CITE DU VATICAN, Mercredi 14 novembre 2001 (ZENIT.org) - "La joie de ceux qui entrent dans le Temple", c´est le titre choisi par L´Oservatore Romano en français du 13 novembre pour la catéchèse de Jean-Paul II du 7 novembre sur le Ps 99 (vv. 2-5), un "Psaume pour la todáh", l´action de grâces.

"Le monde et l´histoire ne sont pas entre les mains du destin, du chaos, d´une nécessité aveugle, explique Jean-Paul II. Ils sont en revanche gouvernés par un Dieu qui est assurément mystérieux, mais qui désire dans le même temps que l´humanité vive de façon stable selon des relations justes et authentiques".

- Allocution de Jean-Paul II -

1. La tradition d´Israël a imposé à l´hymne de louange qui vient d´être proclamé le titre de "Psaume pour la todáh", c´est-à-dire pour l´action de grâce dans le chant liturgique, raison pour laquelle il est bien adapté pour être entonné lors des Laudes du matin. Dans les versets peu nombreux de cet hymne joyeux, on peut identifier trois éléments significatifs, qui rendent son utilisation par la communauté chrétienne en prière spirituellement fructueuse.

2. Il y a tout d´abord l´appel pressant à la prière, clairement décrite dans une dimension liturgique. Il suffit d´établir la liste des verbes à l´impératif qui rythment le Psaume et qui sont accompagnés d´indications d´ordre cultuel: "Acclamez..., servez Yahvé dans l´allégresse, venez à lui avec des chants de joie! Sachez-le, c´est Yahvé qui est Dieu [...] Venez à ses portiques en rendant grâces, à ses parvis en chantant louange, rendez-lui grâces, bénissez son nom!" (vv. 2-4). Il s´agit d´une série d´invitations, non seulement à pénétrer dans l´aire sacrée du temple à travers les portes et les cours (cf. Ps 14, 1; 23, 3.7-10), mais également à élever joyeusement un hymne à Dieu.

C´est une sorte de fil constant de louange qui ne se rompt jamais, s´exprimant dans une profession de foi et d´amour permanente. Une louange qui s´élève de la terre vers Dieu, mais qui dans le même temps, nourrit l´âme du croyant.

3. Je voudrais formuler une deuxième petite observation à propos du début même du chant, où le Psalmiste appelle toute la terre à acclamer le Seigneur (cf. v. 1). Certes, le Psalmiste tournera ensuite son attention vers le peuple de l´élection, mais l´horizon de la louange est universel, comme cela se produit souvent dans le Psautier, en particulier dans ce qu´on appelle les "hymnes au Seigneur-Roi" (cf. Ps 95-98). Le monde et l´histoire ne sont pas entre les mains du destin, du chaos, d´une nécessité aveugle. Ils sont en revanche gouvernés par un Dieu qui est assurément mystérieux, mais qui désire dans le même temps que l´humanité vive de façon stable selon des relations justes et authentiques: "Yahvé règne. Le monde est stable, point ne bronchera. Sur les peuples il prononce avec droiture [...] il jugera le monde en justice et les peuples en sa vérité" (Ps 95, 10.13).

4. Nous nous trouvons donc tous entre les main de Dieu, Seigneur et Roi, et nous le célébrons tous, certains qu´il ne nous laissera pas tomber de ses mains de Créateur et de Père. Sous cette lumière, on peut davantage apprécier le troisième élément significatif du Psaume. Au centre de la louange que le Psalmiste place sur nos lèvres, se trouve en effet une sorte de profession de foi, exprimée à travers une série de qualificatifs qui définissent la réalité intime de Dieu. Ce credo essentiel contient les affirmations suivantes: le Seigneur est Dieu, le Seigneur est notre créateur, nous sommes son peuple, le Seigneur est bon, son amour est éternel, sa fidélité n´a pas de fin (cf. vv. 3-5).

5. Nous avons tout d´abord une confession de foi renouvelée dans l´unique Dieu, comme le demande le premier commandement du Décalogue: "Je suis Yahvé, ton Dieu [...] Tu n´auras pas d´autres dieux devant moi" (Ex 20, 2.3). Et comme il est souvent répété dans la Bible: "Sache-le donc aujourd´hui et médite-le dans ton coeur: c´est Yahvé qui est Dieu, là-haut dans le ciel comme ici-bas sur la terre, lui et nul autre" (Dt 4, 39). On proclame ensuite la foi dans le Dieu créateur, source de l´être et de la vie. Suit l´affirmation, exprimée à travers la "formule du pacte", de la certitude qu´Israël a de l´élection divine: "Nous sommes à lui, son peuple et le troupeau de son bercail" (v. 3). C´est une certitude que les fidèles du nouveau Peuple de Dieu font leur, en ayant conscience de constituer le troupeau que le Pasteur suprême des âmes conduit aux pâturages éternels du ciel (cf. 1 P 2, 25).

6. Après la proclamation du Dieu unique, créateur et source de l´alliance, le portrait du Seigneur chanté par notre Psaume est poursuivi à travers la méditation des trois qualités divines souvent exaltées dans le Psautier: la bonté, l´amour miséricordieux (hésed), la fidélité. Ce sont les trois vertus qui caractérisent l´alliance de Dieu avec son peuple; elles expriment un lien qui ne se rompra jamais, à travers le flux des générations et malgré le fleuve boueux des péchés, des rébellions et des infidélités humaines. Avec une confiance sereine dans l´amour divin qui ne fera jamais défaut, le Peuple de Dieu s´engage dans l´histoire avec ses tentations et ses faiblesses quotidiennes.

Cette confiance devient un chant, pour lequel les mots ne suffisent parfois plus, comme l´observe saint Augustin: "Plus la charité augmentera, plus tu te rendras compte que tu disais sans dire. En effet, avant de goûter certaines choses, tu croyais pouvoir utiliser des mots pour indiquer Dieu; en revanche, quand tu as commencé à en sentir le goût, tu t´es aperçu que tu n´es pas en mesure d´expliquer de façon adaptée ce que tu éprouves. Devrais-tu pour autant te taire et ne pas élever de louanges?... Absolument pas. Tu ne seras pas aussi ingrat. C´est à lui qu´est dû l´honneur, le respect, la louange la plus grande... Ecoute le Psaume: "Acclamez Yahvé, toute la terre". Tu comprendras la joie de toute la terre, si toi-même tu te réjouis devant le Seigneur" (Discours sur les Psaumes III/1, Rome 1993, p. 459).