Inde : Dans l’Assam, des catholiques agressés par un groupe hindouiste

500 catholiques aborigènes revenaient de l’ordination de l’un des leurs

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ROME, Mardi 10 février 2009 (ZENIT.org) – En Inde, dans l’Assam, des catholiques se sont fait agresser par un groupe hindouiste, a rapporté hier « Eglises d’Asie » (EDA), l’agence des Missions étrangères de Paris.

Le 24 janvier dernier, sur l’île de Majuli, dans l’Etat de l’Assam, dans le nord-est de l’Inde (1), des groupes d’extrémistes hindous ont agressé environ 500 catholiques aborigènes qui revenaient de l’ordination de l’un des leurs, le P. Hemanto Pegu, premier prêtre issu de l’ethnie Mishing (2). Les fidèles étaient venus de plusieurs paroisses en dehors de l’île afin d’assister à la célébration et s’en retournaient en passant par la ville de Kamalabari.

Le P. William Horo, chargé de communication pour le diocèse de Dibrugarh, dont dépend la région de Majuri, a condamné, dans une déclaration du 2 février, « l’attaque brutale » qui marque « une rupture dans une coexistence jusque-là harmonieuse » entre les différents groupes ethniques de l’Assam. Il rapporte également les faits concernant l’agression.

Un premier groupe de chrétiens traversait la ville de Kamalabari afin de rejoindre le bac qui franchit le fleuve Brahmapoutre sur lequel se trouve l’île, lorsqu’il a été arrêté par un groupe d’hommes et de femmes qui les ont insultés et menacés : « Pourquoi venez-vous convertir les aborigènes ? Sales mangeurs de viande, ne revenez jamais ici, sinon nous vous couperons en morceaux et nous les jetterons dans le Brahmapoutre ! » (3). Un peu plus tard, deux prêtres sont arrivés dans la ville en voiture, suivis de deux cars et d’un camion transportant des centaines de fidèles. La foule, encore plus virulente, les a fait sortir de force de leurs véhicules et les a frappés violemment à coups de pieds et coup de poings. « Voilà les missionnaires », ont-ils dit, « frappons-les et tuons les ! ». Ils ont également attaqué deux autres prêtres qui arrivaient en motocyclette et menacé de mort les fidèles s’ils s’avisaient de revenir dans l’île.

Certains des agresseurs ont couvert d’insultes les femmes et les religieuses qui les suppliaient d’épargner la vie des prêtres. Le groupe hindouiste a ensuite ordonné à tous les voyageurs de descendre des véhicules et de se rendre à pied jusqu’au départ du bac, à cinq kilomètres de là, sous les menaces et les jets de pierre, lesquels ont blessé plusieurs étudiants. Le P. Horo souligne que la violence des faits a fortement traumatisé les pèlerins, surtout les femmes et les enfants qui, près de deux semaines plus tard, ne s’en sont toujours pas remis.

L’agence Ucanews (4) rapporte que le 2 février, Mgr Jospeh Aind, évêque de Dibrugarh, a dénoncé vigoureusement cette atteinte aux droits de l’homme et a déclaré que l’agression avait eu pour résultat de diviser les chrétiens et les hindous de Majuli, qui avaient jusqu’ici vécu en bonne intelligence sur l’île (5). L’agression « a profondément blessé les sentiments de l’ethnie Mishing, en ne respectant pas leur appartenance religieuse », a déclaré le prélat (6).

Mgr Thomas Menamparampil, archevêque de Guwahati, le principal diocèse de l’Eglise catholique en Assam, a, pour sa part, appelé au dialogue entre Assaméens et communautés Mishing, afin de ne pas envenimer davantage la situation. Mgr Aind a également rejeté fermement l’allégation selon laquelle les catholiques auraient une démarche prosélyte envers les aborigènes de Majuli.

Selon Allen Brookes, l’un des responsables laïcs catholiques de l’Assam, les agresseurs étaient les membres d’une secte locale hindouiste et ne sont pas représentatifs de l’ensemble de la communauté hindoue de l’île. Il rappelle que Majuli sert de base à des groupes séparatistes qui s’indignent du fait que l’Eglise dirige de nombreuses écoles et mène des projets de développement sur l’île (7).

(1)            Majuli, située sur le fleuve Brahmapoutre, est considérée comme l’une des plus grandes îles fluviales au monde. Elle doit également sa célébrité à ses communautés de moines krishnaïtes (satras) qui pratiquent un art de la danse très ancien, le Sattriya. Aujourd’hui, il ne reste plus qu’une vingtaine de satras sur la soixantaine qu’abritait l’île autrefois, la surface de celle-ci étant grignotée à un rythme très rapide par le Brahmapoutre. Depuis 1991, plus de 35 villages ont été engloutis par le fleuve.

(2)            Les Mishing, l’ethnie mongoloïde qui forme la majorité des peuples aborigènes de l’est de l’Assam, vivent essentiellement le long du Brahmapoutre et se consacrent à agriculture. Ils forment une population pauvre, dépendante des crues annuelles du fleuve et en proie aux maladies générées par les eaux comme le paludisme.

(3)            Texte disponible dans son intégralité sur le site de Catholic Bishops’ Conference of India (CBCI).

(4)            Ucanews, 5 février 2009.

(5)            On compte une égale proportion d’Assaméens et d’aborigènes Mishing parmi les 160 000 habitants de Majuli. Pratiquement tous les Assaméens sont hindous, alors que les Mishings peuvent être chrétiens, animistes ou hindous.

(6)            Ucanews, 5 février 2009.

(7)            Le nationalisme se manifeste de façon sporadique à Majuli, généralement sous l’action de l’ULFA (United Liberation Front of Asom). Ses membres s’opposent à toute tentative de développement qu’ils perçoivent comme attentatoire à la pérennité de leurs traditions. L’une de leurs actions les plus violentes fut l’exécution, après l’avoir enlevé en 1997, de Sanjoy Gosh, un travailleur social qui œuvrait contre l’engloutissement progressif de Majuli par les eaux du Brahmapoutre.

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ZENIT Staff

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