Commentaire de Habaquq 3 : Dieu manifeste alors sa colère contre le mal

Traduction de la catéchèse du 15 mai

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CITE DU VATICAN, Mardi 21 mai 2002 (ZENIT.org) – Sous le titre « Dieu apparaît pour le jugement « , L´Osservatore Romano en français publie ce mardi la traduction de la catéchèse en italien de Jean-Paul II sur le cantique du prophète Habaquq (ch. 3) au cours de l´Audience générale de mercredi dernier, 15 mai 2002. « Dieu manifeste alors sa colère contre le mal », explique Jean-Paul II.

– Lecture: Ha 3, 2-3. 18-19 –

1. La Liturgie des Laudes nous propose une série de cantiques bibliques d´une grande intensité spirituelle, qui doivent être rapprochés de la prière fondamentale des Psaumes. Aujourd´hui, nous en avons écouté un exemple tiré du troisième et dernier chapitre du livre d´Habaquq. Ce prophète a vécu vers la fin du VII siècle av. J.-C., lorsque le royaume de Judée se sentait comme écrasé entre deux super-puissances en expansion, d´un côté l´Egypte et de l´autre Babylone.

Toutefois, de nombreux chercheurs considèrent que cet hymne final est une citation. En appendice au bref écrit d´Habaquq aurait donc été inséré un véritable chant liturgique, « sous forme de lamentation » et devant être accompagné « par des instruments à corde », comme l´expliquent deux notes placées au début et à la fin du Cantique (cf. Ha 3, 1.19b). La Liturgie des Laudes, en reprenant le fil de l´antique prière d´Israël, nous invite à transformer cette composition en chant chrétien, en choisissant certains versets significatifs (cf. vv. 2-4.13a.15-19a).

2. L´hymne, qui révèle également une force poétique admirable, présente une image grandiose du Seigneur (cf. vv. 3-4). Sa figure domine de façon solennelle toute la scène du monde et l´univers est parcouru par un frémissement face à sa marche majestueuse. Il avance en venant du sud, de Témân et du mont Parân (cf. v. 3), c´est-à-dire de la zone du Sinaï, siège de la grande épiphanie révélatrice pour Israël. Dans le Psaume 67, on décrivait également « le Seigneur qui vient du Sinaï dans le sanctuaire » de Jérusalem (cf. v. 18). Son apparition, selon une constante de la tradition biblique, est entièrement entourée de lumière (cf. Ha 3, 4).

C´est un rayonnement de son mystère transcendant, mais qui se communique à l´humanité: en effet, la lumière est en dehors de nous, nous ne pouvons pas la saisir ou l´arrêter; et pourtant, elle nous enveloppe, nous illumine et nous réchauffe. Dieu est ainsi, lointain et proche, insaisissable et se trouvant pourtant à nos côtés; il est même prêt à être avec nous et en nous. Devant la révélation de sa majesté, un choeur de louange s´élève de la terre: c´est la réponse cosmique, une sorte de prière à laquelle l´homme prête sa voix.

La tradition chrétienne a vécu cette expérience intérieure non seulement au sein de sa spiritualité personnelle, mais également dans des créations artistiques hardies. Sans parler des cathédrales majestueuses du moyen-âge, nous mentionnerons en particulier l´art de l´orient chrétien, avec ses icônes admirables et les architectures géniales de ses églises et de ses monastères.

L´église Sainte-Sophie à Constantinople reste, de ce point de vue, une sorte d´archétype en ce qui concerne la délimitation de l´espace de la prière chrétienne, où la présence et le caractère insaisissable de la lumière permettent de ressentir l´intimité ainsi que la transcendance de la réalité divine. Elle pénètre toute la communauté en prière jusqu´à la moëlle des os et, en même temps, elle l´invite à se dépasser pour se plonger tout entière dans le mystère ineffable. Les propositions artistiques et spirituelles qui caractérisent les monastères de cette tradition chrétienne sont tout aussi significatives. Dans ces véritables espaces sacrés – notre pensée se tourne immédiatement vers le Mont Athos – le temps contient en soi un signe de l´éternité. Le mystère de Dieu se manifeste et se cache dans ces lieux à travers la prière incessante des moines et des ermites, considérés depuis toujours semblables à des anges.

