Le 5 février dernier, la Chambre des représentants a voté la loi 3 305, intitulée : « Loi contre la pornographie et l’obscénité ». Celle-ci stipule que la réalisation, la production, l’impression, l’importation, la vente, la distribution et la mise en évidence de matériel pornographique ou obscène est un délit. Le sénat doit maintenant examiner le texte de loi, éventuellement le voter, avant de le transmettre au président de la République pour promulgation.
La prise de position des évêques catholiques rencontre des avis partagés. Sœur Flolyn Catungal est coordinatrice de la « Women and Gender Commission » de l’Association des supérieurs majeurs des Philippines ; à ce titre, elle est engagée dans des actions de dénonciation de la pornographie comme violence faite aux femmes. La pornographie est condamnable car elle est un facteur « de dégradation morale de la femme en tant que personne humaine », affirme-t-elle ; l’industrie qui est derrière ne vise qu’à « exploiter les femmes au nom de la loi du profit maximum et peut être assimilée à une forme de trafic d’êtres humains ». L’enjeu, poursuit la religieuse, est de faire en sorte que la loi soit réellement efficace pour empêcher que des personnes continuent de tirer profit de ce commerce.
Dans le milieu de l’industrie cinématographique, le projet de loi est dénoncé comme attentatoire à la liberté de création. Armida Sigueon-Reyna, actrice devenue réalisatrice, y voit une atteinte aux libertés individuelles, à la liberté d’expression notamment, garanties par la constitution. Selon elle, ce qui relève de la pornographie et de l’obscénité est trop vaguement défini dans la loi ; par conséquent, sa portée concrète sera laissée à la seule appréciation subjective des juges qui auront à la faire appliquer.
A Cagayan de Oro, à proximité de l’université catholique et d’un poste de police, les revendeurs de DVD ont pignon sur rue ; ils proposent à la vente toutes sortes de films, y compris des films pornographiques. Leur inquiétude n’a pas trait à la défense de la moralité ou de la liberté d’expression, mais à l’avenir de leur gagne-pain. Jun-Jun Marta, un jeune vendeur de journaux à la criée, s’interroge : « Ils sont nombreux ceux qui achètent des tabloïds avec des jeunes femmes dénudées en première page et des histoires de sexe en pages intérieures. Qu’est-ce que je vais devenir si la loi est votée ? »
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