CITE DU VATICAN, Mercredi 28 novembre 2001 (ZENIT.org) – « Les nouveaux saints ont régné dans les coeurs pour servir dans le monde », affirme le pape.
En la solennité du Christ-Roi, dimanche 25 novembre, Jean-Paul II a canonisé quatre bienheureux européens, un évêques et trois vierges consacrées, fondatrices: Giuseppe Marello (1844-1895), Paula Montal Fornés de San José de Calasanz (1799-1889), Léonie Françoise de Sales Aviat (1844-1914), et Maria Crescentia Höss (1682-1744). L´Osservatore Romano en français du 27 novembre propose la traduction suivante de l´homélie de Jean-Paul II.
– Homélie de Jean-Paul II –
1. « Il y avait aussi une inscription au-dessus de lui: « Celui-ci est le roi des Juifs » » (Lc 23, 38).
Cette inscription, que Pilate avait faite placer sur la croix (cf. Jn 19, 19), contient à la fois le motif de la condamnation et la vérité sur la personne du Christ. Jésus est roi – lui-même l´a affirmé – mais son royaume n´est pas de ce monde (cf. Jn 18, 36-37). Devant Lui, l´humanité se divise: ceux qui le méprisent pour son échec apparent, et ceux qui le reconnaissent comme le Christ, « image du Dieu invisible, Premier-Né de toute créature » (Col 1, 15), selon l´expression de l´Apôtre Paul dans l´Epître aux Colossiens, que nous avons entendue.
Face à la croix du Christ s´ouvre, d´une certaine façon, la grande scène du monde et s´accomplit le drame de l´histoire collective et de chacun. Sous le regard de Dieu, qui dans son Fils unique immolé pour nous s´est fait la mesure de chaque personne, de chaque institution, de chaque civilisation, chacun est appelé à se décider.
2. Face au divin Roi crucifié se sont également présentés ceux qui viennent d´être proclamés saints: Giuseppe Marello, Paula Montal Fornés de San José de Calasanz, Léonie Françoise de Sales Aviat et Maria Crescentia Höss. Chacun d´eux s´est confié à sa royauté mystérieuse, en proclamant à travers toute leur vie: « Jésus, souviens-toi de moi, lorsque tu viendras avec ton royaume » (Lc 23, 42). Chacun d´eux a reçu, d´une façon totalement personnelle, la réponse du Roi immortel: « En vérité, je te le dis, aujourd´hui tu seras avec moi dans le Paradis » (Lc 23, 43).
Aujourd´hui! Cet « aujourd´hui » appartient au temps de Dieu, au dessein de salut, dont parle saint Paul dans l´Epître aux Romains: « Ceux que [Dieu] d´avance a discernés, il les a aussi prédestinés… appelés… justifiés… glorifiés » (Rm 8, 29-30). Cet « aujourd´hui » contient également le moment historique de la canonisation de ce jour, au cours duquel ces quatre témoins exemplaires de la vie évangélique sont élevés à la gloire des autels.
Giuseppe Marello
3. « Car Dieu s´est plu à faire habiter en lui [le Christ] toute la Plénitude » (Col 1, 19). A cette plénitude participa saint Giuseppe Marello, en tant que prêtre du clergé d´Asti et en tant qu´évêque du diocèse d´Acqui. Plénitude de grâce, fomentée en lui par l´intense dévotion à la Très Sainte Vierge Marie; plénitude du sacerdoce, que Dieu lui conféra comme un don et un engagement; plénitude de la sainteté, qu´il atteint en se conformant au Christ, Bon Pasteur. Mgr Marello se forma au cours de la période glorieuse de la sainteté piémontaise, lorsque face à de multiples formes d´hostilités contre l´Eglise et la foi catholique, fleurirent des héros de l´esprit et de la charité, tels que Cottolengo, Cafasso, Dom Bosco, Murialdo et Allamano. Jeune homme bon et intelligent, passionné par la culture et l´engagement civil, notre saint ne trouva que dans le Christ la synthèse de tous les idéaux et c´est à Lui qu´il se consacra dans le sacerdoce. « Protéger les intérêts de Jésus » fut la devise de sa vie, et c´est pour cela qu´il s´identifia totalement à saint Joseph, l´époux de Marie, le « gardien du Rédempteur ». Ce qui l´attira profondément chez saint Joseph, fut le service caché, nourri d´une profonde intériorité. Il sut transmettre ce style aux Oblats de saint Joseph, la Congrégation qu´il fonda. Il aimait à leur répéter: « Soyez extraordinaires dans les choses ordinaires » et il ajoutait: « Soyez des ermites chez vous et des apôtres à l´extérieur ». Le Seigneur voulut utiliser sa forte personnalité, en l´appelant à l´épiscopat dans le diocèse d´Acqui, où, en quelques années, il dépensa toutes ses énergies pour le troupeau, laissant une empreinte que le temps n´a pas effacée.