3. Mais revenons au cantique du prophète Habaquq. Pour cet auteur saint, l´entrée du Seigneur dans le monde revêt une signification précise. Il désire entrer dans l´histoire de l´humanité, « en notre temps », comme on le répète à deux reprises dans le verset 2, pour juger et rendre cette histoire meilleure, car nous la conduisons de façon très confuse et souvent perverse.

Dieu manifeste alors sa colère (cf. v. 2c) contre le mal. Et le chant fait référence à une série d´interventions divines inexorables, sans toutefois spécifier s´il s´agit d´actions directes ou indirectes. On évoque l´exode d´Israël, alors que la cavalerie du pharaon fut engloutie dans la mer (cf. v. 15). Mais on fait également miroiter la perspective de l´oeuvre que le Seigneur va accomplir à l´égard du nouvel oppresseur de son peuple.

L´intervention divine est décrite de façon presque « visible », à travers une série d´images rurales: « Car le figuier ne bourgeonnera plus; plus rien à récolter dans les vignes. Le produit de l´olivier décevra, les champs ne donneront plus à manger, les brebis disparaîtront du bercail; plus de boeufs dans les étables » (v. 17). Tout ce qui est signe de paix et de fertilité est éliminé et le monde apparaît comme un désert. Il s´agit d´un symbole cher aux autres prophètes (cf. Jr 4, 19-26; 12, 7-13; 14, 1-10), pour illustrer le jugement du Seigneur qui ne reste pas indifférent face au mal, à l´oppression, à l´injustice.

4. Face à l´irruption divine, l´orant est terrorisé (cf. Ha 3, 16), il frémit, il sent son âme se vider, il est frappé de tremblements, car le Dieu de la justice est infaillible, bien différemment des juges terrestres.

Mais la venue du Seigneur possède également une autre fonction, que notre chant exalte avec joie. En effet, dans sa colère, il n´oublie pas la clémence pleine de compassion (cf. v. 2). Il sort de l´horizon de sa gloire non seulement pour détruire l´arrogance de l´impie, mais également pour sauver son peuple et son oint (cf. v. 13), c´est-à-dire Israël et son roi. Il veut également être le libérateur des opprimés, faire naître l´espérance dans le coeur des victimes, ouvrir une nouvelle ère de justice.

5. C´est pourquoi notre cantique, bien qu´il soit marqué par « la forme de la lamentation », se transforme en un hymne de joie. Les catastrophes annoncées visent en effet à libérer le peuple des oppresseurs (cf. v. 15). Elles provoquent donc la joie du juste qui s´exclame: « Mais moi je me réjouirai en Yahvé, j´exulterai en Dieu mon Sauveur! » (v. 18). La même attitude est suggérée par Jésus à ses disciples à l´époque des cataclysmes apocalyptiques: « Quand cela commencera d´arriver, redressez-vous et relevez la tête, parce que votre délivrance est proche » (Lc 21, 28).

Dans le cantique d´Habaquq, le verset final qui exprime la sérénité retrouvée est très beau. Le Seigneur est défini – comme l´avait fait David dans le Psaume 17 – non seulement comme « la force » de son fidèle, mais également comme celui qui lui donne agilité, fraîcheur, sérénité face aux dangers. David chantait: « Je t´aime, Yahvé, ma force… [Il] égale mes pieds à ceux des biches et me tient debout sur les hauteurs » (Ps 17, 2.34). A présent, le chanteur s´exclame: « Yahvé mon Seigneur est ma force, il rend mes pieds pareils à ceux des biches, sur les cimes il porte mes pas » (Ha 3, 19). Quand le Seigneur est à nos côtés, on ne craint plus les frayeurs et les obstacles, mais on poursuit d´un pas léger et avec joie la route de la vie, même si elle est difficile.

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ZENIT Staff

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