ROME, Jeudi 28 février 2008 (ZENIT.org) – Certains représentants juifs ont exprimé leur intention de poursuivre le dialogue avec l’Eglise catholique, au-delà des interprétations suscitées par la nouvelle prière du Vendredi saint proposée pour les communautés qui célèbrent la liturgie selon le rituel du Missel précédant le Concile Vatican II.
Les messages, dont certains sont adressés directement au Saint-Siège, arrivent après de dures critiques émises contre le texte de cette prière qui demande à ce que les fils du peuple élu, comme toutes les autres personnes, puissent arriver à reconnaître Jésus Christ et son Eglise (cf. Zenit des 6-7 février 2008).
Cette prière pour les juifs remplace celle qui était récitée avant le Concile Vatican II et dont certaines expressions avaient été perçues comme offensantes, en partie du fait de l’histoire difficile des relations entre chrétiens et juifs.
Le 7 février dernier, le cardinal Walter Kasper, président de la Commission pour les rapports religieux avec le judaïsme, a expliqué au micro de Radio Vatican que la prière, qui ne sera récitée que par quelques groupes restreints de catholiques, vu que les autres continueront à suivre celle que Paul VI avait introduite, reflète uniquement une profession de foi chrétienne et ne vise pas au prosélytisme.
« Le langage d’autrefois était souvent empreint de mépris, comme l’a dit Jules Isaac, un juif de renom. Mais aujourd’hui, il y a le respect dans la diversité », a précisé le cardinal Kasper.
Parmi les réactions figure celle de Jacob Neusner, professeur d’histoire et de théologie du judaïsme au Bard College qui, dans un article publié le 23 février dernier sur le journal allemand Die Tagespost, soutient la thèse du cardinal selon laquelle cette prière ne fait qu’exprimer l’identité chrétienne.
« Israël prie pour les nations, donc les autres Eglises monothéistes, y compris l’Eglise catholique, ont le droit d’en faire autant, et personne ne devrait se sentir offensé. Tout autre politique vis-à-vis des nations leur nierait le droit d’accéder au Dieu unique qu’Israël connaît dans la Torah », explique le professeur qui a enseigné à la Columbia University, à l’Université de Wisconsin-Milwaukee, à la Brandeis University, au Dartmouth College, à la Brown University et à l’Université de South Florida.
« La prière catholique exprime ce même esprit généreux qui caractérise le judaïsme dans son acte d’adoration. Le Royaume de Dieu ouvre ses portes à toute l’humanité et quand, au moment de l’adoration, les juifs demandent l’avènement rapide du royaume de Dieu, ils manifestent cette même liberté d’esprit qui caractérise le texte du pape pour la prière pour les juifs – mieux ‘saint Israël’ -, le Vendredi saint », ajoute-t-il.
« Aussi bien ‘il est de notre devoir’ que ‘prions pour les juifs’ réalisent la logique du monothéisme et son espérance eschatologique », conclut le professeur Neusner.
D’autres représentants d’importantes organisations juives ont envoyé au Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, l’organisme de référence de la Commission du Saint-Siège pour les rapports religieux avec le judaïsme, des messages dans lesquels ils lui font part de leur disponibilité à poursuivre le processus de dialogue ouvert avec le Concile Vatican II.
Le World Jewish Congress, par exemple, propose dans un message de poursuivre sur la voie difficile du dialogue pour approfondir justement, avec franchise, respect et l’ouverture d’esprit nécessaire, ces aspects qui blessent réciproquement les croyants des deux religions.
A la demande de certaines organisations juives, le cardinal Kasper a expliqué que le texte de la prière s’inspire de la Lettre aux Romains, chapitre 11, dans lequel on parle également du pacte ininterrompu entre Dieu et le peuple juif. La prière, souligne-t-il, abandonne tout entre les mains de Dieu et non entre les nôtres. On ne parle pas d’activité missionnaire.
Au delà du débat suscité autour de cette prière, la grande majorité des fidèles catholiques à travers le monde continuera de réciter la grande prière d’intercession de la liturgie de la passion du Vendredi saint selon le rituel du missel adopté en 1969 et entré en vigueur en 1970 sous le pontificat de Paul VI : « Prions pour les Juifs à qui Dieu a parlé, en premier : qu’ils progressent dans l’amour de son Nom et la fidélité à son Alliance ».
Jesús Colina