ROME, Dimanche 30 mars 2008 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous la déclaration du P. Federico Lombardi, directeur de la salle de presse du Saint-Siège, en date du 27 mars, qui répond à une note critique publiée par le professeur Aref Ali Nayed, contre le baptême conféré par le pape, au cours de la veillée pascale, au vice-directeur du quotidien italien « Corriere della sera », Magdi Cristiano Allam. Aref Ali Nayed est directeur du « Royal Islamic Strategic Studies Center » et une figure clé dans le processus de dialogue entre chrétiens et musulmans lancé avec la « Lettre des 138 sages » à Benoît XVI et à des responsables chrétiens.
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Avant tout l’affirmation la plus significative de l’auteur est sans aucun doute la confirmation de sa volonté de poursuivre le dialogue d’approfondissement et de connaissance réciproque entre musulmans et chrétiens, et de ne pas mettre en question le parcours entamé avec la correspondance et les contacts établis depuis un an et demi entre les Sages musulmans signataires des fameuses Lettres et le Vatican, notamment par l’intermédiaire du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux. Ce parcours doit continuer, il est d’une extrême importance, il n’est pas interrompu, et il est prioritaire sur des épisodes qui peuvent être objets de malentendus.
En second lieu, administrer le baptême à une personne implique de reconnaître qu’elle a accueilli la foi chrétienne librement et sincèrement, dans ses articles fondamentaux, exprimés dans la « profession de foi ». Celle-ci est proclamée publiquement à l’occasion du baptême. Naturellement chaque croyant est libre de garder ses idées sur un très large éventail de questions et de problèmes pour lesquels existe un pluralisme légitime entre les chrétiens. Accueillir dans l’Église un nouveau croyant ne signifie pas, évidemment, épouser toutes ses idées et positions, en particulier sur des thèmes politiques et sociaux.
Le baptême de Magdi Cristiano Allam est une bonne occasion pour réaffirmer expressément ce principe fondamental. Il a le droit d’exprimer ses propres idées, qui restent évidemment des idées personnelles, sans devenir en aucune façon une expression officielle des positions du Pape ou du Saint-Siège.
En ce qui concerne le débat sur la leçon de Ratisbonne, les explications sur son interprétation correcte dans les intentions du Pape ont été fournies il y a longtemps et il n’y a donc aucune raison de les remettre en question. En même temps, certains des thèmes alors abordés, comme le rapport entre foi et raison, entre religion et violence, demeurent naturellement objet de réflexion et de débat et de positions différentes, étant donné qu’ils se réfèrent à des problèmes qui ne peuvent être résolus une fois pour toutes.
Troisièmement, la liturgie de la Veillée pascale a été célébrée comme chaque année, et la symbologie de la lumière et de l’obscurité en fait partie depuis toujours. C’est certainement une liturgie solennelle et la célébration à Saint Pierre par le Pape est une occasion très particulière. Mais accuser de « manichéisme » l’explication des symboles liturgiques de la part du Pape – qu’il donne chaque fois et dans laquelle il est passé maître – manifesterait plutôt une incompréhension de la liturgie catholique qu’une critique pertinente au discours de Benoît XVI.
Enfin, qu’il nous soit permis de manifester à notre tour notre peine pour ce que le professeur Nayed dit de l’éducation dans les écoles chrétiennes dans les pays à majorité musulmane, en émettant des objections sur le risque de prosélytisme. Il nous semble que la grande tradition d’engagement éducatif de l’Église catholique mérite une toute autre appréciation, y compris dans les pays majoritairement non chrétiens (non seulement en Égypte, mais aussi en Inde, au Japon, etc.), où depuis longtemps la grande majorité des étudiants des écoles et des universités catholiques sont non chrétiens et le sont tranquillement restés, tout en manifestant une grande estime pour l’éducation reçue. Nous ne pensons pas que l’accusation de manque de respect pour la dignité et la liberté de la personne humaine faite à l’Église soit méritée aujourd’hui. Tout autres sont les violations à la dignité et à la liberté de la personne humaine auxquelles il faut accorder une attention prioritaire. C’est peut-être aussi pour cela que le Pape a pris le risque de ce baptême : affirmer la liberté du choix religieux qui découle de la dignité de la personne humaine.
Quoiqu’il en soit, le professeur Aref Ali Nayed est un interlocuteur pour lequel nous gardons une très haute estime et avec lequel il vaut toujours la peine de débattre loyalement. Cela nous permet d’avoir confiance dans la poursuite du dialogue.
Traduit de l’italien par Radio Vatican