Paula Montal Fornés de San José de Calasanz
4. « En vérité, je te le dis, aujourd´hui tu seras avec moi au paradis » (Lc 23, 43). C´est au paradis, dans la plénitude du Royaume de Dieu, que fut accueillie sainte Paula Montal Fornés de San José de Calasanz, fondatrice de l´Institut des Filles de Marie, religieuses scolopes, après une vie de sainteté. Tout d´abord dans sa ville natale, Arenys del Mar, engagée dans diverses activités apostoliques et pénétrant, à travers la prière et la piété sincère, les mystères de Dieu; ensuite, en tant que fondatrice d´une famille religieuse, s´inspirant de la devise de Giuseppe Calasanz « piété et instruction », elle se consacra à la promotion de la femme et de la famille en suivant son idéal de « sauver la famille, en éduquant les petites filles dans la sainte crainte de Dieu »; pour finir, elle fit preuve de l´authenticité, du courage et de la tendresse de son esprit, un esprit modelé par Dieu, au cours des trente années de vie retirée à Olesa de Montserrat.
La nouvelle sainte appartient à ce groupe de fondateurs d´instituts religieux qui, au XIX siècle, se consacrèrent aux nombreuses nécessités qui se présentaient alors et auxquelles l´Eglise, en suivant l´Evangile et l´inspiration de l´Esprit, devait répondre pour le bien de la société. Le message de sainte Paula continue à être actuel et son charisme éducatif est une source d´inspiration pour la formation des générations du troisième millénaire chrétien.
Léonie Françoise de Sales Aviat
5. Le dessein bienveillant du Père qui « nous fait entrer dans le royaume de son Fils bien-aimé » trouve en sainte Françoise de Sales Aviat une splendide réalisation: elle a vécu jusqu´au bout l´offrande d´elle-même. Au coeur de son engagement et de son apostolat, Soeur Françoise de Sales place l´oraison et l´union à Dieu, où elle trouve lumière et force pour surmonter les épreuves et les difficultés, et jusqu´à la fin de son existence elle persévère dans cette vie de foi, désirant se laisser conduire par le Seigneur: « Ô mon Dieu, que mon bonheur soit de vous sacrifier toutes mes volontés, tous mes désirs! ». La résolution qui caractérise si bien Mère Aviat, « M´oublier entièrement », est aussi pour nous un appel à aller à contre-courant de l´égoïsme et des jouissances faciles, et à nous ouvrir aux nécessités sociales et spirituelles de notre temps. Chères Soeurs Oblates de Saint-François-de-Sales, à l´école de votre fondatrice, en communion profonde avec l´Eglise, là où Dieu vous a plantées, soyez bien déterminées à recevoir les grâces présentes et à en profiter, car c´est en Dieu que l´on trouve la lumière et le secours nécessaires en chaque circonstance! Confiantes en l´intercession puissante de la nouvelle Sainte, accueillez dans la joie l´invitation à vivre, dans une fidélité renouvelée, les intuitions qu´elle a si parfaitement vécues.
Maria Crescentia Höss
6. Rendre gloire au Christ, le Roi: ce désir a animé sainte Maria Crescentia Höss dès son enfance! Elle plaça ses qualités à son service. Dieu lui avait donné une belle voix. Jeune fille, elle eut l´occasion de chanter dans une chorale comme soliste, non pour se mettre en valeur, mais pour chanter et jouer de la musique pour le Christ-Roi.
Elle plaça également ses connaissances au service du Seigneur. Cette franciscaine fut une conseillère très soll
icitée. Les personnes se pressaient devant la porte du couvent: des hommes et des femmes simples, mais également des princes et des impératrices, des prêtres et des religieux, des abbés et des évêques. Elle devint ainsi une sorte de « sage-femme » qui tentait d´accoucher la vérité dans le coeur de celui qui lui demandait conseil.
Toutefois, la douleur ne lui fut pas non plus épargnée. Les rivalités internes existaient déjà à cette époque. Elle supporta les intrigues au sein de sa communauté sans jamais mettre en doute sa vocation.
Le vaste souffle de la passion fit mûrir en elle la vertu de la patience. Elle réussit à devenir Supérieure: pour elle, diriger spirituellement signifiait servir. Elle avait une attitude généreuse envers les pauvres, maternelle envers ses consoeurs et sensible à l´égard de ceux qui avaient besoin d´une bonne parole. Sainte Crescentia a aimé la signification du Royaume du Christ: « Dans la mesure où vous l´avez fait à l´un de ces plus petits de mes frères, c´est à moi que vous l´avez fait » (Mt 25, 40).
7. « Vous remercierez le Père qui vous a mis en mesure de partager le sort des saints dans la lumière » (Col 1, 12). Jamais autant qu´en ce moment, ces paroles de saint Paul résonnent en nous! La communion des saints nous fait véritablement goûter à l´avance le Royaume céleste et, dans le même temps, elle nous pousse, sur leur exemple, à le construire dans le monde et dans l´histoire.
« Oportet illum regnare », « Car il faut qu´il règne » (1 Cor 15, 25), écrivait l´Apôtre en se référant au Christ.
« Oportet illum regnare » nous répètent, à travers votre témoignage, saint Giuseppe Marello, sainte Paula Montal Fornés de San José de Calasanz, sainte Léonie Françoise de Sales Aviat et sainte Maria Crescentia Höss! Que votre exemple nous incite à une plus vive contemplation du Christ-Roi, crucifié et ressuscité. Que votre soutien nous aide à marcher fidèlement sur les traces du Rédempteur, afin de partager un jour, avec vous, avec Marie et tous les saints, sa gloire éternelle au paradis. Amen!
© L´Osservatore Romano