Afrique de l’Ouest: “La paix du Christ ne s’arrête pas au silence des armes”

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Homélie de Mgr L. Monsengwo Pasinya

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CITE DU VATICAN, Vendredi 7 février 2003 (ZENIT.org) – « La paix du Christ ne s’arrête pas au silence des armes, mais l’appelle comme une conséquence, car elle est la paix-fraternité : on ne tue pas son frère, même si le crime de Caïn se répète de génération en génération. On n’a pas découvert le frère car on n’a pas découvert le Père. Ce fut le drame de l’enfant prodigue et de son frère aîné, c’est le drame de nos peuples en guerre”, expliquait Mgr L. Monsengwo Pasinya, mercredi dernier, lors de la seconde journée de la XVe Assemblée générale de la Conférence Episcopale Régionale de l’Afrique de l’ouest (CERAO) francophone qui s’est poursuivie au grand séminaire Saint-Augustin de Samaya, à 27 km au sud de Bamako, au Mali.

La CERAO, tient cette assemblée du 3 au 9 février. La journée du 5 février a été consacrée aux travaux en plénière et à l’évaluation des commissions et des conférences épiscopales nationales sur le plan triennal : “Pastorale et sainteté”. La messe a été présidée par Mgr Laurent Monsengwo Pasinya, archevêque de Kinsangani, et président du Symposium des conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SCEAM), et voici le texte de son homélie.

Homélie de la messe (2ème jour)

« Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix » (Jn 14,27)

Chers frères et sœurs,

Lorsque sont tombés le régime communiste et le mur de Berlin, le monde entier poussa un soupir de soulagement, car tous étaient persuadés que désormais, avec la fin de la guerre froide, les hommes vivraient dans la paix, la liberté, la sécurité et la dignité humaine…

Et pourtant, aujourd’hui, le monde semble plus en désordre que jamais, et l’insécurité gagne du terrain même dans les pays les plus développés…

Loin de moi l’idée de faire l’apologie du communisme et de ses illusions, tant s’en faut ! Mais sans doute l’humanité sinon les chrétiens avaient-ils quelque peu oublié ces paroles du Christ : « Je vous laisse la paix ; je vous donne ma paix » et ces autres paroles de Saint Paul : « C’est lui (le Christ) qui est notre paix… » (Ep 2,14)

La paix est un don du Christ ; elle est son héritage à l’humanité ; la paix, c’est lui et on ne peut la conquérir n’importe comment… La paix appartient en propre au Christ : « Je ne vous la donne pas comme le monde la donne » ajoute-t-il.

Même si « la paix du monde » est l’œuvre de l’Esprit qui souffle où il veut, elle ne peut tenir en dehors de « la paix du Christ », car celle-ci contient les ingrédients qui donnent consistance à la paix du monde »

La paix du Christ, c’est le Christ Lui-même : car elle participe de sa nature théandrique. Le Christ est par nature dialogue : dialogue harmonieux et non conflictuel de deux natures en une personne ; dialogue rédempteur entre Dieu et les hommes d’une part et entre les hommes d’autre part. Aucune paix durable ne s’obtient en dehors du dialogue, surtout si les négociations de paix deviennent un monologue truffé d’intérêts partisans. Mais il faut que le dialogue se passe dans la vérité, la justice, la loyauté, visant à des intérêts qui transcendent les individus en dialogue, c’est–à-dire le salut de la multitude.

« Le Christ est notre paix », parce qu’il a renversé toutes les barrières et les divisions raciales, cultuelles, sociales et culturelles, refaisant de l’humanité une seule famille, telle que Dieu l’a voulue dès la création du monde. Aucune division, de quelque nature que ce soit, ne sert la cause de la paix, surtout s’il s’agit de « diviser pour régner »… L’Eglise–Famille de Dieu est le lieu de la paix, de la réconciliation et du pardon. Le Christ est notre paix, parce qu’en son corps sur la croix, il a crucifié la haine (Ep 2,17). Voilà pourquoi il n’y a pas de paix sans justice, il n’y a pas de justice sans pardon, il n’y a pas de paix sans réconciliation, car le pardon est la mesure de l’amour parce que l’un et l’autre n’attendent pas le retour de l’ascenseur « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » (Jn 13,35), dit Jésus. Lorsqu’on a donné sa vie, on ne peut plus voir l’amour en retour.

La paix du Christ ne s’arrête pas au silence des armes, mais l’appelle comme une conséquence, car elle est la paix-fraternité : on ne tue pas son frère, même si le crime de Caïn se répète de génération en génération. On n’a pas découvert le frère car on n’a pas découvert le Père. Ce fut le drame de l’enfant prodigue et de son frère aîné, c’est le drame de nos peuples en guerre.

La paix du Christ est une paix de pécheurs pardonnés, qui n’osent pas jeter la pierre aux fauteurs de troubles et de conflits, mais qui se font artisans de paix et de réconciliation par un effort de médiation au dessus des parties en conflit.

La paix du Christ est d’abord intérieure, elle est la victoire de l’homme sur soi-même avant d’être une victoire sur les autres. La paix du Christ n’est extérieure que parce que d’abord elle a été intérieure.

La paix du Christ est un don de Dieu, demandons-la-lui. Elle est un héritage du Christ, respectons-le.

La paix du Christ est une paix de personnes libres et libérées (cf Gal 5,1) libérons-là de toutes les chaînes avec lesquelles les hommes la prennent en otage, en édifiant l’Eglise-Famille de Dieu, lieu et sacrement de pardon, de réconciliation et de paix en Afrique.

« Donne-nous, Seigneur, un cœur nouveau,
Mets en nous, Seigneur, un esprit nouveau »

Amen

Mgr Laurent Monsengwo Pasinya

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ZENIT Staff

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