Quatre évêques de Chine populaire nommés au synode

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« Quelque chose a changé »

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ROME, Jeudi 8 septembre 2005 (ZENIT.org) – Quatre évêques de Chine populaire ont été nommés par Benoît XVI comme membres du prochain synode des évêques sur l’Eucharistie (2-23 octobre). « Quelque chose a changé », estiment les observateurs.

On se souvient que lors de l’ouverture du synode des évêques pour l’Asie, en 1998 (19 avril-14 mai 1998), le pape Jean-Paul II avait invité publiquement deux évêques chinois, mais le gouvernement ne leur avait pas donné le droit de sortir du pays : à savoir l’évêque Matthias Duan Yinming, évêque de Wanxian, et son coadjuteur l’évêque Joseph Xu Zhixuan, pourtant de l’Eglise officielle, même si le premier avait été nommé par Pie XII, en 1949 : il était le dernier évêque chinois vivant en Chine continentale à avoir été nommé avant la prise du pouvoir par les communistes. Deux fauteuils vides avaient été disposés dans la salle du synode.

Or, sept ans plus tard, parmi les 36 évêques de nomination pontificale pour le nouveau synode, on lit les noms de Mgr Antoine Li Du’an, évêque de Xi’an, dans la province du Shaanxi, et Mgr Louis Jin Luxian, évêque de Shanghai, tous deux connus par le gouvernement. Mais l’agence « Eglises d’Asie », des Missions étrangères de Paris (eglasie.mepasie.org), rappelle aujourd’hui que leur qualité épiscopale a été reconnue par le Saint-Siège, et qu’ils ont récemment reçu des évêques auxiliaires pour les aider dans leur mission pastorale.

EDA ajoute que, âgé de 78 ans, Mgr Li Du’an souffre d’un cancer du foie. Agé de 89 ans et affaibli par la maladie, Mgr Jin Luxian a dû pour sa part être hospitalisé à plusieurs reprises ces derniers mois. « Ces dernières semaines, la nomination de ces évêques auxiliaires a retenu l’attention dans la mesure où elles avaient été reconnues par le pape et approuvées par le gouvernement chinois », souligne la même source.

Les deux autres évêques sont, explique EDA, « des personnalités bien connues de l’Eglise « clandestine » et ont régulièrement eu affaire à la Sécurité publique et à l’administration des Affaires religieuses, qui exercent des pressions sur les catholiques « clandestins » dans le but de les voir rejoindre les structures de l’Association patriotique ».

Le troisième évêque est en effet Mgr Joseph Wei Jingyi, évêque de Qiqihar, dans la province du Heilongjiang, non reconnu par le gouvernement. EDA précise que, consacré évêque du diocèse de Fengxiang en 1980, Mgr Luc Li, âgé de 85 ans, anime une communauté catholique qui présente la particularité d’être entièrement « clandestine » : « la trentaine de prêtres, la trentaine de religieuses et les 20.000 fidèles de ce diocèse refusent en effet de rejoindre les structures de l’Eglise « officielle », en dépit des campagnes lancées en ce sens par les autorités locales. De ce fait, la cathédrale, les églises, le séminaire et les différentes organisations de ce diocèse sont certes « clandestines » mais bien visibles aux yeux de tous ».

Le quatrième évêque de Chine continentale est Mgr Luc Li Jingfeng, évêque de Fengxiang, dans le Shaanxi. Il a été reconnu depuis peu par le gouvernement. Mgr Joseph Wei Jingyi appartient en effet « à cette génération de jeunes prêtres qui accède aux responsabilités dans l’Eglise de Chine ».

Agé de 48 ans, Mgr Wei est né, explique EDA, en mai 1958 dans une famille originaire de Baoding, dans le Hebei, qui avait fui la famine consécutive au « Grand Bond en avant » en partant s’installer dans le Nord-Est chinois. Il a été formé à la prêtrise au début des années 1980 alors que l’Eglise catholique commençait tout juste à se relever après la Révolution culturelle (1966-1976).

