Chine: Décès d’Allen Yuan, 92 ans, pasteur protestant de Pékin

Une personnalité des milieux chrétiens protestants non officiels

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ROME, Vendredi 2 septembre 2005 (ZENIT.org) – Allen Yuan, pasteur protestant de Pékin et personnalité des milieux chrétiens protestants non officiels, est décédé à Pékin à l’âge de 92 ans, annonce « Eglises d’Asie », l’agence des Missions étrangères de Paris dans son édition du 1er septembre 2005 (eglasie.mepasie.org), EDA n° 424).

Yuan Xiangchen, plus connu sous le nom de pasteur Allen Yuan, est décédé dans un hôpital de Pékin le 16 août dernier. Agé de 92 ans, il est mort entouré de son épouse et de ses six enfants et a été inhumé le 19 août dans le cimetière de Babaoshan, situé dans l’ouest de la capitale chinoise, en présence d’une foule estimée à près de 2 500 personnes. La police était également très présente sur les lieux et a empêché plusieurs centaines de personnes d’accéder à la cérémonie funéraire. Le pasteur Allen Yuan était une des personnalités les plus connues des milieux protestants de la capitale. Il était notamment réputé pour son opposition résolue et tranquille aux structures mises en place par les autorités pour contrôler les Eglises protestantes ; il refusait ainsi toute affiliation avec le Mouvement des trois autonomies, équivalent pour les protestants de l’Association patriotique des catholiques chinois, et le Conseil chrétien de Chine, qui réunit les Eglises protestantes affiliées au Mouvement des trois autonomies.

Né en 1912 (ou en 1913, les sources divergent), Yuan Xiangchen était étudiant en 1932, date à laquelle il fréquentait le YMCA (Young Men’s Christian Association) de Pékin. Son père l’y avait envoyé étudier l’anglais, contre son gré, le jeune étudiant jugeant qu’il n’avait rien de bon à apprendre de la langue des puissances coloniales et tenant en piètre estime la religion chrétienne. A l’époque, il n’était pas plus attiré par le bouddhisme, estimant que cette religion n’apportait aucune réponse aux temps présents, ou par le confucianisme, estimant que cette pensée n’offrait aucune réponse aux défis s’annonçant à l’horizon. C’est pourtant à cette époque, le soir du 29 décembre 1932 très exactement, que Yuan Xiangchen s’est converti au christianisme. « Je ne peux pas vous décrire précisément comment ni pourquoi, mais Dieu s’est révélé à moi et m’a donné la foi de croire en Lui. (…) J’ai confessé mes péchés et j’ai accepté Jésus pour mon sauveur », racontera-t-il plus tard, retraçant sa « renaissance » dans le Christ.

Converti, baptisé dans une église pentecôtiste, il se plongea dans l’étude de la Bible avant de partir prêcher dans les campagnes chinoises, durant les années de la guerre contre les Japonais, puis de la guerre civile entre communistes et nationalistes. Après la prise du pouvoir par Mao Zedong et l’instruction des nouvelles autorités à tous les mouvements protestants de s’affilier au Mouvement des trois autonomies, lancé au tout début des années 1950, Allen Yuan, désormais pasteur, ainsi que d’autres dirigeants protestants, refusent la nouvelle politique. En 1957, il se voit affubler de l’étiquette de « droitier ». L’année suivante, âgé de 44 ou 45 ans et père de six enfants, il est emprisonné, condamné à la prison à vie pour « crimes contre-révolutionnaires » et envoyé en camp de rééducation par le travail. Sa détention durera jusqu’au 20 décembre 1979. Dans le récit de sa vie, écrit des années plus tard, il a décrit « les souffrances endurées par [sa] femme pour survivre et éduquer [ses] enfants ». Envoyé dans un camp près de la frontière avec l’Union soviétique, il a passé près de 22 ans sans bible et sans rencontrer un protestant. « J’ai seulement croisé quatre prêtres catholiques, qui étaient dans la même situation que moi pour avoir refusé de rejoindre l’Association patriotique », racontera-t-il.

Remis en liberté et de retour à Pékin, le pasteur Allen Yuan a immédiatement recommencé à prêcher l’Evangile, réunissant des chrétiens et des curieux chez lui et fondant ainsi une des premières « Eglises domestiques » de la capitale. A ceux qu’il rencontrait, Allen Yuan expliquait qu’il ne se cachait pas pour accomplir sa mission et qu’il ne considérait pas que son action était « clandestine » ou « souterraine ». « En tant que responsable d’une Eglise domestique à Pékin, il n’avait pas peur. Il ne cachait jamais ce qu’il faisait », témoigne John Short, missionnaire australien qui a connu Allen Yuan. En 1994, lors de la visite de Billy Graham en Chine, c’est chez Allen Yuan que le télé-évangéliste américain se rendit pour prêcher. L’année suivante, en 1995, Allen Yuan était à la Maison Blanche, invité du gouvernement américain, et prenait part à une session de la « White House Morning Prayer Fellowship ». Cette visibilité sur la scène internationale n’empêchait pas la police chinoise d’intervenir régulièrement auprès d’Allen Yuan et de le placer en résidence surveillée lorsque le pasteur baptisait plusieurs centaines de personnes sans autorisation (1).

Selon les statistiques du Mouvement des trois autonomies, les communautés chrétiennes protestantes rassemblent aujourd’hui en Chine environ dix millions de fidèles. Selon les responsables des diverses « Eglises domestiques », très nombreuses, les chrétiens seraient très nettement plus nombreux, le chiffre – invérifiable – de 50 millions de fidèles étant parfois avancé.

(1) Voir EDA 271. Une biographie d’Allen Yuan a été écrite par une proche du pasteur. Lydia Lee : A Living Sacrifice: The Biography of Allen Yuan, Sovereign World Ltd, Londres, 2003, 256 p.

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ZENIT Staff

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