ROME, Dimanche 3 février 2008 (ZENIT.org) – Le motif des douze étoiles sur le drapeau de l’Union européenne est l’attribut typique du culte de Marie, affirme Mario Mauro, vice-président du Parlement européen, dans la seconde partie de l’entretien qu’il a accordé à ZENIT sur l’avenir de l’Europe et le rôle du christianisme dans ce processus. Pour la première partie, cf. ZENIT du 1er février.
Mario Mauro est professeur d’Histoire des Institutions européennes et auteur du livre Il Dio dell’Europa (Le Dieu de l’Europe, publié aux éd. Ares en Italie).
Zenit – Après la victoire sur la loi 40 et le Family Day en Italie, la proposition de moratoire sur l’avortement lancé par le journal italien « Il Foglio » rencontre un certain succès. Qu’en pensez-vous ?
M. Mauro – Comme à Londres, Madrid, Paris, Strasbourg, à Rome également les Italiens ont défilé dans les rues pour réaffirmer leur idée de vie et de famille comme « alternative » aux modèles que la société et la politique essaient de nous imposer. Un modèle qui place en son centre l’homme et sa recherche de la vérité.
Comment sera l’Italie dans trente ans ? Cette question implique tout le monde, qu’on soit de droite ou de gauche, catholiques et laïcs, de même que tout le monde doit se sentir concerné par l’évidente détérioration de la société italienne et son éclatante faiblesse à former de nouvelles générations.
Car une société libre qui ne parvient pas à former de nouveaux individus capables de gérer avec responsabilité la liberté, est destinée fatalement à voir son niveau d’autoritarisme augmenter.
J’évoquais tout à l’heure le récent discours du pape qui, le 7 janvier, a fait appel à la communauté internationale afin que le moratoire approuvé par l’ONU sur la peine de mort puisse stimuler le débat public sur le caractère sacré de la vie humaine. Le 8 janvier, Giuliano Ferrara, sur « Il Foglio », a fait sienne cette demande et lancé à son tour une proposition de moratoire sur l’avortement qui a immédiatement suscité un vif débat.
Je souhaite que les gouvernements et les organismes internationaux fassent toute la lumière sur l’emploi ambigu de termes comme la « santé reproductive » qui, dans leur application, tendent à standardiser la pratique de l’avortement. Les institutions internationales, comme les Nations unies et l’Union européenne, ne peuvent pas se transformer en une sorte de supermarché des droits ; elles sont nées pour favoriser la paix et le développement, autrement dit pour veiller sur la vie humaine et pour garantir la légitimité d’un droit naturel, que l’humanité entière utiliserait comme référence.
Zenit – Avec Elisa Chiappa vous avez écrit un livre pour enfants, Piccolo dizionario delle radici cristiane d’Europa (Petit dictionnaire des racines chrétiennes de l’Europe, aux éd Ares). Quelles sont les histoires, les personnages et les images que vous utilisez pour expliquer l’Europe chrétienne aux enfants ?
M. Mauro – Dans ce livre, nous avons essayé, Elisa et moi, de raconter aux plus petits l’histoire de l’Union européenne d’aujourd’hui, ce qu’elle a été et comment elle a mûri à travers les siècles, offrant aujourd’hui une physionomie précise de ce qu’elle sera, pour leur faire comprendre le monde et la civilisation dans lesquels ils sont nés et où ils auront eux aussi leur part à jouer quand ils seront grands.
Nous avons essayé de le faire sous forme de dictionnaire, en choisissant minutieusement les mots et en y insérant un texte très bref avec de jolies images de Benedetto Chieffo. Pour rendre encore plus simple et intéressante la connaissance de l’Europe, nous avons joint à ce livre un superbe jeu, Eurovia, le jeu du drapeau européen qui propose une course passionnante et instructive à travers tous les pays de l’Union.
Je suis convaincu que l’identité civile et nationale de l’Europe se fonde sur les racines culturelles et religieuses d’une tradition historique bimillénaire. Nous devons être capables aujourd’hui de dire ce que nous sommes. En quoi nous croyons.
Pour avoir une meilleure Europe nous devons recommencer à croire, à travailler, à nous battre pour elle. L’Europe est née chrétienne, sous la protection de saint Benoît de Nursie, des saints Cyrille et Méthode, de sainte Catherine de Sienne, de sainte Brigitte de Suède, de sainte Thérèse Bénédicte de la Croix, Edith Stein ; elle ne peut être la proie de mystification et d’instrumentalisation. Un exemple suffit.
La référence au christianisme est présente sur un symbole par excellence, le drapeau, car ces douze étoiles viennent du culte de la Vierge Marie et sont liées au nombre d’Etats membres. Beaucoup l’ignorent car la véritable origine du drapeau à douze étoiles a été l’objet d’un coupable oubli au sein même des institutions communautaires.
Un autre pas se révèle nécessaire : la société tout entière a devant elle une nouvelle occasion de se retrouver et de retrouver sa propre identité, son propre visage, mais également son but, la raison pour laquelle nous sommes ce que nous sommes.
Avons-nous oui ou non le devoir de relever ce défi ? Ce dictionnaire veut être clair et restituer la signification des mots qui définissent l’Europe. Un premier pas vers le défi auquel nous sommes appelés.
Zenit – Jeudi 10 janvier, vous avez présidé la session plénière pour la signature de la Charte des musulmans européens, ouvrant les travaux par un discours. Pouvez-vous nous dire de quoi il s’agit ? Quelle signification donner à ce document à un moment où l’Union européenne a décidé de consacrer cette année au dialogue interreligieux ? Avez-vous prévu d’autres occasions de débat ?
M. Mauro – Plus de 400 organisations musulmanes provenant de 28 pays du continent, y compris la Turquie, ont signé la Charte des musulmans d’Europe, élaborée sous l’égide de la Fédération des organisations islamiques en Europe.
Les 26 points du document rappellent les droits et les responsabilités des musulmans, invités à « une intégration positive », à la parité entre l’homme et la femme et au rejet du terrorisme fondamentaliste.
La Charte constitue un code islamique de bonne conduite, qui engage la communauté musulmane européenne à participer à la construction d’une Europe commune et d’une société unie, à participer également au développement de l’harmonie et du bien-être dans nos sociétés et à remplir pleinement son rôle de citoyen dans le respect de la justice, de l’égalité des droits et de la différence.
Pour la première fois, une Charte donne un code de bonne conduite aux musulmans d’Europe qui ne doit pas être en contradiction avec les législations européennes. Il s’agit d’un excellent coup de pouce pour renforcer le dialogue interculturel et interreligieux. Et il est encourageant de voir qu’une partie des droits énoncés dans la Charte est consacrée à la famille comme condition indispensable au bonheur des individus et pour une société stable, et qu’il y a une ouverture à la parité entre l’homme et la femme.
Propos recueillis par Antonio Gaspari
Traduit de l’italien par Isabelle Cousturié