Ordonné prêtre en 1985, il est arrêté en 1987 à Qiqihar pour avoir fait imprimer des livres religieux sans autorisation préalable. Emprisonné sans avoir été jugé, il est libéré en 1989 puis tente d’organiser avec son évêque, Mgr Guo Wenzhi, une Conférence épiscopale « clandestine », dont il devient le secrétaire général. Arrêté en 1990, ainsi que tous ceux qui avaient pris part à une réunion de cette conférence clandestine, il est condamné à trois ans de rééducation par le travail puis sort de camp au bout de deux ans, en 1992. Son évêque étant très âgé et malade, il est nommé, en accord avec le Saint-Siège, évêque coadjuteur de Qiqihar en 1995.

Depuis le retrait de Mgr Guo, il est l’évêque en titre du diocèse de Qiqihar. Très actif, il est régulièrement interpellé par la police. Sa dernière arrestation remonte au mois de mars 2004 : il avait alors été rapidement libéré, après dix jours de détention, le Saint-Siège ayant publiquement protesté contre son arrestation, toujours selon la même source.

Le Vatican espère qu’il leur sera permis à tous les quatre de venir participer au synode. En Chine, rappelons-le, le gouvernement permet la pratique religieuse avec un clergé reconnu et inscrit dans l’Association patriotique, et dans des lieux également enregistrés par le Bureau des Affaires religieuses, et sous le contrôle de l’Association patriotique. Les fidèles qui cherchent à échapper à ce contrôle constituent l’Eglise non-officielle, considérée comme une organisation illégale.

Le choix de 4 évêques représentant les différentes tendances de l’Eglise chinoise manifeste la perception du Saint-Siège de « l’unité » de l’Eglise de Chine, souligne « Asia News » qui précise: « Au moins 85 % des évêques de l’Eglise officielle ont demandé à se réconcilier avec Rome. De plus, ces derniers mois, le pape a nommé à Shanghai et à Xian des évêques pour lesquels le gouvernement a donné son assentiment ».

Cette quadruple nomination constitue, estime-t-on à Rome un signal « chaleureux et amical » au gouvernement chinois en vue du dialogue avec Rome. On se souvient en effet que, dans son discours au Corps diplomatique du 12 mai dernier (Zenit, 12 mai), le pape avait souhaité établir des relations diplomatiques avec les pays qui n’avaient pas encore de relations avec le Saint-Siège.

Et pour sa part, Mgr Giovanni Lajolo, secrétaire du Saint-Siège pour les rapports avec les Etats, avait déclaré que les difficultés pour parvenir à la normalisation des relations diplomatiques entre le Saint-Siège et la République populaire n’étaient pas « insurmontables ».

Pour sa part, EDA analyse ainsi l’événement : « Premièrement, du fait du contexte de division au sein de l’Eglise catholique de Chine, entre « officiels » et « clandestins », Rome a toujours pris soin de ne pas prendre parti pour l’une ou l’autre des composantes de cette Eglise (…). Avec les nominations qui viennent d’être rendues publiques, Benoît XVI replace publiquement l’Eglise de Chine au sein de l’Eglise universelle et, tous les évêques nommés avant 1950 étant aujourd’hui décédés, il choisit d’inviter quatre évêques représentatifs des différents visages de l’Eglise catholique en Chine ».

« Deuxièmement, commente EDA, (…) à la suite de la querelle née de la canonisation de martyrs de l’Eglise de Chine, en 2000, les contacts entre les deux parties ont, semble-t-il, été gelés. Récemment, à l’initiative notamment de la communauté de Sant’Egidio, des échanges ont eu lieu peu avant le décès de Jean-Paul II et depuis l’élection de Benoît XVI (…). Sur la question de la nomination des évêques en Chine, les nominations d’évêques auxiliaires à Shanghai et à Xi’an indiquent qu’un certain modus operandi peut être trouvé, sans que les deux parties s’entendent pour autant au préalable. L’at
mosphère a donc changé. Le pape nomme quatre évêques chinois à un synode qui se tiendra à Rome. Reste à savoir si les autorités chinoises délivreront ou non des passeports à ces quatre prélats ».

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ZENIT Staff

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