ROME, Jeudi 19 avril 2007 (ZENIT.org) – Ce jeudi 19 avril a été le deuxième jour férié de la semaine, au Vatican, en raison du 2e anniversaire de l’élection du pape Benoît XVI, après lundi 16, jour de son 80e anniversaire. Une semaine propre à solliciter la mémoire des images et des paroles de ces deux années.
La messe de dimanche dernier, 15 avril avait anticipé les célébrations, et les autres festivités avaient eu lieu lundi. La journée de ce jeudi n’a donc été marquée au Vatican que par l’absence d’audience et le congé accordé à tous.
A 17 h 50, le 19 avril 2005, la fumée blanche de la cheminée de la chapelle Sixtine indiquait que le nouveau pape avait été élu, rapidement, par les cardinaux réunis en conclave, devant la fresque du Jugement dernier de Michel Ange.
Le pape de la paix
De la loggia des bénédictions, le cardinal protodiacre Jorge Arturo Medina Estévez annonçait ensuite que le nouveau successeur de Pierre choisissait le nom de Benoît XVI : un nom inspiré par le pape Benoît XV, le pape de la paix, en pleine première guerre mondiale, et par le fondateur du monachisme occidental, saint Benoît de Nursie, co-patron de l’Europe.
A l’instar de ses prédécesseurs, spécialement depuis Benoît XV, et selon la devise des Bénédictins – « Pax » – Benoît XVI est lui aussi un pèlerin de la paix. Ne vient-il pas, hier soir, d’accepter une invitation au siège des Nations Unies à New York, pour travailler au service de la paix entre les peuples ?
Ses premières paroles allaient conquérir les cœurs par leur simplicité : « Chers frères et sœurs, après le grand pape Jean-Paul II, messieurs les cardinaux m’ont élu, moi, un simple et humble travailleur dans la vigne du Seigneur ».
En deux années de ministère pétrinien, quelque 7 millions et demi de personnes ont été attirées à Rome par Benoît XVI.
Il a accompli trois voyages en Italie – le 4e étant pour ce week-end auprès du tombeau de saint Augustin à Pavie – et 5 voyages internationaux, dont le 6e sera le voyage au Brésil du 9 au 14 mai. Parmi les événements historiques marquants de ces voyages, on a retenu la visite du pape Ratzinger à Auschwitz, et sa visite de la mosquée bleue d’Istanbul.
L’amour et la raison
Trois publications ont marqué ces deux années. Le pape a publié sa première encyclique, sur l’amour chrétien : « Dieu est amour », et sa première exhortation apostolique post synodale sur l’Eucharistie : « Le sacrement de l’amour ». Le théologien Joseph Ratzinger vient de publier, justement pour ses 80 ans, le premier volume de son livre exégétique sur Jésus : « Jésus de Nazareth. Du baptême à la transfiguration ».
Son insistance sur l’amour transparaît dans toutes ses interventions, comme lors de l’angélus du 18 février dernier : L’amour des ennemis » est « la grande charte de la non-violence chrétienne »: ce n’est pas une « tactique » des chrétiens, soulignait le pape, mais la « nouveauté révolutionnaire » de l’Evangile.
En même temps, le pape insiste sur le caractère rationnel de la foi, qui rend possible le dialogue avec tout homme. Mercredi 18, il disait encore aux francophones présents à l’audience générale : « Je vous invite à associer dans votre démarche l’ouverture de la raison et la bonté du cœur, pour progresser dans la connaissance du mystère du Christ ».
Vatican II et l’Europe
Voulant poursuivre la mise en œuvre du concile Vatican II (cf. Discours à la curie, décembre 2005), le pape travaille intensément à l’œcuménisme : ses voyages l’ont montré et spécialement sa rencontre à Istanbul avec le patriarche Bartholomaios, à l’occasion de la fête de saint André, saint patron du patriarcat de Constantinople. Il a annoncé cette tâche de la recherche de l’unité, dès sa première homélie, comme une des priorités du pontificat. Des délégations de Constantinople et de Moscou étaient présentes aux fêtes de dimanche et lundi.
Le dialogue interreligieux a aussi eu une place importance ces deux années : rencontre à la synagogue de Cologne, en août 2005, et voyage en Turquie en novembre 2006, sans compter les rencontres à venir comme la visite de l’ancien président iranien Khatami au Vatican.
La crise due au malentendu sur son discours de Ratisbonne, en septembre dernier, semble n’avoir fait que stimuler les relations avec l’Islam. Et des messages de bon anniversaire sont parvenus cette semaine de milieux juifs et de milieux musulmans.
L’Europe est aussi dans les préoccupations du pape : il voit le risque non qu’elle renie Dieu mais qu’elle se renie elle-même en reniant ses racines chrétiennes, en professant relativisme et sécularisation, comme il l’a rappelé récemment dans son discours pour les 50 ans du Traité de Rome.
Surtout, le pape n’hésite pas à rappeler les valeurs fondamentales de la société : le respect de la vie et de la dignité de toute personne humaine, de la famille, quitte à être taxé d’ingérence dans les affaires de l’Italie par exemple, où à être boudé par le Premier ministre espagnol lors de son voyage à Valence en juillet dernier.
