ROME, Vendredi 11 mai 2007 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le commentaire de l’Evangile du Dimanche 13 mai, proposé par le père Raniero Cantalamessa OFM Cap, prédicateur de la Maison pontificale.
Evangile de Jésus Christ selon saint Jean 14, 23-29
Jésus lui répondit : « Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui. Celui qui ne m’aime pas ne restera pas fidèle à mes paroles. Or, la parole que vous entendez n’est pas de moi : elle est du Père, qui m’a envoyé. Je vous dis tout cela pendant que je demeure encore avec vous ; mais le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit.
C’est la paix que je vous laisse, c’est ma paix que je vous donne ; ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne. Ne soyez donc pas bouleversés et effrayés. Vous avez entendu ce que je vous ai dit : Je m’en vais, et je reviens vers vous. Si vous m’aimiez, vous seriez dans la joie puisque je pars vers le Père, car le Père est plus grand que moi. Je vous ai dit toutes ces choses maintenant, avant qu’elles n’arrivent ; ainsi, lorsqu’elles arriveront, vous croirez.
© AELF
« C’est la paix que je vous laisse, c’est ma paix que je vous donne ; ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne ». De quelle paix Jésus parle-t-il dans ce passage de l’Evangile ? Il ne parle pas de la paix extérieure dans le sens de l’absence de guerre et de conflits entre personnes ou nations diverses. En d’autres occasions il parle également de cette paix-là ; par exemple lorsqu’il dit : « Heureux les artisans de paix car ils seront appelés fils de Dieu ». Ici, il parle d’une autre paix, la paix intérieure, du cœur, de la personne avec elle-même et avec Dieu. On le comprend en lisant ce qu’il ajoute immédiatement après : « Ne soyez donc pas bouleversés et effrayés ». Ceci est la paix fondamentale, sans laquelle aucune autre paix ne peut exister. Des milliards de gouttes d’eau sale ne font pas une mer propre et des milliards de cœurs inquiets ne font pas une humanité en paix.
La parole utilisée par Jésus est shalom. C’est celle qu’utilisaient – et qu’utilisent toujours – les Juifs pour se saluer ; c’est la parole avec laquelle il a lui-même salué les disciples le soir de Pâques et avec laquelle il ordonne de saluer les personnes : « Dans toute maison où vous entrerez, dites d’abord : ‘Paix à cette maison’ ». (Lc 10, 5-6).
Nous devons partir de la Bible pour comprendre le sens de la paix que donne le Christ. Dans la Bible, le mot shalom signifie davantage qu’une simple absence de guerre et de troubles. Il indique de manière positive le bien-être, le repos, la sécurité, le succès, la gloire. L’Ecriture parle même de la « paix de Dieu » (Ph 4, 7) et du « Dieu de la paix » (Rm 15, 32). Le mot Paix n’indique donc pas seulement ce que Dieu donne, mais également ce que Dieu est. Dans l’un de ses hymnes, l’Eglise appelle la Trinité « océan de paix ».
Ceci signifie que l’on ne peut jamais obtenir totalement et de manière stable cette paix du cœur que nous désirons tous, sans Dieu, en dehors de lui. Dante Alighieri a synthétisé tout cela dans un vers que certains considèrent comme le plus beau de toute la « Divine Comédie » : « Dans sa volonté, notre paix ».
Jésus fait comprendre ce qui s’oppose à cette paix : l’inquiétude, l’angoisse, la peur : « Ne soyez donc pas bouleversés et effrayés ». Facile à dire ! rétorqueront certains. Comment calmer l’angoisse, l’inquiétude, la nervosité qui nous dévorent tous et nous empêchent de jouir d’un peu de paix ? Certaines personnes sont plus exposées que d’autres à cela. S’il existe un danger, elles lui donnent des proportions gigantesques, s’il y a une difficulté, elles la multiplient par cent. Tout devient motif d’angoisse.
L’Evangile ne promet pas de panacée pour ces maux ; dans une certaine mesure ils font partie de notre condition humaine, exposés comme nous le sommes à des forces et des menaces qui nous dépassent. Mais il indique un remède. Le chapitre d’où est tiré le passage de l’Evangile d’aujourd’hui commence ainsi : « Que votre cœur cesse de se troubler ! Croyez en Dieu, croyez aussi en moi » (Jn 14, 1). Le remède est la confiance en Dieu.
Après la dernière guerre, un ouvrage intitulé Dernières lettres de Stalingrad a été publié. Il s’agissait de lettres de soldats allemands faits prisonniers lors du sac de Stalingrad, parties dans le dernier convoi avant l’assaut final de l’armée russe au cours duquel tous les soldats périrent. Dans l’une de ces lettres retrouvées à la fin de la guerre, un jeune soldat écrivait ceci à ses parents : « Je n’ai pas peur de la mort. Ma foi me donne cette belle sécurité ! »
Maintenant, nous savons ce que nous nous souhaitons les uns les autres, lorsqu’en nous serrant la main, au cours de la messe, nous échangeons un vœu de paix. Nous nous souhaitons les uns les autres le bien-être, la santé, de bonnes relations avec Dieu, avec nous-mêmes et notre prochain. Nous nous souhaitons en somme d’avoir le cœur rempli de la « paix du Christ qui dépasse toute intelligence ».