CITE DU VATICAN, Mercredi 28 avril 2004 (ZENIT.org) – Au Sri Lanka, à Jaffna, une paroisse catholique et son église, endommagée par la guerre, renaissent grâce à la foi des fidèles, rapporte « Eglises d’Asie », l’agence des Missions étrangères de Paris dans son édition de la mi-avril (EDA n° 395, http://eglasie.mepasie.org).
A Jaffna, le carême et les fêtes de Pâques ont été vécus d’une manière particulière par les fidèles d’une paroisse catholique. Ces deux dernières décennies en effet, par peur des bombardements, il était pratiquement impossible pour les catholiques de la péninsule de Jaffna de suivre les offices dans leurs églises. Théâtre de combats acharnés, cette région à majorité tamoule du nord du Sri Lanka est une de celles qui ont le plus souffert de la guerre entre les Tigres tamouls et les forces armées gouvernementales, jusqu’à la signature du cessez-le-feu en février 2002 (1).
Pour la paroisse catholique de St Jacques, la plus importante de Jaffna, la vie est peu à peu redevenue normale depuis cette date. L’église, bâtie en 1861, a subi de gros dégâts lors d’une attaque aérienne en 1993. Neuf personnes avaient alors été tuées et un grand nombre de fidèles blessés. Selon le P. Francis Jayesekeram, curé de cette paroisse de 1 500 familles catholiques, dont la plupart sont pêcheurs, 3 000 de ses paroissiens sont morts en mer, tués à un moment ou à un autre de ce conflit vieux de vingt ans.
Avec la fin des combats, peu à peu, d’une unique messe dominicale, la paroisse est passée à trois, avec des milliers de fidèles, sans compter les offices quotidiens, se réjouit le prêtre, ajoutant que les associations de laïcs comme l’Union des mères de familles et la Société de St Vincent de Paul revivaient et que les groupes de jeunes et les chorales avaient repris leurs activités pour ce carême 2004. Dans l’église désormais restaurée, les fidèles chantent à nouveau.
« Le processus de paix a commencé à porter des fruits dès Noël et Olivula, la fête de la lumière, précise de son côté l’évêque de Jaffna, Mgr Thomas Savundaranayagam. Les gens ne peuvent pas oublier les horreurs qu’ils ont subies dans ces combats insensés. Mais le temps du pardon et de la réconciliation est arrivé pour nous tous. C’est là tout le sens du christianisme. »
Toutefois, nombreux sont ceux qui, y compris le curé de St Jacques, ressentent de l’amertume pour le conflit et ses conséquences. Le P. Jayesekeram souligne que, pour la majorité des enfants nés durant la guerre, la seule image qu’ils ont de leurs compatriotes du sud est celle du policier ou du soldat. « Encore aujourd’hui », les gens de Jaffna considèrent l’armée avec hostilité. Selon lui, il arrive que des militaires interviennent au cours des cérémonies religieuses et ordonnent aux prêtres d’interrompre immédiatement et sans raison apparente la liturgie, comme dernièrement, par exemple, lors de la cérémonie de bénédiction des bateaux. Selon le prêtre, la semaine dernière encore, quatre pêcheurs ont été sérieusement agressés par des soldats, tout simplement parce qu’ils ne pouvaient pas s’exprimer en cinghalais. En dépit de la plainte déposée aux autorités, les agresseurs sont restés impunis et continuent de harceler et d’intimider les civils.
Pourtant, oubliant les rancœurs, la communauté se reconstruit. Pendant des années, les paroissiens restés sur place ont sollicité l’aide de ceux partis se réfugier à l’étranger. Tous, pour la reconstruction de St Jacques, ont répondu avec générosité. Le gouvernement a offert un million de roupies (8 200 euros environ) pour les travaux de réparation et de rénovation de l’église. Les dons reçus des anciens paroissiens se sont élevés à 7,1 millions roupies, permettant une solide restauration. D’après Mgr Savundaranayagam, les quelque trois cents églises du diocèse ainsi que les autres édifices religieux, tels que les chapelles, sont tous, à des degrés divers, endommagés. Les travaux de restauration à entreprendre sont très importants. Ils ne pourront se faire que lorsque les catholiques qui ont fui les combats dans la péninsule reviendront. Sur une population de 150 000 catholiques, 70 000 sont restés sur place et 80 000, en majorité ceux des régions côtières, ont été déplacés, estime l’évêque.
(1) La guerre qui a débuté en 1983 entre le LTTE et Colombo a fait plus de 60 000 morts. Les pourparlers de paix entamés après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu actuel sont au point mort depuis avril 2003. Sur ces questions, voir EDA 227 (Cahier de documents : « La lutte des Tamouls pour leur reconnaissance »), EDA 377 (Dossier : « Sri Lanka »), EDA 337, 351 et 357 (Cahier de documents).
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