Mais le pape a mis les choses au point : l’Eglise ne demande aucun privilège pour elle-même, elle ne s’occupe pas davantage de politique, mais elle demande de pouvoir exercer sa mission au service de l’homme en toute liberté, en Europe comme ailleurs.
La prière, question de vie ou de mort
Or, cette mission de l’Eglise ne peut s’accomplir sans la priorité donnée à « l’amitié avec Jésus », comme il le recommande aux jeunes, à la prière, à la méditation de la Parole de Dieu, à l’Eucharistie. Le 3 mars dernier, le pape disait à l’angélus : La prière est une question « de vie ou de mort » : « Prier n’est pas s’évader de la réalité et des responsabilités qu’elle comporte, mais les assumer à fond ».
« Dieu est amour et son amour est le secret de notre bonheur », disait encore le pape, lors de l’audience générale du 21 février. Cette morale, cette mystique du bonheur, Benoît XVI la doit en particulier à saint Augustin, un ami qu’il ira trouver dimanche prochain, à Pavie.
Musicien, Benoît joue chaque jour du piano, et il a accepté de poser au piano pour le premier calendrier pour lequel un pape ait jamais posé, l’été dernier, à Castelgandolfo : la vente a eu lieu, grâce aux éditions San Paolo au profit d’un orphelinat du Rwanda : une œuvre choisie par le pape lui-même. Il vient de rendre grâce pour le don de la musique comme une « compagne de voyage » dans toute sa vie, et il est sensible à la beauté du chant liturgique. Il voit dans l’harmonie de la musique l’harmonie même de la vie en Dieu, dans la beauté de la musique une voie « universelle » d’accès à la Beauté de Dieu (Concert du 16 avril 2007).
La création et les pauvres
Le pape profite d’une excursion dans les Alpes pour aller admirer et caresser des chiens Saint-Bernard. Il a placé l’ours de saint Corbinien sur son blason, et voit dans toute la création, la main du créateur et rédempteur, et ne cesse pas enfin de rappeler à l’humanité qu’elle ne peut se respecter elle-même si elle ne respecte pas les biens de la création et si elle ne choisit pas de les partager en toute équité avec les plus pauvres, spécialement l’eau.
Lors de la messe pour la fête du Saint-Sacrement, il disait, l’an dernier: « A une époque où l’on évoque la désertification, il faut à nouveau mettre en garde contre un danger qui pourrait conduire à la mort par la soif de beaucoup d’hommes et d’animaux dans des régions privées d’eau. Nous nous rendons mieux compte ainsi de la grandeur du don que représente l’eau, matière que nous ne sommes pas en mesu
re de nous procurer par nous-mêmes » (Corpus Domini, 15 juin 2006). Il ajoutait : « Regardons donc de plus près ce fragment d’hostie qui est le pain des pauvres, comme une synthèse de la création ».
Son voyage au Brésil sera pour le pape l’occasion de rappeler la fameuse option préférentielle de l’Eglise pour les pauvres. Il vient de le répéter à propos de l’Angola mercredi 18 avril, en portugais: « Je rappelle aux autorités religieuses et civiles l’obligation de privilégier les pauvres ».
Le principe marial
Enfin, une note spécifique de ce pontificat est la place donnée à la femme dans l’Eglise, à la suite de « Mulieris Dignitatem » et de la « Lettre aux femmes » de Jean-Paul II. Benoît XVI en a parlé à plusieurs reprises, à son clergé par exemple. En tant que préfet de la Doctrine de la foi, il s’était assuré de la collaboration de théologiennes, comme Marie Hendrickx.
Le triduum pascal 2007 a été marqué par cette tonalité féminine, non seulement grâce à une audacieuse et profonde homélie du Prédicateur du pape, le P. Raniero Cantalamessa, capucin, grâce aussi aux réflexions du P. Gianfranco Ravasi pour le Chemin de Croix au Colisée, et grâce au geste du pape qui a conféré les sacrements de l’initiation chrétienne à six femmes au cours de la veillée pascale.
Lors de la messe pour ses deux anniversaires, dimanche dernier, le pape a certes rendu grâce à Dieu pour son père et pour son frère, mais aussi pour sa mère et pour sa sœur, et pour avoir fait l’expérience dès son enfance de ce que signifie d’avoir une « famille », et d’être membre de la « Famille de Dieu » qui est l’Eglise.
En effet, Benoît XVI souligne l’importance du « principe marial » dans l’Eglise, aux côtés du « principe pétrinien » (8 décembre 2005, place d’Espagne). Il ne manque jamais d’indiquer la Femme par excellence, Marie, icône de l’Eglise, Mère du Verbe incarné, Mère de miséricorde. En Bavière, il s’est rendu à Altötting, le sanctuaire fréquenté dès l’enfance. En Turquie, il s’est rendu à la maison de Marie, à Ephèse. Les 1er et 2 septembre 2007, le pape se rendra au sanctuaire marial de la sainte Maison de Nazareth à Lorette, dans le diocèse italien des Marches. Il y présidera une rencontre avec les jeunes et la messe dominicale. Le thème de la rencontre sera : « Avec Marie, en dialogue avec Jésus ».