ROME, Lundi 24 avril 2006 (ZENIT.org) – Selon l’évêque de Hongkong, le Saint-Siège et Pékin sont entrés dans une phase de négociations au sujet de la normalisation de leurs relations, indique « Eglises d’Asie », l’agence des missions étrangères de Paris (EDA 439, cf. eglasie.mepasie.org).
Le 25 mars, à Rome, le secrétaire du Saint-Siège pour les relations avec les Etats déclarait que « les temps [étaient] mûrs » pour une éventuelle normalisation des relations sino-vaticanes (1). Le 3 avril, à Pékin, dans un article du très officiel quotidien anglophone China Daily, le directeur de l’Administration d’Etat pour les Affaires religieuses déclarait que « le contact » entre les deux parties était « continu, même s’il était difficile de fixer un calendrier » pour une normalisation des relations. Le 9 avril, l’évêque de Hongkong, Mgr Joseph Zen Ze-kiun, s’est montré plus précis. Lors d’une émission télévisée, il a déclaré qu’à son avis, les rencontres entre des représentants du Vatican et des représentants des autorités chinoises allaient au-delà de simples « contacts ». « Mon impression est qu’ils sont entrés dans une phase de réels pourparlers », a-t-il précisé, ajoutant que les négociations se déroulaient à Rome.
A son interviewer, Mgr Zen a dit qu’un point de friction, dans ces négociations, était la nomination des évêques. Il a précisé que le Vatican était prêt à accepter que le Saint-Siège présente à la Chine une liste de candidats pour les sièges épiscopaux à pourvoir tout en autorisant Pékin à faire connaître son opinion sur ces candidatures ; toutefois, la décision finale appartiendrait au Vatican. « Le mot de la fin ne peut pas exclusivement être du côté d’un gouvernement professant l’athéisme », a déclaré Mgr Zen.
L’évêque de Hongkong a également précisé qu’une des conditions du Vatican pour l’établissement de relations diplomatiques était que la liberté religieuse prévale en Chine. Il a immédiatement ajouté que le Vatican n’insistait pas pour que la liberté religieuse y soit absolue. Interrogé sur le degré de liberté religieuse existant aujourd’hui en Chine, il a répondu : « Je pense que nous pouvons espérer que la cage s’agrandisse et nous espérons qu’en fin de compte, ils laissent les oiseaux s’envoler. » Allusion à des propos tenus en 1994 par un haut représentant du Vatican en visite à Hanoi qui comparait, devant des officiels gouvernementaux vietnamiens, la liberté de l’Eglise catholique au Vietnam à celle d’un oiseau en cage.
A propos de la déclaration de Ye Xiaowen, directeur de l’Administration d’Etat pour les Affaires religieuses, le China Daily a écrit, dans son article du 3 avril, que c’était « la première fois que la Chine commentait directement la question délicate [des relations diplomatiques sino-vaticanes] depuis que Benoît XVI, successeur du pape Jean-Paul II, en avait fait une de ses priorités ». Le journal poursuivait en rappelant la citation de Mgr Giovanni Lajolo : « Les temps sont mûrs » et ajoutait immédiatement que Ye Xiaowen avait répété que tout dépendait de l’acceptation ou non par le Vatican des deux principes de base posés par Pékin, à savoir « rompre les relations du Vatican avec Taiwan » et « s’abstenir de s’occuper des affaires internes de la Chine ».
« Nous pouvons établir des relations diplomatiques avec le Vatican très prochainement si les deux principes sont acceptés », a précisé Ye Xiaowen. Mais il est très difficile pour nous de le faire si les deux principes sont violés. » L’article rappelle que le Saint-Siège, « seul pays européen à reconnaître Taiwan », a fait part d’« une certaine flexibilité » quant au transfert de ses liens diplomatiques de « l’île à la Chine ». Il souligne aussi qu’« une des pierres d’achoppement restantes » découle « de la demande du Vatican de laisser le pape avoir l’autorité suprême pour la nomination des évêques en Chine ». Un point perçu par Pékin comme « une ingérence dans ses affaires intérieures ». Tout en soulignant le fait que la Chine populaire a toujours « nommé et consacré [ses] propres évêques » – « ce sur quoi nous devons rester fermes » –, Ye Xiaowen a insisté, selon le journal anglophone, pour dire que « la Chine devra avoir son mot à dire pour la nomination de ses propres évêques ». Une déclaration, relèvent les observateurs, qui indique que la Chine accepte que la responsabilité de la nomination des évêques soit, d’une manière ou d’une autre, partagée avec le pape.
Quant à l’évolution des structures de l’Eglise en Chine, l’article du China Daily ne laisse pas entrevoir de grande évolution. Il est rappelé que l’Association patriotique des catholiques chinois, fondée en 1957, « ne reconnaît pas l’autorité du pape et nomme ses propres évêques ». La Conférence des évêques « officiels » n’est pas ici mentionnée. L’article se veut toutefois optimiste : « Les remarques [de Ye Xiaowen] peuvent être lues comme s’intégrant dans les efforts actifs de Pékin pour améliorer les relations avec le Vatican sur la base des deux principes de base. »
A Shanghai, un professeur de l’université Fudan, spécialiste des questions religieuses, a déclaré au quotidien hongkongais The South China Morning Post que les propos de Ye Xiaowen avait ceci de positif qu’ils reflétaient « la sincérité de la Chine dans la tenue de pourparlers », mais il ne faut pas, selon lui, en tirer de conclusions hâtives. « Il est improbable que les deux parties parviennent rapidement à un consensus ou s’entendent sur des avancées majeures, car l’une et l’autre savent jusqu’où elles ne veulent pas aller trop loin et estiment qu’il est difficile de parvenir à un compromis là-dessus », a déclaré Xu Yihua (2). Le 12 avril, l’agence officielle Xinhua a diffusé une dépêche faisant état des propos d’un haut responsable des Affaires religieuses. « La Chine n’a pas fixé de calendrier quant à l’établissement de relations diplomatiques avec le Vatican », pouvait-on lire, et les deux parties n’ont pas de plan quant une normalisation avant 2008, année où les Jeux olympiques se dérouleront à Pékin.